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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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abandonnant entre nos mains avant de reprendre son envol.
    Cette damnée Edwige de Bellerasse sortit alors de son corsage la lettre qu’elle avait trouvée dans mes affaires, et elle m’a dit :
    — Main-gauche n’a pas menti, vous êtes bien la fille de Son Éminence.
     
    Oh, si Main-gauche avait menti…”
     
    Les yeux de l’Alouette se remplissent à nouveau de larmes. Elle se reproche d’avoir gardé le silence, de n’avoir rien tenté, par peur… Mais comment aurait-elle pu savoir, en ces heures dramatiques, que son ancien complice allait trahir ici et là, prendre la fuite, qu’il ne songea pas un instant à mettre la menace de Lanteaume à exécution ?
     
    — Lanteaume va mourir, n’est-ce pas ? nous demande l’ancienne frondeuse, en baissant la voix.
    Don Juan de Tolède lui répond, en prenant sa main dans la sienne :
    — Tout comme mon père, qui s’est sacrifié pour nous, pour moi, pour vous, Lanteaume a choisi sa mort. C’est lui et lui seul qui a décidé de son sort. Pleurez-le, mais laissez-le partir.

Barrages
    Le jour se lève. Nous approchons des remparts de la Ville. Amadéor commande l’arrêt. Attendez ici , ordonne-t-il, je reviens .
    Il prend un cheval et va en éclaireur reconnaître la route. Nous l’attendons patiemment. De son côté, à l’écart, le brigand Belles-Manières est allé dormir. Repos du guerrier. Cela, du reste, Votre Majesté, va nous permettre de parler bien librement. Il n’est pas censé savoir que la jeune femme que nous venons de libérer est la fille de Son Éminence. Peut-être l’a-t-il compris. Cependant, s’il se montra digne de confiance, nous aimons mieux rester prudents.
    Mais voici Amadéor…
    Les nouvelles qu’il rapporte ne sont pas bonnes.
    — C’est bien ce que je craignais, dit-il. Grande réunion de charrettes, de badauds, de manants et de gueux, là-bas, auprès de la porte. Et cette porte, je le crains, ne s’ouvrira pas toute seule, aucune autre d’ailleurs ne serait plus facile à franchir si les choses sont comme je le crois.
    — Que voulez-vous dire ? demande Edmond de Villefranche.
    — Don Juan veut dire, dois-je poursuivre en répondant à sa place, que ce rassemblement inhabituel de piétons en tous genres et de carrosses à trente-six portières n’est rien moins qu’un barrage. Ces messieurs ne sont pas en promenade à une heure si matinale,et s’ils ont dormi hier au soir à l’auberge de la Lune, comme on peut de supposer, ce n’est pas parce que la saison est douce et le ciel en fête. Oubliez-vous cet orage ?
    — Mais alors… commence Edmond.
    — Mais alors, monsieur de Villefranche dis-je en lui coupant la parole, ces gueux sont des marauds, des marauds ou des soldats, des hommes de main, des hommes d’épée, des hommes d’argent, cachant fort probablement un dé à cornet, une bourse pleine, un verre de bois, une pierre à fusil ainsi qu’une rapière longue comme le bras sous leurs vieux manteaux de pèlerins traînant dans la boue. Quant aux charrettes, elles pourraient également abriter une rangée de mousquets ne demandant qu’à faire feu.
    — Oui, messieurs, continue l’aventurier, la Cabale a le couteau à la gorge, des moyens considérables, des coursiers rapides, des relais d’informateurs partis en tous lieux et quantité de loyaux sujets armés jusqu’aux dents, n’attendant qu’un mot ou un signe pour sortir de leur trou, mettre le nez dehors et la flamberge au vent. Soit ils ont pris des précautions, soit ils nous ont devancés. C’est leur dernière cartouche : nous empêcher d’arriver à bon port. S’ils tendent la main aux entrants, c’est pour voir qui s’approche, flairer la proie, il n’est pas impossible que le guet lui-même fut soudoyé pour que personne ne songeât à les déloger. Quoi qu’il en soit, nous devons prendre nos précautions. Il serait décevant de manquer notre arrivée par la faute d’une balle perdue. Hors de question de quitter ce carrosse, prise de guerre. C’est un symbole. Nous passerons avec, j’y tiens, pour la beauté de la chose. Un homme seul n’attirera pas l’attention. Edmond de Villefranche, que diriez-vous d’aller porter votre moitié de parchemin aux mains de Son Éminence ?
    L’aventurier sort de son pourpoint un petit flacon d’encre, une plume et une feuille de papier pliée en quatre : Toujours pouvoir envoyer un mot , me dit-il. Le cardinal et moi devons souvent nous écrire.
    Il rédige un court message.

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