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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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un homme choisit de devenir un vampire de manière à pouvoir se comporter comme un monstre, ou s’il se trouve déjà tout à fait capable de se comporter comme un monstre de toute manière, il reste un monstre et satisfait de l’être. Iouda restait un danger pour tous ceux avec qui il était entré en contact. Une question qui méritait d’être posée était de savoir si un autre des Opritchniki pouvait ne pas être non plus un vampire. Iouda avait impliqué qu’ils l’étaient tous, mais pouvait-on lui faire confiance ? Le témoignage de mes propres yeux me convainquait pour la plupart d’entre eux : après leur mort, j’avais assisté à leur désintégration physique immédiate. Je n’avais pas vu ce qu’il était advenu de Ioann ou de Filipp une fois qu’ils avaient péri. Les décès de Simon, Iakov Alfeïinitch et Faddeï avaient été, si l’on en croyait Max, causés par la lumière du soleil. J’étais sûr que la totalité des onze avaient en effet été des vampires. Si ce n’était pas le cas, pourquoi devrais-je m’en préoccuper ? Cela n’avait pas une importance fondamentale avec Iouda, pas plus que cela en avait avec les autres.
    Mais que penser de Domnikiia ? L’idée d’être trompé – d’être trahi – par elle entre tous était le véritable cauchemar dont je ne voyais pas de perspective d’éveil. Lorsqu’elle me taquinait, cela révélait son esprit et son humour, mais se jouer ainsi de moi sur de tels sujets démontrait ce que l’on pouvait presque qualifier de folie. « Je ne suis pas surprise que Iouda ait trouvé si facile de te duper.» Ç’avaient été ses propres paroles. Iouda et elle se réjouissaient tous deux de me faire passer pour un imbécile, et j’avais été jusqu’à présent bien trop candidement désireux de leur rendre ce service. Mais je me rappelais également ce que Maxime avait dit autrefois, que le meilleur endroit pour cacher un arbre était une forêt, et le meilleur endroit pour cacher un mensonge, parmi la vérité. Pourquoi Iouda s’était-il laissé capturer ? Pour me parler. Qu’était-ce donc qu’il voulait me révéler ? Pas les plans de Bonaparte. Pas ses vues sur les échecs. Pas même le fait qu’il n’était pas un vampire. Il s’agissait de me mettre en tête l’idée que Domnikiia avait choisi de devenir un vampire. Au milieu d’une forêt de vérité, c’était l’unique fait qu’il avait voulu me transmettre. Ce n’était même pas un fait – c’était une information qui pouvait être vraie et qui pouvait ne pas l’être. Je ne pourrais jamais connaître la vérité, et le doute allait donc me hanter pour toujours.
    Le jeu de Iouda, que ce soit par la préméditation ou par l’improvisation, s’était déroulé couche après couche devant moi, comme l’exploration d’une montagne, lorsque chaque faux sommet, une fois conquis, révèle derrière lui un autre sommet plus élevé. Tout d’abord, j’avais cru qu’il avait transformé Domnikiia en vampire. Puis j’avais découvert que, même ainsi, je ne pouvais la tuer. Puis j’avais découvert qu’elle n’était pas un vampire et que, si je l’avais tuée, ç’aurait été en tant que femme mortelle. Ce matin, il m’avait convaincu qu’elle avait tout du long souhaité être un vampire, même s’il ne pouvait la transformer. Il ne pouvait pas continuer éternellement à faire pencher la balance d’un côté puis de l’autre et à faire basculer mon point de vue d’un côté à l’autre, mais il n’en avait plus besoin. Il avait trouvé le point d’équilibre parfait. Je ne pourrais jamais connaître la vérité et ainsi, quoi que je choisisse de faire, j’allais passer la moitié de mon existence à le regretter. Si j’abandonnais Domnikiia, alors je m’inquiéterais de lui avoir causé du tort, d’avoir cru le dernier mensonge de Iouda à son sujet, alors qu’elle avait été tout du long d’une innocence exemplaire. Si je restais avec elle, je la sonderais perpétuellement, me demandant ce qui s’était passé entre eux cette nuit-là à Moscou.
    Ma perception était tellement meurtrie par ma vision constamment changeante de la vérité – non seulement au sujet de Domnikiia, mais aussi de Maxime, de Dimitri, des Opritchniki et de Iouda lui-même – que je n’étais plus en mesure d’être certain de quoi que ce soit. Le conseil de Vadim, je le savais, avait été de retourner à Pétersbourg, de revenir auprès de Marfa.

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