Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
Vom Netzwerk:
cognée vient de s’abattre.
     
    La tête est tombée.
     
    C’est fini.
    À l’heure du loup
    Jeanne est partie de son côté, je vais du mien. Je les suis tous les deux. Mon mousquetaire et sa compagne. Ce spectacle n’était pas pour elle. Il eût mieux valu ne pas l’emmener. Trop tard, le mal est fait.
    Ce que je veux savoir, c’est où logent ces tourtereaux.
    Le gentilhomme ramène sa conquête à sa porte, la quitte après bien des effusions, un peu déplacées en ces circonstances. J’ai bien noté l’adresse. Maintenant, à notre homme. Je marche derrière lui. Oh, sans idée criminelle. D’ailleurs, nous sommes tous deux désarmés. Je veux connaître son nom et savoir où lui déposer un courrier dans quelques jours. Le temps d’arriver à mes fins.
    Ce mousquetaire me fait faire quelques détours, en me laissant prendre la pluie. Avant de rentrer chez lui, il va d’abord de taverne en tripot. Je dois attendre dehors, sous l’eau. Enfin, je finis par être renseigné.
    Il n’y a pas une minute à perdre.
    J’ai tout perdu, je ne suis plus qu’une ombre, mais il me reste encore une petite fortune.
    J’ai toujours près de moi la bourse de monsieur Philippe… son dédommagement. Grâce à elle, je vais pouvoir mener la grande vie et me faire tailler un habit neuf. Le soir même, je suis devenu méconnaissable.
    Ma sortie, je vais l’avoir, je vais me l’offrir. En grande pompe, sur un tapis rouge. C’est en effet la couleur que j’ai choisie, comme je l’annonçais, d’un air un peu désinvolte mais néanmoins prophétique. Oui, je suis tout de rouge vêtu, en habit de velours. J’ai laissé ma vieille rapière dans une chambre à bas prix, où je loge incognito. L’hôtelier est par ailleurs bien étonné de me voir sortir de son humble demeure sous telle apparence, grand prince,accompagné d’une fine épée de duelliste sur laquelle vient se poser un gant écarlate en cuir de Cordoue.
    Ayant repéré son antre, je n’ai plus qu’à guetter ma cible. C’est à croire qu’elle m’attendait. Elle est au pas de sa porte. Mais elle n’ose aller plus loin. Il pleut. Il pleut encore. Le Ciel, encore une fois, me vient en aide. Dieu aime les hommes résolus. Je délace ma cape, je m’offre de la tenir, galant homme, au-dessus de ces charmantes épaules, pour les tenir à l’abri. Puis-je vous conduire ? J’irai là où vous allez, votre route sera la mienne, vous n’aurez qu’un mot à dire pour que je vous abandonne.
    D’où vient ce jeune effronté ? Qui est-il ?
    Pendant trois jours et trois nuits, je vais répondre par le silence. Si l’on conseille de rassurer une femme pour la garder – chose que je n’ai jamais su faire, ne l’ayant pas désirée par la suite –, il faut au contraire l’intriguer, la dérouter pour lui plaire. La curiosité, c’est l’appât du séducteur. Tout bon chasseur plante une énigme au bout de son crochet.
    Je finis par me rendre indispensable. Je suis beau garçon, mystérieux, je paye sans compter, je devance les désirs, et je me garde de combler toutes les attentes.
    La belle est prise.
     
    Monsieur, vous portez des cornes. Pour vous en assurer, venez donc ce soir, rue de la Vieille-Lanterne, à l’heure du loup.
    Qui me tue ?
    Voici, en termes exacts, le billet que je fis parvenir à ce jeune mousquetaire qui ne doit plus reconnaître sa maîtresse depuis quelques jours. D’ailleurs, ne fut-elle pas toujours absente de chez elle, lors de ses dernières visites ?
     
    Ce soir-là, une demi-lune brille au milieu du ciel, entre les nuages.
    Une lanterne brûle à l’angle de la rue.
    Nous sommes, mademoiselle et moi, réunis sous sa clarté.
    J’ai tenu à ce que nous fussions masqués, tous deux. Nous irons sous les étoiles, à une fête costumée.
    — Me laisserez-vous enfin en apprendre davantage à votre sujet ? me demande cette compagne infidèle en tendant les lèvres.
    — Je crains qu’il ne soit trop tard, dis-je en respirant son haleine, mais sans effleurer sa bouche.
    — Comment… Que voulez-vous dire ?
    Je tourne la tête, discrètement et je vois, au loin, s’approcher une silhouette reconnaissable.
    — Embrassez-moi, dis-je avec l’autorité d’un comédien consommé. Ceux qui s’aiment devraient toujours s’embrasser comme si c’était la dernière fois. Le bonheur est un oiseau. Il chante quand il se pose, mais il s’envole dès qu’on l’approche un peu trop.
    Cette fois, je prends ces lèvres

Weitere Kostenlose Bücher