Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
insouciance des animaux dont il ne mange même pas la viande ? Quand les hommes rouges tuent du gibier, c’est pour survivre, pour ne pas mourir de faim.
Satanta, chef des Kiowas
Mon peuple n’a jamais dirigé ses flèches ou tiré sur les Blancs le premier. Il y a eu des problèmes sur la Frontière entre vous et nous, et mes jeunes braves ont fait la danse de la guerre. Mais ce n’est pas nous qui avions déclenché cela. C’est vous qui avez envoyé le premier soldat, et nous le deuxième. Il y a deux ans, je me suis trouvé sur cette route en suivant les bisons parce que je vou lais que les joues de mes femmes et de mes enfants soient pleines et leurs corps bien au chaud. Mais les soldats nous ont tiré dessus, et depuis sans cesse résonne un bruit semblable à celui du tonnerre, et nous ne savons pas où fuir. Voilà ce qui s’est passé dans la vallée de la Canadian River. On ne nous a pas laissé le temps de pleurer une fois seuls. Les soldats vêtus de bleu et les Utes sont sortis de la nuit sombre et silencieuse et, en guise de feux de camp, ont fait flamber nos tipis. Au lieu de chasser le gibier, ils ont tué mes braves, et nos guerriers ont coupé leurs cheveux pour nos morts. Voilà ce qui s’est passé au Texas. Ils ont introduit le chagrin dans nos villages, et nous avons chargé tels des bisons mâles quand leurs femelles sont attaquées. Nous les avons trouvés, et tués. Leurs scalps décorent nos tipis. Les Comanches ne sont pas faibles ou aveugles comme des tout petits chiots. Les Comanches sont forts comme des chevaux, et leurs yeux perçants. Nous avons suivi le chemin qu’ils avaient pris. Alors, les femmes blanches ont pleuré et les nôtres ont ri.
Mais il y a des choses que vous m’avez dites et que je n’aime pas. Elles ne sont pas douces comme le sucre, elles ont le goût amer des courges. Vous m’avez dit que vous vouliez nous mettre sur des réserves, nous construire des maisons et des tipis-médecine. Je n’en veux pas. Je suis né dans la prairie, là où le vent souffle sans obstacle, où rien n’arrête la lumière du soleil. Là où je suis né, il n’y avait aucune clôture et chaque chose respirait librement. C’est dans cet endroit que je veux mourir, pas entre quatre murs. Je connais le moindre ruisseau, le moindre bosquet entre le Rio Grande et l’Arkansas. Depuis toujours je chasse et vis dans ce pays. J’ai vécu comme mes pères avant moi et comme eux, j’ai vécu heureux.
Quand je suis allé à Washington, le Grand Père Blanc m’a dit que le territoire comanche tout entier nous appartenait et que personne n’avait le droit de nous empêcher d’y vivre. Alors, pourquoi voulez-vous que nous quittions les rivières, le soleil, le vent, pour vivre dans des maisons ? Ne nous demandez pas d’abandonner le bison pour le mouton. Nos jeunes hommes ont entendu parler de cela, et en ont conçu tristesse et colère. Ne nous en parlez plus (…).
Si les Texans n’étaient pas entrés sur notre territoire, nous aurions pu vivre en paix. Mais le lieu où, dites-vous, nous devons à présent vivre, est trop petit. Les Texans se sont emparés des terres où l’herbe est la plus dense et le bois le meilleur. Si nous les avions conservées, nous aurions peut-être fait ce que vous nous demandez. Mais il est trop tard. Le pays que nous aimons appartient à l’homme blanc, et tout ce que nous désirons, c’est parcourir la prairie jusqu’à notre mort.
Parra-Wa-Samen (Ten Bears),
de la tribu des Comanches Yamparikas
Après la bataille de la Washita en décembre 1868, le général Sheridan ordonna aux Cheyennes, aux Arapahos, aux Kiowas et aux Comanches de faire leur reddition à Fort Cobb, faute de quoi ils seraient voués à disparaître, traqués et tués par ses Tuniques Bleues (voir le chapitre 7). Little Robe, devenu chef des Cheyennes à la mort de Black Kettle, obtempéra, ainsi que Yellow Bear, de la tribu des Arapahos. Quelques chefs comanches – et notamment Tosawi, auquel Sheridan avait dit que le seul bon Indien était un Indien mort – se rendirent également. Libres, fiers, les Kiowas, eux, ne firent preuve d’aucune volonté de coopérer. Sheridan chargea donc Derrière-Dur Custer de les forcer à capituler ou de les anéantir.
Les Kiowas estimaient n’avoir aucune raison d’aller à Fort Cobb pour remettre leurs armes et vivre de l’aumône des Blancs. En effet, le traité de Medicine Lodge, signé par leurs chefs en 1867, leur
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