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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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quatre dans celle du milieu. Domnikiia était la dernière à monter dans le deuxième attelage. Je compris que toutes les craintes que j’avais eues au sujet de Iouda et des Opritchniki n’étaient que de l’aveuglement de ma part. Tout ce que j’avais désiré, c’était l’apercevoir encore une fois, fugitivement.
    Piotr Piétrovitch s’installa dans la voiture de tête, à côté des cochers, et le convoi s’ébranla. Lorsque son attelage tourna au coin de la rue, je captai une brève et dernière image de Domnikiia assise, calme et, bien que cela ne lui corresponde pas, sage.
    Elle était en route pour quitter Moscou, en sécurité, et il n’y avait pas eu la moindre trace des Opritchniki.
    Je revins me coucher et m’obligeai à quelques heures d’un sommeil réparateur avant de me mettre en route pour mon rendez-vous avec Vadim et Dimitri. Ma progression était lente car, en plein jour, les rues étaient de nouveau bondées de gens, de chevaux, de charrettes et d’attelages. À un coin de rue, une foule s’était rassemblée autour d’un homme que l’on fouettait, attaché à un arbre. Bien qu’eux-mêmes épargnés par ce sort, la peur se lisait sur chaque visage dans la foule, une peur des envahisseurs sur le point d’arriver, qu’ils tentaient sans succès d’oublier en observant ce spectacle. Parmi eux un sous-lieutenant d’artillerie, une pipe en terre à la bouche, se détendait en contemplant le châtiment avec un sourire.
    — Qu’a-t-il fait ? demandai-je.
    — C’était un fantassin, fut la réponse incongrue de l’artilleur.
    — Je veux dire, pourquoi le fouette-t-on ?
    — Oh, je vois. (Il tenta une explication plus claire.) Il est français.
    — Comment est-il donc arrivé ici ?
    — Il vit ici depuis des années. Ils l’ont traîné dehors de là-bas. (Il indiqua une grande maison de belle allure, du genre de celles où l’on s’attend à trouver des serviteurs français.) Ils disent que c’est un espion.
    — A-t-il été jugé ?
    — Non. (Il tira profondément sur sa pipe.) C’est pour cela qu’ils se contentent de le fouetter.
    Je ne pus m’empêcher de souhaiter que les autres Français soupçonnés d’être des espions soient traités avec la même clémence.
    — Ne devriez-vous pas faire quelque chose pour les arrêter ?
    Il se tourna vers moi et je vis pour la première fois qu’il lui manquait l’œil droit, l’orbite commençant à peine à cicatriser sur cette blessure bien trop récente. Il s’enflamma.
    — Les arrêter ? J’ai vu la moitié de mon peloton déchiqueté par un unique obus français. Vous croyez que je me suis fait cela (il fit un geste en direction de son œil manquant) juste pour pouvoir ressembler au général Koutouzov ? Quand des civils comme eux décident de se venger en mon nom, vous croyez que je vais faire quoi que ce soit si un foutu civil comme vous me demande de les arrêter ? Allez vous battre vous-même avant de dire à un soldat ce qu’il doit faire !
    Comme à l’accoutumée, je n’étais pas en uniforme et, bien qu’il m’ait été possible lui montrer mes papiers pour prouver mon rang, en quoi cela était-il mon affaire ? D’après les histoires que j’entendis par la suite, cet homme avait eu de la chance d’être seulement fouetté.
    Je poursuivis en direction de la Moskova. Dans les rues bondées, on se déplaçait de plus en plus lentement. Le désespoir qui avait incité les gens à fuir n’aidait pas pour autant à leur progression. Les rassemblements comme celui qui avait eu lieu autour de la flagellation n’y concouraient pas, dans la mesure où même les gens qui ne s’arrêtaient pas et ne créaient pas d’obstruction ralentissaient tout de même pour voir, en passant, ce qui avait lieu.
    Le long de la rue Nikitski, je parvins à un autre goulot étranglant le flux de la circulation. Une petite charrette plate, tirée par deux grenadiers de l’infanterie de ligne, était à l’arrêt. Sur elle, allongés de biais, côte à côte, se trouvaient trois de leurs camarades, leurs uniformes en lambeaux et ensanglantés. Il y avait une dispute entre les deux hommes – plutôt des garçons – qui tiraient la charrette et deux autres soldats – tous les deux des dragons, contraints de voyager à pied. L’un d’eux – celui qui, en réalité, assurait tout le débat – était en assez bonne forme. Son ami était dans un piteux état. Sa tête pendait mollement, sans désir de lever de nouveau

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