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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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fois que la représentation avait été jouée, Iouda n’avait plus aucun besoin des figurants. Sur le lit, Margarita gisait nue, sur le dos. Ses jambes étaient rassemblées et droites, ses bras étaient mollement étendus de chaque côté d’elle, dans un sinistre simulacre de notre Seigneur crucifié. Sa longue chevelure sombre rayonnait sur les oreillers comme un halo, entourant un visage dont les yeux morts fixaient le plafond, sans expression.
    De son côté droit, les draps et les oreillers étaient trempés de sang rouge vif, dont son estomac, sa poitrine et ses joues avaient également été enduits. Le côté droit de sa gorge était déchiré et ouvert à la manière caractéristique des voordalaki .
    Domnikiia hurla.

    Domnikiia ne demeura pas dans la maison close après cela. Ni aucune d’elles. Les autorités commencèrent une enquête. Un bref coup d’œil à mes papiers suffit à les persuader de ne pas me harceler, pas plus que Domnikiia, bien que je doutais que cela les convainc vraiment de mon innocence. J’aurais pu leur dire de terminer leur enquête le plus rapidement possible, mais je choisis de ne pas le faire. Je voulais que la nature de Iouda et des autres Opritchniki soit connue de tous, mais c’était quelque chose que la police devrait découvrir par elle-même. Je n’aurais pas été cru si j’avais donné ma version des faits.
    Et de fait, ils se montrèrent peu intéressés par un corps de plus parmi des milliers. Ils cherchaient davantage à identifier ceux qui, à Moscou, avaient collaboré avec l’envahisseur. S’ils avaient choisi de parler avec Domnikiia, ils auraient aisément noté une différence entre sa description du cadavre de Margarita et ce qu’ils trouvèrent. Une blessure supplémentaire était apparue.
    Après que j’eus conduit Domnikiia hors de la chambre de sa collègue et dans la sienne, j’étais retourné voir Margarita. Son corps était sans vie. Ses yeux morts n’eurent pas la moindre réaction aux changements de lumière. Sa chair ne brûla pas lorsqu’elle entra en contact avec le soleil. Pour autant que n’importe qui puisse le dire, Iouda avait provoqué sa mort, pas initié sa transformation. Mais je me rappelai un autre corps que j’avais autrefois vu dans un état guère différent : le corps d’un jeune soldat russe dénommé Pavel, transporté sur une carriole de bois à travers les rues de Moscou. Lui aussi avait semblé mort. Lui aussi avait pu rester sous le regard du soleil sans en être affecté. Mais son corps ne s’était pas décomposé, car il avait échangé du sang avec un vampire et en était ainsi, en quelques jours ou quelques semaines, devenu un.
    Je ne pouvais laisser cela se produire. D’un seul geste, rapide et décidé, je perçai son cœur mort à l’aide du pieu de bois de ma dague. Comme cela m’était facile de faire cela à Margarita alors que jamais je ne l’aurais pu sur Domnikiia…
    Domnikiia logea avec moi à l’auberge. Ce ne fut pas la meilleure période dans notre relation. Domnikiia avait peut-être conservé son âme, mais la mort de Margarita avait durement affecté son esprit. Son énergie était réduite à presque rien. Elle ne souriait pas, ne plaisantait pas, ne haïssait même pas. Toutes ces réactions étaient, j’en étais certain, très naturelles compte tenu des circonstances, et ces qualités reviendraient avec le temps, mais pour le moment elle n’était même pas une ombre de la Domnikiia que j’avais connue et aimée. Cependant, pis encore que la perte de ces choses que j’admirais en elle, je trouvais maintenant sa dépendance vis-à-vis de moi étouffante. De nouveau, ce n’était qu’une réaction temporaire au choc qu’elle avait subi, mais cela me rappelait que, quoi qu’il nous arrive, tant que nous étions ensemble, elle était sous ma responsabilité. J’avais déjà des responsabilités : Marfa et Dimitri. Bien sûr, je pouvais en assumer une de plus, mais je ne le voulais simplement pas. Domnikiia était censée être mon irresponsabilité, la personne avec laquelle je n’avais pas à me préoccuper de l’avenir ou du monde extérieur. Maintenant plus que jamais, c’était ce dont j’avais besoin. Le carnage dont j’avais été témoin durant ces mois de l’automne 1812 m’avait transformé en vieil homme. J’avais perdu les trois personnes qui m’étaient les plus proches ; Max et Vadim par la perte de leur vie même, Dimitri par celle, insupportable,

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