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Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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l’occurrence
on ne peut guère dire qu’il ait trouvé ici un refuge. »
    Je le regardai d’un air grave.
    « Non, ici aussi il a trouvé moqueries et mauvais
traitements. Frère Guy, lorsque nous aurons terminé de manger, j’aimerais que
vous nous conduisiez à la cuisine où vous avez découvert le corps. Je crains
que nous ne nous mettions en mouvement déjà un peu tard.
    — Bien sûr. Mais je ne dois pas laisser mes malades
seuls trop longtemps…
    — Une demi-heure devrait suffire. » J’avalai une
dernière gorgée de bière, puis me levai en serrant mon manteau autour de moi.
« Maître Poer va rester à l’infirmerie ce matin. Je lui ai accordé une
matinée de repos. Après vous, mon frère. »
    **
    Nous traversâmes la salle où Alice s’occupait une fois de
plus du vieux moine. C’était l’homme le plus vieux que j’aie jamais vu. Allongé,
il respirait lentement et avec difficulté. Le contraste n’aurait pu être plus
grand avec son voisin grassouillet qui, assis dans son lit, était en train d’exécuter
une patience. Le malade aveugle dormait dans un fauteuil.
    L’infirmier ouvrit la porte d’entrée et recula d’un pas au
moment où presque un pied de neige accumulé contre la porte s’écroula sur le
seuil.
    « Nous devrions porter des protège-chaussures, dit-il. Autrement,
on va attraper des engelures aux pieds. » Il me pria de l’excuser et me
laissa contempler le spectacle, la buée sortant de ma bouche. Sous un ciel bleu
l’atmosphère était on ne peut plus calme et glaciale. Comme lorsqu’il fait un
froid intense, la neige était légère et poudreuse, neige sur laquelle il est si
affreusement difficile de marcher. J’avais apporté mon bâton car, étant donné
mon manque d’équilibre, je risquais beaucoup de faire une chute. Le frère Guy
revint, chargé de robustes protège-chaussures de cuir.
    « Il faut que j’en fasse distribuer aux moines qui
travaillent dehors », dit-il. Nous les laçâmes, puis nous enfonçâmes jusqu’aux
mollets dans la neige, le teint du frère Guy paraissant plus sombre que jamais
contre toute cette blancheur. La porte des cuisines n’était pas loin et je vis
que le bâtiment principal possédait un mur mitoyen avec l’infirmerie. Y avait-il
une porte entre les deux ?
    « Il y avait jadis un passage. Il a été fermé à l’époque
de la peste noire afin d’endiguer la propagation du fléau, et on ne l’a jamais
rouvert. C’est une sage mesure.
    — Cette nuit, quand j’ai aperçu le gamin, j’ai eu peur
qu’il n’ait attrapé la suette. Je l’ai déjà vue à l’œuvre. C’est terrible. Mais,
bien sûr, la cause en est l’air vicié des villes.
    — Dieu merci, je n’ai guère eu affaire ici à ce genre de
maladie. Je dois surtout traiter les effets des longues séances de prière, debout
dans une église glaciale. Et du vieil âge, bien entendu.
    — Vous avez un autre patient qui a l’air mal en point. Le
vieillard.
    — Oui. Le frère Francis. Il a quatre-vingt-quatorze ans.
Il est retombé en enfance et en ce moment il souffre de fièvre, je crains qu’il
ne soit parvenu enfin au terme de son pèlerinage.
    — De quoi souffre le gros moine ?
    — D’ulcères variqueux, comme le frère Septimus, mais en
plus grave. Je les ai drainés et il se repose un peu. » Il eut un sourire
bienveillant. « J’aurai peut-être du mal à le faire se lever. Personne n’aime
quitter l’infirmerie. Le frère Andrew fait partie des meubles désormais. Il est
devenu aveugle sur le tard et il a peur de sortir. Il a perdu confiance en lui.
    — Vous vous occupez de combien de vieux moines ?
    — Douze. Les frères ont tendance à vivre longtemps. J’ai
quatre octogénaires.
    — Ils ne subissent pas la tension ou les vicissitudes de
l’existence qu’endurent la plupart des gens.
    — Ou alors la prière fortifie le corps autant que l’âme.
Mais nous y voilà. »
    Il me fît passer par une lourde porte de chêne. Comme il me l’avait
expliqué la veille, un petit couloir conduisait à la cuisine elle-même. La
porte était ouverte et j’entendais des voix et un bruit de vaisselle. Une bonne
odeur de rôti émanant de la pièce embaumait le couloir. Six serviteurs
préparaient un repas. La cuisine était vaste et semblait propre et bien
organisée.
    « Eh bien ! mon frère, lorsque vous êtes entré ici
cette nuit-là, où gisait le corps ? »
    L’infirmier fit quelques pas sous le regard

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