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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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s’approchent plus naturellement des ventres à bedaine que de l’élite, qui porte sa bourse du côté de l’épée. On guette une affaire… un gousset à portée de main.
    Dans ce grand chahut où les plus riches passent les premiers, je reconnais de loin les couleurs de notre don Juan de Tolède. Il se fraie un passage avec Fortunio, sans doute ont-ils trouvé le moyen de payer leur place… mais alors que je m’apprête à le rejoindre, j’entends s’élever quelque chose comme le début d’une querelle. Encore une et non des moindres. Je m’approche… Tout le monde prête l’oreille.
    Cette scène, improvisée sur le vif, oppose le digne gentilhomme Edmond de Villefranche, le maître du page Hercule, qui se tient cette fois bien à sa place, derrière, à ce riche barbon, dépouillé par deux fois. »
    — Encore eux ! dit le roi, stupéfait.
    — Oui. Et les voici dressés l’un contre l’autre. Ils se connaissent. Je dirais même qu’ils ont un lien de parenté des plus étroits, mais écoutons le sieur Edmond de Villefranche :
    « — Comme je vous retrouve, monsieur mon oncle, à Paris, au théâtre ! Est-ce vous que nous venons applaudir ce soir ? Dans quel emploi ? Celui du mari vertueux ou du parfait hypocrite ?
    — Allons, monsieur ! Nous ne sommes pas seuls ! De la pudeur !
    — De la pudeur ? Que craignez-vous ? Qu’en déchirant l’étoffe de votre joli costume, je révèle à la foule vos vilains secrets ?
    — Je ne vous permets pas ! Vous vous oubliez ! De la décence ! Songez que je suis accompagné, que vos insinuations scandaleuses éclaboussent mon épouse, soyez digne de votre nom ! Passez me voir, dès demain, à mon hôtel, rue Saint-Louis-en-l’Isle et nous parlerons d’honnête homme à honnête homme, la tête froide…
    Edmond de Villefranche entend bien mettre les choses au clair, il réplique d’une voix assurée et tranchante :
    — Fort bien, nous nous verrons demain, comme vous le souhaitez. Je vous rapporterai ainsi les avis brûlants du cardinal, à qui je livrerai en grande hâte et sans ménagement, dès la première heure, au Louvre, les motifs et les dessous de cette injustice dont je suis la triste victime ! Je ne doute ni de son intérêt ni de sa faculté de jugement quand je porterai à ses yeux les preuves de votre duplicité, les pièces attestant de votre sinistre complicité dans ces intrigues de salon visant sa personne et préparant sa ruine !
    — Assez ! Monsieur, assez ! répond le barbon manifestement fort embarrassé. Dès demain, nous tirerons tout cela au clair et je tâcherai de vous ramener à la raison… je comprends vos griefs… je ne doute pas que nous puissions trouver un arrangement.
    — Un arrangement ? Vous me laisserez bien tailler la manche d’un pourpoint dans votre manteau… Gardez votre vaisselle, vos miettes et vos os à ronger, monsieur. Je suis votre neveu, non votre mendiant. Bon spectacle.
     
    Fin des débats. Du moins, pour ce soir.
    Cette altercation, qui ne pouvait passer inaperçue, donne matière à commentaires. Chacun y va de sa petite voix, en aparté. Intrigué au plus haut point par cette affaire qui s’ouvre à moi comme par enchantement et qui, en concernant le cardinal, touche peut-être directement à mon enquête, je veux en savoir plus long. J’essaye surtout de ne pas quitter des yeux ce barbon et son épouse,car j’attends leurs réactions, je souhaite pouvoir entendre les mots qu’ils échangeront à voix basse… Je cherche Bastoche du regard, espérant l’envoyer à ma place, au plus près, pour qu’il tende l’oreille sans se faire remarquer… mais, hélas, il semblerait qu’il ne soit pas encore revenu. Quant à moi, je suis reconnu. Ce fâcheux qui essaye de se faire oublier regarde en même temps de tous côtés, comme une bête affolée… Il est encore sous le coup de cette foudre qui vient de lui tomber sur la tête sans crier gare… et c’est ainsi qu’il m’aperçoit. La honte se lie à la colère. Il veut mettre le plus de distance entre lui et moi. De plus, je retrouve également des visages familiers, on m’appelle et je dois échanger quelques mots pour ne pas montrer la véritable raison de ma présence. Je perds donc de vue le barbon.
    Coup de théâtre
    Quelques instants plus tard, j’ai gagné le parterre.
    Don Juan de Tolède me fait signe, il vient à ma rencontre avec Fortunio.
    Je les interroge :
    — Vous êtes parvenu à payer vos places ?
    L’aventurier

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