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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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simple offrande, répond la frondeuse parcourue d’un frisson, cette femme venait de m’offrir un trésor, en délivrant mes espoirs les plus profonds. Nous vivons au jour le jour, libres, sans songer à demain, parce que la fin, pour les gens de notre condition, est écrite par avance. Ce royaume où nous régnons en maîtres, c’est un paradis aux portes de l’enfer. Un beau jour, nos lits de paille ne logeront plus des papillons et des fourmis, mais des rats et de la vermine. Ce qui commence dans le jeu et la liesse, l’éternelle comédie des gentils voleurs et des méchantes gens d’armes, s’achève comme une tragédie grotesque, trois pas au-dessus du sol, la tête bleue, la langue hors de la bouche. Eh bien, vois-tu, il a suffi que cette femme ouvre ma main, ouvre l’avenir, pour que je réalise à quel point je désire échapper à tout cela. Je veux être choisie, je veux me donner, donner la vie à mon tour, ne plus avoir peur, être une femme, une épouse, une mère et quitter la terre en plein bonheur.
    Main-gauche ne trouve rien à répondre.
    Ce nœud fatal, il le sent déjà lui serrer la gorge, cet échafaud où il sera tourné en ridicule par les écoliers, imitant sa pose entirant la langue, en levant les yeux, il peut l’apercevoir, il se rapproche, il l’attend.
    — Il faut partir, Lanteaume nous attend, dit le brigand en éperonnant sa monture, pour passer devant.

Je suis comme le vent
    Revenons au château de Saint-Germain.
    Le chevalier d’Artagnan vient de se remplir un autre verre.
     
    L’orateur reprend la parole.
     
    « Quel meilleur endroit pour cacher un mort que la maison même du bourreau de Paris, infréquentable destination ? Demeurez là jusqu’à ce que je vienne vous chercher , dit don Juan de Tolède en remettant le duelliste revenu au port entre les mains de l’exécuteur. Le retour du fils prodigue se fait presque sans bruit. Ni larme ni tapage, ni clameur ni louange ne jaillissent au-dehors. Tout comme le gentilhomme, qui demeure interdit, réalisant l’incroyable situation à laquelle il se trouve mêlé, je suis gêné de fausser ces retrouvailles. La grande salle où nous pénétrons nous ferait presque oublier où nous sommes : on y voit de gros et précieux livres de médecine, des traités d’anatomie, des ouvrages savants, Montaigne, Rabelais et Descartes mis à l’honneur entre les Anciens et les Modernes. Mais en faisant quelques pas de plus, on aperçoit un nouveau pan de mur et l’ombre solennelle reprend ses droits. Là, pesant héritage, les armes de la famille : coupe-têtes, lourdes et longues épées à double feuille de quatre pieds de long, remplacent le portrait des ancêtres. Chacune d’elles doit rappeler à la mémoire des nouvelles générations l’exemple donné par ceux qui les brandirent tour à tour et les portèrent les premiers, sinon de main de maître, du moins sur le dos et face aux hommes, de la naissance au trépas.
    Mais encore une fois le temps nous presse, notre visite ne peut-être que brève, il faut renoncer à dresser la table de banquet, à sacrifier le veau gras sur l’autel. Tout ce qui ne peut être dit s’exprime par les yeux. Pour le reste, le père et le fils doivent s’en tenir à l’essentiel. Germain Hackard de La Hache est seul chez lui. Du moins, en cet instant. Son épouse est morte… L’informationest donnée sans précaution. Le fils, Robert, le frère de Jean, partage la charge avec son père. Il est désormais en droit de rouer, d’écarteler, de rompre, d’infliger la souffrance et de donner la mort. Il peut faire son office par le feu, l’épée, le fouet, l’écartement, la roue, la fourche et le gibet, afin de traîner, poindre ou piquer, couper oreilles, démembrer, flageller ou fustiger, par le pilori, l’échafaud et le carcan.
    Il est marié. Il a quatre enfants. Trois filles et un successeur.
    Soudain, par la porte entrebâillée, on entend des rires et des chants, les leurs, ils reviennent. Ces rires et ces chants, aucun de nous trois (don Juan de Tolède, Edmond de Villefranche et moi) ne les attendions. Pour Amadéor, c’est le moment de partir, encore une fois.
    Les enfants entrent, ils sont surpris. Ils n’ont pas l’habitude de voir tant de monde chez eux. Ni leur père ni leur mère ne les accompagnent. Ils devaient jouer dehors, non loin du grand-père, resté sur son île.
    C’est à l’aventurier, à leur oncle, qu’ils s’adressent spontanément.
    — Qui

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