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Duel de dames

Duel de dames

Titel: Duel de dames Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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coupés en quartiers qui furent suspendus aux portes de
Paris. Cela ne découragea pas les imposteurs de torturer le pauvre dément. La
Cour et les médecins ne savaient ni à quels saints ni à quels charlatans se
vouer.
    Alors que l’on se désespérait, vers la mi-décembre
de l’an 1393, la santé du roi s’améliora, il se reconnut et réclama la reine. Elle
s’y rendit en tremblant, faisant promettre aux valets de lui porter secours en
cas de violence. Charles accueillit son épouse avec une sorte de frénésie qui l’inquiéta,
il n’était pas vraiment remis. Pourtant il la reconnaissait fort bien, et il
chassa ses serviteurs en disant qu’il voulait sa femme en sa puissance
sur-le-champ. Isabelle se soumit à son devoir, emplie de dégoût. Charles
empestait, et il se vautra sur elle comme un affamé. Ce fut grand supplice
quand il la prit, elle était sèche et crispée, elle se sentait violée à nouveau,
comme au soir de ses noces. Après l’avoir forniquée en grognant, il s’endormit
d’un coup sur elle, l’étouffant malgré sa maigreur. Elle se dégagea au bord de
la nausée. Cet homme sale et ronflant n’était pas son époux, elle l’avait en
horreur. Elle ne voulait qu’une chose, se baigner, se brosser tout le corps, se
débarrasser de l’ignominie de cet accouplement grossier.
    Elle appela, afin de se faire immédiatement
ramener en son hôtel à Paris, et houspilla les serviteurs :
    — Comment osez-vous le laisser dans une telle
saleté ?
    — Hélas, dit l’un, à moins de lui faire
violence, il refuse le bain, il dit qu’il va fondre.
    — Alors faites-lui violence, et qu’il fonde !
hurla-t-elle aux valets médusés. Je ne veux plus jamais voir le roi dans cet
état, ou je vous fais tous pendre !
    Elle ne le revit plus dans cet état car, à la Noël,
Charles était redevenu lui-même, affable, tendre, et dans ses atours royaux. Il
reprit les affaires du royaume là où il les avait laissées.
    Ils firent ensemble, au début de 1394, le
pèlerinage au Mont-Saint-Michel dont elle avait fait le vœu. À leur retour, en
avril, elle déclara une nouvelle grossesse. Ce qui la consola quelque peu de
son grand dépit, car Valentine était enceinte depuis janvier.
    La reine gardait rancune à son beau-frère, comme s’il
l’avait trahie. Et il gardait tant ses distances avec elle, froid et poli, qu’elle
ne pouvait plus l’endurer. Il n’eut pas une parole ni un geste de compassion
quand Perldemay fut tuée par la ruade d’une mule acariâtre. La turbulente
petite chienne trouvait plaisant de mordre les paturons de Roussette, lorsque
celle-ci était entre les ridelles, à tirer la charrette du service de la voirie
de l’Hôtel. Les mules ont grande mémoire et rancune, disait-on. Ce jour fatal, Roussette
était libre de ses entraves quand Perldemay eut l’imprudence de trottiner à
portée de ses sabots. La petite chienne fut propulsée dans les airs et ne s’en
releva pas, les reins brisés. Isabelle en fut tant affligée que les gens des
cours basses décidèrent d’une bastonnade à mort pour châtier Roussette de son
crime. La reine fit savoir qu’elle s’y opposait et donna l’ordre que la mule
fût mise en sécurité dans ses propres écuries, sans qu’on lui fit aucun mal. Et,
comme les larmes n’arrivent jamais seules, Autan mourut de vieillesse, à moins
que ce ne fût du chagrin d’avoir perdu sa compagne de chasse.
    — À mon prochain séjour en Bavière, ma
princesse, je te rapporterai une autre Perldemay, lui dit son frère pour la
consoler. Et Autan est le géniteur d’une lignée de vaillants éperviers.
    — Il n’y en a point d’autres, gentil frère. Et
ne veux plus pleurer ce qui m’attache si fort.
    *
    Par contre, elle se réjouit sans repentir, vers la
fin de septembre, lorsque la nouvelle arriva à Paris : Clément VII
était mort, le 16 septembre 1394, à Avignon. Ce mauvais pape qui l’avait
privée du Saint Prépuce, et d’un fils. Il avait reçu de l’Université la
sommation de réunir un concile, accompagnée du mémoire virulent qui avait été
lu devant le roi. Après en avoir pris connaissance, il avait eu le temps de
déclarer : « C’est mauvais, c’est venimeux ! » et il était
tombé d’un coup de sang. C’était l’opportunité de mettre fin au schisme. Charles
envoya aussitôt deux missives successives, demandant aux cardinaux avignonnais
de surseoir au conclave afin qu’il eût le temps d’en

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