Excalibur
acceptaient les dons du
druide. Je priai près des remparts, suppliant Mithra de nous accorder une
grande victoire, puis j’essayai de dormir, mais le Mynydd Baddon résonnait du
murmure des voix et du bruit monotone de la pierre sur l’acier.
J’avais déjà
affûté ma lance et donné un nouveau tranchant à Hywelbane. Je ne laissais
jamais un domestique s’occuper de mes armes avant une bataille, mais le faisais
moi-même avec autant de fièvre que mes hommes. Une fois certain que mes lames
étaient aussi aiguisées que possible, je m’étendis près de la cabane de
Guenièvre. Je voulais dormir, mais ne pouvais bannir ma peur de me retrouver
bientôt dans un mur de boucliers. Je guettai des présages, craignant de voir un
hibou, et priai de nouveau. Je dus finir par m’endormir d’un sommeil agité,
hanté de cauchemars. Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas combattu
dans un mur de boucliers, sans parler de rompre celui de l’ennemi.
Je me
réveillai, frissonnant de froid. La rosée était abondante. Les hommes
grognaient et toussaient, pissaient et gémissaient. La colline puait car, bien
que nous ayons creusé des latrines, il n’y avait pas de ruisseau pour emporter
les ordures. « Des odeurs et des bruits d’hommes. » La voix de
Guenièvre, empreinte d’une ironie désabusée, monta de l’obscurité de sa cabane.
« Avez-vous
dormi, Dame ?
— Un peu. »
Elle rampa sous la branche basse qui lui servait de toit et de porte. » Il
fait froid.
— Nous
aurons chaud, très bientôt. »
Elle s’accroupit
près de moi, étroitement enveloppée dans sa cape. Ses cheveux étaient emmêlés
et ses yeux gonflés de sommeil. « À quoi penses-tu dans la bataille ?
— À
rester vivant, à tuer, à gagner.
— C’est
de l’hydromel ? demanda-t-elle en montrant la corne que j’avais à la main.
— De l’eau,
Dame. L’hydromel ralentit un homme au combat. »
Elle me prit l’eau
des mains, s’éclaboussa les yeux et but le reste. Elle était inquiète, mais je
savais que je ne pourrais jamais la persuader de rester sur la colline. « Et
Arthur, me demanda-t-elle, à quoi pense-t-il pendant une bataille ? »
Je souris. « À
la paix qui s’ensuivra, Dame. Il croit que chaque guerre sera la dernière.
— Pourtant
il n’y aura jamais de fin à la guerre.
— Probablement
jamais, mais dans cette bataille, restez près de moi, Dame. Très près.
— Oui,
Seigneur Derfel, dit-elle d’un ton moqueur, puis elle m’adressa un sourire éblouissant.
Et merci, Derfel. »
Nous étions en
armures lorsque le soleil s’enflamma derrière les collines pour teinter de
cramoisi des bribes de nuages et projeter une ombre profonde sur la vallée des
Saxons. Cette ombre s’éclaircit et se retira au fur et à mesure que le soleil montait.
De minces volutes de brume s’élevaient de la rivière, épaississant la fumée des
feux de camp entre lesquels l’ennemi se déplaçait avec une énergie
inhabituelle. « Ils trament quelque chose, me dit Cuneglas.
— Peut-être
savent-ils que nous allons attaquer ?
— Ce qui
nous compliquerait la vie », répliqua-t-il d’un air mécontent, mais si les
Saxons avaient eu vent de nos plans, ils ne montraient aucun signe évident de
préparatifs. Nul mur de boucliers ne faisait face au Mynydd Baddon, et nulle
troupe ne s’était mise en marche vers la route de Glevum. Au contraire, tandis
que le soleil devenait assez chaud pour dissiper la brume sur les bords de la
rivière, il apparut qu’ils avaient enfin décidé d’abandonner les lieux et se
préparaient à partir, bien qu’il fût impossible de dire s’ils prévoyaient de
marcher vers l’ouest, le nord ou le sud, car leur première tâche fut de
rassembler leurs chariots, leurs chevaux de bât, leurs bestiaux et leur
volaille. Vu d’en haut, leur camp ressemblait à une fourmilière qu’un coup de
pied a plongée dans le chaos, mais peu à peu un certain ordre émergea. Les
hommes d’Aelle amassaient leurs bagages à la porte nord d’Aquae Sulis tandis
que ceux de Cerdic se rangeaient près de leur campement, au coude de la
rivière. Une poignée de cabanes furent brûlées et sans doute prévoyaient-ils de
mettre le feu aux deux camps avant de partir. Une troupe de cavaliers
légèrement armée s’en alla la première, empruntant la route de Glevum, en
direction de l’ouest. « Dommage pour eux », dit tranquillement
Cuneglas. Les éclaireurs
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