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Elora

Elora

Titel: Elora Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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certitude.
    Seule la mort de Jacques de Sassenage et d’Hélène de Grolée pourrait lui rendre la paix.
    *
    Au château de Bressieux, son fief, Aymar de Grolée contemplait l’élégante signature du prince Djem au bas de la lettre. Assise confortablement dans un faudesteuil, près de l’âtre qui dispensait une tiédeur bienvenue, Hélène gardait le silence, les mains croisées, le regard fixé sur cette chevelure blanche qui cernait le visage de son époux. Malgré ses cinquante-sept ans, il avait belle allure et les yeux gris qu’il leva enfin sur elle n’avaient rien perdu de leur bonté.
    — Veux-tu le rejoindre ?
    Hélène lui sourit avec tendresse, le cœur bondissant dans la poitrine.
    — En avez-vous jamais douté ?
    Aymar de Grolée replia la missive, la lui rendit et, tandis qu’Hélène la remisait dans son corsage, s’abandonna contre le dossier, les doigts croisés sur un embonpoint marqué. Le temps où il guerroyait, svelte et alerte, auprès de son ami Jacques de Sassenage et du feu roi Louis XI était bien loin désormais. Pourtant, Aymar n’avait aucun regret. À l’automne de sa vie, il avait enfin la chance de vivre un amour ardent avec Jeanne de Commiers, la mère d’Hélène, qu’il avait attendue tout au long de ses jeunes années. Un amour partagé dans la discrétion d’un castel voisin et dont Hélène savait le secret. Aussi compliquée que soit leur situation, elle le rendait profondément heureux, pour la première fois de son existence.
    — À dire vrai, Hélène, rien ne m’a échappé des négociations qui sont en cours depuis quelques mois à la cour de France.
    Elle sursauta.
    — Pourquoi ne m’avoir rien dit ?
    Aymar de Grolée laissa échapper un geste de lassitude.
    — Il y eut tant d’espoir avorté ces dix dernières années que ton père et moi sommes convenus de garder le silence jusqu’à ce que Djem soit véritablement libéré.
    Des larmes vinrent piquer les yeux d’Hélène. Au fil du temps, elle avait appris à chérir Aymar. Non comme l’époux qu’il était devenu, encore que leur mariage n’ait jamais été consommé, mais comme un second père. N’était-il pas l’amant de sa mère ?
    Une question pourtant la taraudait.
    — Est-ce vous qui avez intercepté les précédents messagers ?
    Le front d’Aymar de Grolée se plissa de contrariété.
    — Non. Et si j’avais su que le prince t’écrivait, je me serais inquiété que tu ne m’en parles point. À dire vrai, cette découverte me déplaît. Elora a-t-elle ressenti quelque chose ?
    Tous deux étaient conscients des pouvoirs hors du commun de la petiote, bien qu’ils n’en mesurassent pas l’étendue.
    — Rien qu’elle eût envie de me confier.
    Aymar laissa son œil courir vers la croisée.
    — Elle grandit, Hélène, en beauté, en intuition. Tu le constates comme moi. Elle paraît cinq années de plus que son âge, au point que déjà des damoiseaux de nos relations songent à la marier. Sans parler de ses dons. Ils sont supérieurs à ceux que possédait sa mère. Et je me dis souvent qu’elle sait bien plus de choses qu’elle ne veut en montrer.
    — À quoi pensez-vous ?
    — À son père, Mathieu le Borgne.
    Hélène frissonna.
    — Il n’est jamais venu la reprendre et nous ne savons plus rien de lui.
    Aymar se pencha pour lui saisir les mains.
    — Inutile de nous voiler la face, ma mie. Même s’il n’avait rien à lui offrir après le drame, je ne peux pas croire qu’il l’ait abandonnée.
    Elle blêmit.
    — Que voulez-vous dire ?
    — En dehors de nous, il est sans doute le seul à t’en vouloir assez de ce qui est arrivé pour abattre les messagers.
    Le repoussant presque brutalement, Hélène bondit de son siège. Brûlant soudain de fébrilité, elle se mit à arpenter la pièce en se tordant les mains.
    — Vous croyez donc qu’il nous espionne ? Qu’Elora l’a rencontré ?
    Aymar se leva à son tour. En deux enjambées, il l’emprisonna entre ses bras épais, la forçant à darder sur lui ses grands yeux affolés.
    — Je ne veux pas la perdre, Aymar.
    — Calme-toi. Je doute qu’il veuille la priver de nos bienfaits. Mais je crois qu’il serait prudent de l’emmener avec nous à Rome.
    De surprise, le cœur d’Hélène manqua s’arrêter.
    — Mais…
    Aymar lui embrassa le front.
    — Rien ne s’oppose plus à ce que nous partions dès demain. J’ai vu ton père à Grenoble. Dans la dernière lettre qu’il

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