Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Fatima

Fatima

Titel: Fatima Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
Vom Netzwerk:
foule formait devant eux.

Le « frère » Zayd
    À mi-chemin de la maison d’Abu Talib, la tante Kawla, prévenue du drame, arriva en courant, des sanglots plein la gorge. Il fut décidé que Fatima, afin de ne pas aggraver l’état de sa cheville, rentrerait chez elle avec le soutien de Zayd. Les autres escortèrent Abu Talib. Ses gémissements, à chaque pas de la mule, devenaient à la fois plus sourds et plus plaintifs.
    Fatima put enfin s’allonger sur sa couche. Tant d’événements en une seule matinée ! Elle revoyait les visages et la colère de la foule, le regard d’Abd’Mrah, Ali en train de crier et elle poussant son hurlement.
    Elle ne supportait plus les coups d’oeil des servantes qui allaient et venaient sans raison, lui proposant mille choses : de changer ses bandages, de lui apporter de la nourriture… Tout ces va-et-vient inutiles accentuaient son impuissance.
    Et encore et encore lui revenait la pensée d’Abd’Mrah.
    Dans ce regard qu’il lui avait adressé, debout devant le corps de l’étranger, elle avait cru deviner la fierté de celui qui a vaincu et qui a tenu sa promesse.
    Mais, maintenant, à y repenser sans cesse, il lui semblait que les prunelles ardentes d’Abd’Mrah lui murmuraient un tout autre secret. « Cet homme, disaient-elles, cet homme vil, je l’ai tué pour que ton père vive, mais pour toi aussi. Pour toi… »
    Un instant, Fatima se laissa emporter par son imagination. Puis, soudain, elle eut conscience de sa folie. Elle n’était pas la seule à avoir pu admirer le visage d’Abd’Mrah. Yâkût aussi devait en conserver un souvenir bien net. Et jamais ce démon ne laisserait sans réplique l’humiliation que le Bédouin venait de lui infliger devant ses maîtres et tous les marchands de Mekka. Il voudrait se venger, et ses méthodes, on ne les connaissait que trop.
    Ô Puissant Dieu de son père ! Abd’Mrah, avec tout son orgueil, pressentait-il la menace qui pesait désormais sur lui et sur les siens ?
    Aux abords de Mekka, il n’aurait aucune place pour se cacher. Pas même parmi les siens. Yâkût avait partout des espions et des traîtres. S’il lui venait le désir de semer la terreur parmi les Bédouins, Abu Lahab et Abu Sofyan feraient en sorte que nul ne s’y oppose. Pas même au grand conseil de la mâla. Depuis toujours, les Bédouins étaient considérés comme des hommes de peu. Des pauvres que les déserts avalaient et recrachaient avec la même indifférence que naissaient et mouraient les criquets et les rats des sables.
    Il ne fallut pas longtemps à Fatima pour se décider. Oui, elle devait retourner jusqu’au haut de Mekka. Retrouver Abd’Mrah. Le mettre en garde. Qui sait, peut-être la meilleure des cachettes serait-elle ici, dans la cour de son père ? Là, Yâkût ne pourrait rien contre lui. Et si elle ne trouvait pas Abd’Mrah, la vieille Haffâ lui transmettrait son message…
    Malgré les protestations des servantes, elle sortit de sa chambre et s’empara du premier bâton venu en guise de canne. Sautillant dans la cour pour rejoindre l’écurie, elle s’immobilisa à mi-chemin. Où courait-elle comme une folle ? La mule blanche n’était plus là. Elle avait porté Abu Talib jusque chez lui.
    Un bref instant, comme étourdie, elle hésita, songea à emprunter l’une des bêtes de la maison. Un âne, s’il le fallait. Puis, d’un coup, ce fut comme si cent noeuds dans son corps se défaisaient en même temps, l’abandonnant sans souffle ni force. Ce qu’elle s’apprêtait à faire lui apparut inutile, stupide.
    Abd’Mrah était plus sage qu’elle, il l’avait déjà prouvé. Certainement, lui et les siens avaient pensé aux conséquences de leurs actes. Remonter les ruelles de Mekka au vu et au su de tous pour se rendre chez les Bédouins ne ferait qu’aggraver les choses. Yâkût l’apprendrait avant même qu’elle ne parvienne aux premières tentes des puits d’al Bayâdiyya.
    Épuisée, tremblante, sautillant maladroitement, elle alla se placer sous le tamaris. Assise contre le vieux tronc qui, tant et tant de fois, avait soutenu Khadija lorsqu’elle devait juger et décider, où elle avait, disait-on, reçu pour époux son père Muhammad, Fatima ne put retenir ses larmes. Pour la première fois depuis qu’elle avait fait la promesse d’être aussi forte que sa mère auprès de Muhammad, elle mesurait ce qu’il avait fallu à Khadija de courage, de force et d’intelligence pour tenir

Weitere Kostenlose Bücher