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En Route

Titel: En Route Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Joris-Karl Huysmans
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Et le moine disparut et rentra, quelques minutes après, précédé du prieur.
    - Eh bien, dit celui-ci, vous allez donc vous replonger dans la bagarre !
    - Oh ! sans joie, mon père.
    - Je comprends cela. C'est si bon, n'est-ce pas, de ne plus rien entendre et de se taire ? Enfin, prenez courage, nous prierons pour vous.
    Et comme Durtal les remerciait, tous les deux, de leurs attentives bontés.
    - Mais c'est plaisir que d'accueillir un retraitant tel que vous, s'écria le père étienne ; rien ne vous rebute et vous êtes si exact que vous êtes debout avant l'heure ; vous m'avez rendu mon rôle de surveillant facile. Si tous étaient aussi peu exigeants et aussi souples !
    Et il avoua avoir hébergé des prêtres envoyés par leurs évêques en pénitence, des ecclésiastiques tarés dont les plaintes sur la nourriture, sur la chambre, sur les exigences matinales du réveil, ne tarissaient pas.
    - Si encore, fit le prieur, l'on pouvait espérer les ramener au bien, les renvoyer guéris dans leurs paroisses, mais non ; ils décampent encore plus révoltés qu'avant ; le diable ne les lâche pas, ceux-là !
    Sur ces entrefaites, un convers apporta des plats recouverts par des assiettes et les déposa sur la table.
    - Nous avons modifié l'heure de votre dîner, à cause du train, fit le père étienne.
    - Bon appétit, adieu, et que le Seigneur vous bénisse, dit le prieur.
    Il leva la main et enveloppa d'un grand signe de croix Durtal qui s'agenouilla, surpris par le ton subitement ému du moine. Mais le père Maximin se reprit aussitôt et il le salua, au moment où M. Bruno entrait.
    Le repas fut silencieux ; l'oblat était visiblement peiné du départ de ce compagnon qu'il aimait et Durtal considérait, le coeur gros, ce vieillard qui était si charitablement sorti de sa solitude pour lui prêter son aide.
    - Vous ne viendrez donc pas, un jour, à Paris, me voir ? lui dit-il.
    - Non, j'ai quitté la vie sans esprit de retour ; je suis mort au monde ; je ne veux plus revoir Paris, je ne veux plus revivre.
    Mais si Dieu me prête encore quelques années d'existence, j'espère vous retrouver ici, car ce n'est pas en vain que l'on a franchi le seuil de l'ascétère mystique, pour y vérifier, par une expérience sur soi-même, la réalité de ces perquisitions que Notre-Seigneur opère. Or, comme Dieu ne procède pas au hasard, il achèvera certainement, en vous triturant, son oeuvre. J'ose vous le recommander, tâchez de ne pas vous céder et essayez de mourir assez à vous-même pour ne point contrarier ses plans.
    - Je sais bien, fit Durtal, que tout s'est déplacé en moi, que je ne suis plus le même, mais ce qui m' épouvante, c'est d'être sûr maintenant que les travaux de l'école térésienne sont exacts… alors, alors… s'il faut passer par tous les rouleaux des laminoirs que saint Jean de la Croix décrit…
    Un bruit de voiture, dans la cour, l'interrompit. M. Bruno s'en fut à la fenêtre et s'informa :
    - Vos bagages sont descendus ?
    - Oui.
    Ils se regardèrent.
    - Ecoutez, je voudrais vraiment vous dire…
    - Non, non, ne me remerciez pas, s'écria l'oblat. Voyez-vous, je n'ai jamais si bien compris la misère de mon être ; ah ! Si j'avais été un autre homme, j'aurais pu, en priant mieux, vous aider plus !
    La porte s'ouvrit et le père étienne déclara :
    - Vous n'avez pas une minute à perdre, si vous ne voulez pas manquer le train.
    Ainsi bousculé par l'heure, Durtal n'eut que le temps d'embrasser son ami qui l'accompagna dans la cour. Sur une sorte de char à banc, un trappiste qui allongeait, sous un crâne chauve et des joues vergetées de fils roses, une grande barbe noire, l'attendait, assis.
    Durtal pressait, une dernière fois, la main de l'hôtelier et de l'oblat, quand le père abbé vint, à son tour, lui souhaiter un bon voyage et, au bout de la cour, Durtal aperçut deux yeux qui le fixaient, ceux du frère Anaclet qui, de loin, lui disait, un peu incliné, sans un geste, adieu.
    Jusqu'à ce pauvre homme dont le regard éloquent racontait une affection vraiment touchante, une pitié de saint pour l'étranger qu'il avait vu si tumultueux et si triste, dans l'abandon désolé des bois ?
    Certes, la rigidité de la règle interdisait toute effusion à ces moines, mais Durtal sentait bien qu'ils étaient allés pour lui jusqu'aux limites des concessions permises et son affliction fut affreuse lorsqu'il leur jeta, en partant, un dernier merci.
    Et la porte de la

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