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Fatima

Fatima

Titel: Fatima Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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Ils ne sont que pierre et bois. Ils ne sont que le ricanement des démons dans le coeur des hommes. Il n’en est qu’Un qui décidera de l’enfer ou des cieux cléments. Il n’est de dieu qu’Allah le Grand et Miséricordieux. »
    Les joues ruisselantes, écarlates, Kawla poussa légèrement Ashemou pour reprendre la parole :
    — Muhammad ! s’écria-t-elle comme s’il pouvait l’entendre. Mon neveu bien-aimé… Tu es devenu si intransigeant, si intransigeant ! Toi qui étais miel et sucre du temps de Khadija ! Oh, comme ton Rabb t’a durci le coeur !
    Il y eut un silence. Zayd baissa la tête. Ashemou se voûta. Fatima courba la nuque. Jamais ils n’auraient osé prononcer ces mots que la douleur et la colère tiraient de la tante Kawla. Pourtant, Fatima elle-même ne pouvait s’empêcher de les trouver terriblement justes.
    La gorge nouée par l’émotion, Ashemou reprit son récit.
    Elle raconta comment le vieil Abu Talib, tout mourant qu’il était, s’était presque redressé sur sa couche pour crier aussi fort qu’il le pouvait : « Oh, Muhammad, tu veux l’enfer pour moi ?»
    Puis, à demi étouffé par ses gémissements et ses reproches, il avait murmuré : « Muhammad ! Muhammad ! Moi qui ai fait de toi mon fils aîné ! Moi qui t’ai envoyé dans la maisonnée de la grande saïda bint Khowaylid !… Moi qui t’ai défendu devant tous et qui le ferai encore jusque dans l’autre monde… Ne me laisse pas seul dans la nuit des morts… »
    Agenouillé près de sa couche, Muhammad l’écoutait, les yeux clos. Sans répondre. Jusqu’à ce que la main tordue d’Abu Talib, qui ne semblait plus être faite que d’os, agrippe la sienne.
    « Puisque tu m’interdis la clémence d’Hobal et d’Al’lat, prie ton Rabb pour moi. Demande-lui de me faire une place dans son royaume !
    — Oh oncle, oncle ! Oncle Abu Talib ! Mon coeur saigne. Le passé l’écrase des souvenirs et des dettes qui portent ton nom et ta bonté. Mais de Loi, il n’en est qu’Une. De Pouvoir, il n’en est qu’Un. Celui d’Allah Clément et Miséricordieux. Et le Tout-Puissant Seigneur dit : “C’est celui qui est en pleine vie qui vient vers Moi par le droit chemin. L’égaré ne Me trouvera pas au jour de sa peur, quand le jugement s’approche si près de son visage qu’il en sent le souffle mauvais.” Ah, mon oncle, pourquoi t’es-tu si longtemps refusé à quitter tes faux dieux ?»
    À nouveau, la tante Kawla, hors d’elle, étouffait sous les sanglots.
    — Oui, c’est tout ce qu’il lui a répondu ! Et maintenant ? Maintenant mon vieux frère va mourir. Il va mourir et pourrir en enfer ! Oh, Fatima, pourquoi ton père s’obstine-t-il tant ?
    Comme Fatima aurait voulu savoir répondre à cette question ! Mais elle ne pouvait que baisser les yeux et serrer les mâchoires afin que les larmes de Kawla ne deviennent pas les siennes.
    Finalement, Ashemou dut conduire la tante sur des coussins et la bercer de caresses comme une enfant pour qu’elle retrouve un peu de calme. Ce fut Zayd, silencieux depuis un long moment, qui acheva de rapporter cette terrible scène à Fatima.
    Au côté de Muhammad, Ali avait exhorté son père à prononcer bien haut les paroles de reniement des faux dieux. La dispute avait épuisé Abu Talib. Il ne possédait même plus la force de parler. Il s’était contenté de secouer le front. Et cela avait suffi à chacun pour comprendre qu’il s’y refusait.
    — Je suis arrivé dans sa cour à ce moment-là, expliqua doucement Zayd. Avec les emplâtres et le breuvage que venait de me donner la vieille Haffâ…
    — Ah, tu l’as vue ! le coupa Fatima, incapable d’attendre plus longtemps des nouvelles d’Abd’Mrah. Et lui, tu l’as vu aussi ?
    Zayd n’avait pas besoin qu’elle prononce le nom du Bédouin pour comprendre… Il hocha la tête, l’amertume et la tristesse bien visibles sur ses traits fatigués. Mais Fatima était trop impatiente pour y accorder de l’attention.
    — Non, je ne l’ai pas vu. Seulement la vieille. Elle te fait dire qu’il n’est nul besoin de t’inquiéter pour lui. Il sait ce que vaut Yâkût. Il se tiendra hors de sa portée. Il est parti avec d’autres pousser un troupeau de petit bétail dans la montagne près de Mina. Là-bas, les mercenaires d’Abu Sofyan auraient bien trop peur de se perdre.
    Zayd observa le soulagement sur le visage de Fatima. Puis, d’une voix plus soucieuse, il

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