Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
chargé les villages sioux.
Afin d’éviter une montée de la violence dans les réserves, le Grand Père envoya une nouvelle commission en septembre afin d’amadouer les chefs, si besoin par la menace, et s’assurer qu’ils signeraient les documents par lesquels les richesses incommensurables des Black Hills deviendraient propriété des États-Unis. Parmi les membres de la commission figuraient de grands experts en matière d’accaparement des terres indiennes, en particulier Newton Edmunds, Monseigneur Henry Whipple, évêque, et le révérend Samuel D. Hinman. Monseigneur Whipple ouvrit les discussions à l’agence de Red Cloud par une prière. Puis le président George Manypenny donna lecture des conditions fixées par le Congrès. Celles-ci étant exprimées dans le langage évasif des législateurs, Monseigneur Whipple tenta de les reprendre en des termes qui pourraient être traduits par les interprètes.
« Mon cœur est depuis longtemps plein de chaleur envers l’homme rouge. Nous sommes venus vous apporter un message de la part de votre Grand Père, et il y a certaines choses que nous vous avons livrées exactement telles qu’il les a prononcées. Nous ne pouvons les modifier ne serait-ce que d’une virgule. (…) Lorsque le Grand Conseil a décidé du crédit budgétaire pour continuer à subvenir à vos besoins cette année, certaines conditions ont été formulées, au nombre de trois, et si elles ne sont pas remplies, plus aucun crédit ne sera alloué par le Congrès. Ces trois conditions, les voici : tout d’abord, que vous cédiez la région des Black Hills et celle qui se trouve au nord ; deuxièmement, que vous alliez chercher vos rations dans une agence près du Missouri ; troisièmement, que le Grand Père puisse tracer trois routes partant du Missouri et traversant la réserve jusqu’à ce nouveau territoire où se situent les Black Hills. (…) Le Grand Père a dit que son cœur était plein de tendresse pour ses enfants peaux-rouges, et c’est pourquoi il a constitué cette commission composée d’amis des Indiens afin qu’ils trouvent le moyen de sauver vos nations, et que celles-ci, au lieu de diminuer encore et encore jusqu’à ce que leur dernier représentant contemple sa propre tombe, deviennent, ainsi que le peuple blanc, un grand peuple puissant. »
Ceux à qui ce discours de Monseigneur Whipple s’adressait trouvèrent qu’il s’agissait là d’une manière bien étrange de sauver les nations indiennes – s’emparer de leurs Black Hills et de leurs territoires de chasse et les exiler tout là-bas dans la vallée du Missouri. La plupart des chefs, résignés, savaient qu’il était trop tard pour sauver Paha Sapa. Par contre, ils protestèrent vivement contre l’idée de déplacer leurs réserves jusqu’au Missouri. « Si les miens s’installent là-bas, déclara Red Cloud, ils mourront tous. Il y a beaucoup de mauvaises gens là-bas, et du mauvais whisky ; c’est pourquoi je ne veux pas y aller. »
No Heart affirma que les Blancs avaient déjà saccagé la région du Missouri, si bien que les Indiens ne pourraient pas y vivre. « Quand on voyage le long du fleuve, il n’y a pas une forêt, dit-il. Vous avez certainement vu les endroits où autrefois il y en avait de nombreuses. Le peuple du Grand Père les a détruites. »
« Cela fait six ans seulement que nous sommes venus vivre au bord de cette rivière, déclara Red Dog, et rien de ce qui nous avait été promis n’a été tenu. » Depuis que le Grand Père s’était engagé à ce qu’ils ne soient plus déplacés, se souvint un autre chef, ils avaient été contraints de partir cinq fois. « Vous devriez mettre les Indiens sur roulettes, poursuivit ce même chef sur un ton sardonique. Ainsi, vous pourriez les rouler où bon vous semble. »
Spotted Tail accusa le gouvernement et les membres de la commission de trahir les Indiens, de rompre leurs promesses et de mentir.
« Cette guerre n’est pas née ici sur notre sol ; elle a été provoquée par les enfants du Grand Père qui sont venus prendre notre terre sans nous la payer et qui y commettent toutes sortes de mauvaises actions. (…) Cette guerre a été provoquée par un vol – le vol de notre terre. » Quant à aller s’installer dans la vallée du Missouri, Spotted Tail s’y opposa farouchement, déclarant qu’il refuserait de signer l’acte de cession tant qu’il ne serait pas allé s’entretenir à
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