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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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que l'ouvrage a repris partout à cause de la guerre, dit Gérard avec
bonne humeur en allumant une cigarette. Il y a de plus en plus de femmes qui
travaillent et qui gagnent presque d'aussi bons salaires que les hommes.
     
    Quelques jours
après Noël, il fut entendu que Colombe et Rosaire viendraient chercher les
Morin à la maison au jour de l'An pour les emmener chez Lucille et Conrad, à
Saint-Hyacinthe.
     
    — Ça a quasiment
pas d'allure de tous embarquer dans ton char. On est ben trop, avait d'abord
objecté Laurette.      »
     
    — Ben non, avait
insisté son beau-frère. On se tassera un peu. On aura juste un peu plus chaud.
     
    C'était
maintenant devenu une tradition familiale que les parents de Gérard reçoivent
leurs enfants et leurs petits-enfants au jour de l'An ainsi que le 3 juillet,
date de l'anniversaire de naissance de Lucille.
     
    Pour sa part,
Laurette détestait cette visite et la seule pensée de devoir passer la première
journée de l'année 1942 en compagnie de sa belle-mère lui gâchait tout son
plaisir. La veille du jour de l'An, la mère de famille montrait déjà des signes
d'impatience depuis son lever.
     
    — Dire qu'on
aurait pu avoir ben du fun en allant passer la soirée chez Armand, ne put-elle
s'empêcher de dire à son mari en préparant les vêtements des enfants pour la
sortie.
     
    — On reviendra
pas là-dessus, dit sèchement Gérard. À Noël, on voit tes parents. Au jour de
l'An, c'est ma famille. En plus, on est chanceux. Rosaire nous emmène là-bas.
On n'a même pas à payer l'autobus ou le train. C'est pas drôle pour lui et pour
Colombe de se tasser comme ça pour nous faire embarquer avec les cinq enfants.
     
    — C'est sûr, toi,
t'as pas de trouble, dit sa femme d'une voix acide. T'as juste à t'occuper de
toi. Moi, je suis poignée pour que les enfants soient propres et ben habillés,
et c'est tout un aria.
     
    Gérard haussa les
épaules et se leva pour aller regarder tomber les premiers flocons de neige par
la fenêtre de la
     
    cuisine. Depuis
le lever du jour, le ciel s'était assombri considérablement et le vent s'était
mis à souffler.
     
    — On dirait qu'on
va avoir un peu de neige, dit-il sans se retourner vers sa femme. J'espère
qu'il en tombera pas trop. Ce serait ben maudit qu'on ait une tempête
aujourd'hui quand il est rien tombé depuis presque quinze jours.
     
    Laurette ne
formula aucun commentaire. Elle se contenta de suggérer à Jean-Louis et à
Denise de sortir jouer avec Gilles dans la neige durant quelques minutes.
     
    — Aussitôt que
vous serez mouillés ou que vous aurez froid, rentrez, leur ordonna-t-elle. Je
veux pas vous voir poigner la grippe dans le temps des fêtes, comme l'année
passée.
     
    Au début de
l'après-midi, le ciel devint si noir qu'il fallut allumer le plafonnier dans la
cuisine. Le vent se mit à souffler avec plus de force, chassant devant lui une
neige de plus en plus dense. De temps à autre, Gérard quittait sa chaise
berçante pour aller examiner par la fenêtre l'épaisseur de neige accumulée tant
sur le balcon que sur les marches de l'escalier qui menait chez les Gravel. À
la radio, Roger Baulu parlait des difficultés de circuler dans les rues de
Montréal et de l'achalandage aux postes de péage du pont Jacques-Cartier.
     
    — Si ça se calme
pas, on va avoir du trouble pour se rendre à Saint-Hyacinthe demain avant-midi,
dit-il à Laurette en train de préparer le souper.
     
    — Comment on va
le savoir si on y va ou pas ?
     
    — Il va falloir
téléphoner à Rosaire demain matin. Lui, il va savoir si les chemins sont
ouverts.
     
    — Ça, c'est si le
bonhomme Brodeur te laisse te servir de son téléphone en plein jour de l'An,
lui fit remarquer sa femme. Il y a rien qui te dit qu'il va être à la maison.
En tout cas, ce qui est sûr, c'est que tu vas être obligé d'aller frapper chez
eux, pas à la grocery. Ça va être fermé.
     
    — Ouais... Je te
dis que je commence à avoir hâte d'avoir le téléphone, laissa tomber son mari.
Si on l'avait, on pourrait appeler quand on veut chez nous ou chez Colombe.
     
    — Moi, ça me
dérange pas pantoute de pas l'avoir, déclara Laurette. C'est sûr que ce serait
pratique de temps en temps, mais ça coûte cher, cette bébelle-là, et on n'a pas
les moyens. En plus, il paraît qu'on est obligés d'être deux ou trois sur la
même ligne. Moi, endurer des écornifleux qui passeraient leur temps à guetter
ce que j'aurais à

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