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En ce sang versé

En ce sang versé

Titel: En ce sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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le sentiment que les blasphèmes vous distraient, Hardouin ? demanda Tisans, un peu pincé.
    — Uniquement les menus blasphèmes. D’autant que, selon moi, on ne blasphème qu’envers Dieu. Pas Ses représentants bien de ce monde 3 . Mauvais esprit que le mien, je vous le concède : j’imagine la scène, ce hobereau manquant s’affaler d’ivrognerie en pleine église, vidant sa vessie dans son caleçon et bataillant contre un pauvre prêtre affolé qu’il prend pour un malandrin.
    — J’avoue que la drôlerie de la situation m’échappe, bougonna Arnaud de Tisans.
    — Eh quoi ? L’église se paiera de beaux cierges avec son aumône de repentance, sans compter celle destinée aux Clairets. Il a payé sa faute.
    — Tout se rembourserait-il ? eut le peu d’adresse de contrer le seigneur bailli.
    Le regard gris amusé d’Hardouin l’épingla. Tisans se souvint de sa fâcheuse remarque en l’auberge de la Hase Guindée et se le tint pour dit. Un peu gêné, il biaisa :
    — Et le dernier aumôneur, qu’en savons-nous ?
    — Peccadille ! Une vieille femme du nom de Sylvine Brochet, une paysanne de faibles biens. Elle aurait égorgé une oie durant le Carême.
    — Et ?
    — Lorsqu’on égorge une oie, c’est en général pour la manger ! Elle a donc été accusée de rupture de maigre, bien que protestant de son innocence. Selon elle, le méchant animal piquait ses œufs, bref, une pondeuse dénaturée. Elle a juré ne pas l’avoir mangée. Nul n’y a cru, à juste titre. Petite amende étant entendu le maigre argent qu’elle possède.
    — Je doute que nous trouvions chez elle des informations d’intérêt.
    — De juste, seigneur bailli. Je mise bien davantage sur le seigneur Louis.
    — Hum…

    Quelques toises plus loin, ils parvinrent en haut du chemin qui menait au manoir du Plessis. La nervosité avec laquelle Tisans talonna sa monture alerta le bourreau.
    — Seigneur… rien ne nous dit que messire Louis d’Ayon ait à voir avec la malemort d’Henriette.
    Tisans lui jeta un regard, fronçant des sourcils et marmonnant :
    — Ayon, dites-vous ? Ayon… pourquoi ce nom m’évoque-t-il quelque chose ? Pas vraiment, d’ailleurs. Bah, tous les noms s’emmêlent dans mon esprit. Tant de gens, tant de visages, quel embrouillement.
    Le manoir 4 apparut au détour du chemin. De piètre allure, il évoquait davantage une ferme mal tenue qu’une demeure seigneuriale avec sa maçonnerie en piteux état, un versant de son toit de tuiles menaçant de s’effondrer, l’une de ses gargouilles piquant du mufle vers le sol, sa cour d’honneur pavée disparaissant sous des herbes folles et des broussailles. Quelques poules s’affolèrent à leur approche, filant en tous sens. Ils démontèrent, perplexes. Tisans cria :
    — Holà, au service !
    En vain. Ils patientèrent quelques instants, tendant l’oreille.
    — Tudieu, y a-t-il âme qui vive, céans ? s’époumona le sous-bailli, son haleine filant en buée dans le froid glacial de cette mi-journée.
    Apercevant le battant entrouvert d’une grange ou d’une écurie située dans une dépendance délabrée qui s’élevait à leur droite, Hardouin cadet-Venelle s’approcha. Une forte odeur de fumier et d’urine le renseigna. Il pénétra, clignant des yeux dans la pénombre. Un cheval de Perche gris pommelé mâchait tristement son foin, enfoncé à hauteur de paturons dans une litière d’excréments.
    L’avertissant de son approche par de petits claquements amicaux de langue, il flatta la croupe de l’animal, placide à l’instar des chevaux dits à « sang-froid » de sa sorte. Étonné, il ôta son gant et caressa le flanc puissant de l’animal.
    — Mon tout beau, depuis combien de temps n’as-tu point vu le bouchon 5  ?
    L’exécuteur des hautes œuvres rejoignit ensuite le sous-bailli, annonçant d’une voix sourde :
    — Je crois bien que nous tenons notre escorte discrète de tout à l’heure. En tout cas, le cheval est couvert d’une pellicule de givre. Sa sueur d’effort.
    Tisans fit mine de foncer vers la porte principale qui menait à l’intérieur du manoir mais M. Justice de Mortagne le retint par le pan de son mantel, précisant :
    — Cavalier suiveur. Pas assassin, jusqu’à plus ample connaissance !
    La précision calma messire de Tisans qui grogna :
    — Mais pourquoi nous suivre s’il savait que nous nous rendions chez lui ?
    — Remarque judicieuse, approuva

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