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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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qu’un humain ressentait lorsqu’il tombait sur la carcasse pourrissante d’un animal. Un dégoût viscéral mais aucun sentiment d’empathie pour l’être vivant à partir duquel ces restes s’étaient formés. Pour moi, Matfeï n’était plus que de la poussière, une poudre sèche qui serait bientôt dispersée par le vent. Pour Varfolomeï, c’était un memento mori , et il fut soudain dévasté. Il tomba à genoux et en ramassa une poignée, la laissant couler entre ses doigts écartés tandis qu’il l’inspectait dans une tentative désespérée d’y trouver quelque soupçon de vie.
    — Ils m’avaient dit que je vivrais pour toujours, annonça-t-il.
    — Est-ce cela qui t’avait attiré ? lui demandai-je.
    — Non. Ils disaient que je ne connaîtrais pas la peur. La peur était mon pire ennemi.
    Il regarda dans ma direction. Je ne devais pas être très intimidant. J’étais désarmé et épuisé, mon corps affalé en avant et mes bras reposant sur mes genoux. Je pouvais à peine lever ma tête pour lui parler.
    — Peur de quoi ? demandai-je.
    Derrière lui, je vis l’Italien rouler et se remettre à genoux.
    — Des conséquences, répondit Varfolomeï, avec une ambiguïté qui impliquait qu’il y avait déjà réfléchi de nombreuses fois et choisi le mot avec soin.
    L’Italien était sur pied et se glissait vers Varfolomeï, son épée dégainée.
    — Tu as donc peur des conséquences ?
    — Autrefois je craignais l’opinion de mes pairs. (Il releva le regard de la poussière dans sa main et le posa sur moi.) Maintenant j’ai de nouveaux pairs.
    Sa main s’écarta violemment de son flanc, frappant la poitrine du carabinier et le faisant tomber à terre. Ce ne fut qu’un instant de distraction pour Varfolomeï, mais il était assez long pour que je tende la main et saisisse ce dont j’avais besoin.
    — Les gens comme vous avaient l’habitude de me mépriser, poursuivit Varfolomeï en se relevant. Et je peux sentir que c’est encore le cas. Mais vous savez ce qui a changé ? Je m’en moque, maintenant.
    Derrière lui, le soldat s’était remis sur ses pieds. Il ne prit pas la peine de récupérer son épée, mais il entreprit de suivre les pas de Varfolomeï, tel une ombre, maintenant une distance de sécurité, tandis que celui-ci s’approchait de moi.
    — Tu parles comme si tu ne t’en moquais pas, dis-je en me redressant.
    La raison pour laquelle le soldat n’avait pas ramassé son épée devint claire. Il ne traquait pas Varfolomeï, mais se glissait vers la porte. Maintenant qu’il était à sa portée, il s’y précipita. Il s’échappa sans s’arrêter et nous l’entendîmes courir dans l’escalier pour rejoindre sa liberté.
    Dans son empressement, il avait négligé de refermer la porte derrière lui. Un fragile rayon du soleil naissant pénétrait dans la cave, un peu en arrière de Varfolomeï. Il jeta un coup d’œil par-dessus son épaule et resserra légèrement la mâchoire, presque imperceptiblement.
    — Et tu sembles avoir peur d’autre chose, dis-je en faisant un pas dans sa direction.
    Il ne pouvait pas s’écarter de moi, de crainte de pénétrer dans la lumière du soleil. Il avait peu de raisons de reculer : je ne représentais sans doute pas une menace pour lui. Mais l’armée dont la retraite est coupée craint toujours davantage son agresseur.
    — Ce n’est rien en comparaison de ce que vous avez à craindre.
    Il n’y avait pas de bravade dans sa voix. Il le croyait et il avait raison. Je pouvais sentir le sang battre dans mon cou tandis que mon cœur tentait de me préparer à ce qui allait venir. J’avançai d’un pas. Varfolomeï pouvait attaquer, mais il ne pouvait pas reculer. Je l’avais privé de tout choix, et le choix est une puissante arme de guerre.
    Pris au piège, il lança son attaque et se jeta sur moi de toutes ses forces. Je basculai en arrière mais, ce faisant, je levai la main, présentant à sa poitrine l’éclat de bois acéré et pointu dont je m’étais emparé un peu plus tôt.
    Je tombai violemment, me cognant l’arrière de la tête contre le sol avec assez de force pour que je craigne de perdre conscience, mais tout du long je gardai le pieu de bois pointé vers lui. Il s’abattit sur moi comme un chien sauvage, ses yeux enflammés par la haine et la soif. Je vis sa bouche grande ouverte, ses canines semblables à des crocs se précipiter vers ma gorge, prêtes à l’arracher comme j’avais vu Matfeï

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