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Fatima

Fatima

Titel: Fatima Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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qu’un Bédouin qui attirait ton intérêt…
    Fatima lui coupa la parole d’un petit ricanement sarcastique.
    — Je sais ce que tu as pensé. Cela se lisait sur ton visage. Tu nous as méprisés. Abd’Mrah, parce qu’il était bédouin. Moi, parce que je suis une fille. Un Bédouin et une fille peuvent-ils avoir le moindre discernement ?
    Ali se tut, mal à l’aise. Il connaissait assez Fatima pour savoir que rien ne l’empêcherait de dire sa vérité. Ce qu’elle fit :
    — Notre père va au-devant des Bédouins. Il n’y a pas dans Mekka plus fidèle soutien qu’eux. Mais pour toi, Ali ibn Talib, ce sont des hommes de peu. Fils de puissant, Ali, mon frère, tu l’es avant d’être fils des mots de notre père…
    — Non, non…
    — Si ! Sinon la jalousie ne t’aurait pas troué les yeux. Car jaloux d’Abd’Mrah, tu l’as été. J’ai entendu tes moqueries et tes sarcasmes. Et aussi ton silence devant son courage.
    Ali maintenant l’observait avec un air si crispé qu’il fut difficile à Fatima de savoir s’il allait céder à la colère ou à la honte. Comme il se taisait, ce fut elle qui capitula. Les larmes lui gonflèrent les paupières. Le ressentiment qui l’avait obsédée depuis l’annonce du terrible supplice d’Abd’Mrah jaillit de ses lèvres :
    — Abd’Mrah était dans mon coeur comme une étoile. Il y restera à jamais. J’ai cru que je commettais la plus grande des fautes en l’y accueillant. Mais mon père m’a dit : « Non, ce n’est pas une faute. » Alors pourquoi Allah le Clément et Miséricordieux n’a-t-Il pas laissé Abd’Mrah vaincre cette pourriture de Yâkût al Makhr ?
    Ali secoua la tête. Il avait repris de l’assurance. Il eut un regard de respect et de tendresse. Fatima crut qu’il allait lui saisir les mains. Il n’osa pas, se contenta de serrer les siennes contre sa poitrine.
    — Tes questions n’ont de réponse que dans la volonté du Créateur, dit-il tout bas. S’il le veut, un jour, Il te répondra. Moi, je peux avouer : oui, je me suis trompé. Je l’ai dit à la tante Kawla. Elle m’a rétorqué : « Ce n’est pas devant moi que tu dois reconnaître ton erreur. Adresse-toi à Fatima. Va voir si elle te pardonnera. Ce n’est pas certain. Son courroux est aussi profond que son chagrin. » Elle a raison. Je devine ta peine. Si tu ne veux pas me pardonner, je le comprendrai.
    La surprise figea Fatima. Sur son visage, Ali ne pouvait lire, encore et toujours, que colère et douleur. Elle finit par murmurer, comme en confidence :
    — Abd’Mrah avait la beauté de ceux qui ont été choisis par le Tout-Puissant.
    Il y eut un silence. Un long et apaisant silence. Ali allait se détourner et s’éloigner sans un mot de plus lorsque Fatima ajouta :
    — Zayd m’a dit que vous alliez vous rendre dans la cour de ma mère Khadija pour saluer le vieux Waraqà.
    — Et lui demander ses rouleaux pour l’étude, acquiesça Ali. C’est ce que veut notre père.
    — Vous risquez de faire de mauvaises rencontres.
    — Bilâl nous accompagnera.
    — Moi aussi.
    Ce n’était ni une offre ni une demande. C’était la brutalité habituelle des décisions de Fatima bint Muhammad.
    Ali sourit. Le sourire d’un garçon heureux.
    Fatima déclara qu’il valait mieux y aller en pleine journée, au vu et au su de tous. Al Arqam l’approuva, mais voulut leur adjoindre des serviteurs armés. Fatima s’y opposa :
    — Bilâl suffira. Voudrions-nous faire croire que nous avons peur de retourner chez nous, nous, les enfants du Messager ?
    Ali et Zayd la soutinrent :
    — Fatima a raison. Qui pourrait nous empêcher de visiter notre maître d’étude ? S’il nous faut subir des insultes, nous les subirons ! S’il nous faut nous battre, nous nous battrons !
    Muhammad, qui arrivait à ce moment, fit un geste vers Al Arqam :
    — Qu’ils aillent. Allah est avec eux.
    La discussion était close.
     
    Pour se rendre dans la demeure de Khadija bint Khowaylid, il leur fallait traverser le coeur de la cité, les ruelles les plus populeuses, où se tenaient les commerces et où s’agitaient les badauds. Dès qu’ils se mirent en marche, Fatima songea à Abdonaï, à la manière qu’il avait de mener une troupe. Armée du lourd bâton ferré, héritage du vieux Perse, elle tenta d’imiter sa façon de le brandir et de le balancer au bout de son unique bras. Ce fut comme si le fidèle serviteur se tenait à son côté.
    Ils

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