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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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sauver la vie, si vous n'avez pas de meilleure raison.
    Tout en parlant, en la tenant toujours fermement par le coude, il l'entraîna vers la rue Saint-Dominique. Heureusement, leur vie se déroulait dans quelques rues formant un quadrillage serré. Très vite, ils pénétrèrent dans la vieille maison alors que Gertrude, curieuse et un peu inquiète, vint de la cuisine voir ce qui se passait.
    —    C'est vous, Monsieur.
    —    Faites-nous du thé. Je m'occupe du feu de la cheminée.
    Alfred commença par aider Marie à quitter son manteau, puis il lui désigna un fauteuil près de la cheminée. Il s'occupa ensuite de faire du feu avec de gros morceaux de charbon et une feuille de papier journal. Avant que la domestique n'ait posé une théière et des tasses sur une table basse, aucun des deux ne prononça un mot.
    —    Gertrude, je ne veux pas être dérangé.
    Elle regarda le visage chiffonné et les joues barbouillées de larmes de la jeune femme, puis donna son assentiment d'un geste de la tête avant de retourner dans la cuisine. Alfred versa la boisson chaude dans les tasses, puis il déplaça un fauteuil afin de le mettre en parallèle de celui de Marie, très près. Leur visage serait à deux pieds l'un de l'autre, tout au plus.
    —    Vous êtes enceinte. Cela explique votre allure catastrophée des dernières semaines.
    Les sanglots secouèrent les épaules de la jeune femme. Dans un mélange de pleurs et de murmures, elle débuta difficilement son récit avec la première erreur d'addition, dans le grand livre de comptes, pour le terminer avec l'affrontement survenu moins d'une heure plus tôt.
    —    Il a dit que je ne peux pas être certaine qu'il est le père, conclut-elle
    De toute cette histoire, cela lui paraissait être la pire insulte de toutes : douter de sa virginité.
    —    Et vous l'avez traité de salaud... Je sais, j'ai entendu. Votre vocabulaire, pour qualifier son attitude, est assez limité. Je pourrais vous apprendre quelques mots plus imagés.
    Marie esquissa un sourire, avala un peu de thé, avant de poursuivre :
    —    Il m'offre un travail à la ganterie... après.
    —    Et avant ?
    —    Un accouchement discret. Cela, même mon frère le vicaire en est un chaud partisan. Vendredi dernier, je suis allée marcher devant la maison Béthanie. Je vais crever, là-dedans.
    De nouveau, des larmes coulèrent sur ses joues. Alfred tira son mouchoir de sa poche pour le lui donner, attendit qu'elle se mouche avant de déclarer :
    —    Si vous me laissez prendre les choses en main, je pense que vous pourrez éviter de vous retrouver chez ces bonnes religieuses. Vous sentez-vous la force de retourner au magasin ?
    —    Vous êtes fou... commença-t-elle, puis d'un ton désolé, elle poursuivit: je vous demande pardon. Je ne pourrai pas... et de toute façon, il m'a mise à la porte, tout à l'heure.
    —    Mais après une petite conversation avec moi, cela changera peut-être.
    Elle le regarda un moment de ses grands yeux sombres, puis opposa :
    —    Même si vous plaidez ma cause, cela ne changera rien. De toute façon, quand je serai comme cela...
    De la main, la jeune femme mima un gros ventre arrondi.
    —    Je peux toucher?
    Marie lui jeta un coup d'œil surpris, puis murmura :
    —    Oui, je suppose.
    Alfred se pencha un peu et tendit le bras droit afin de poser sa main bien à plat sur son ventre. La chaleur traversait le tissu. Cela ressemblait fort à une caresse, la première depuis bien longtemps.
    —    C'est tout petit, commenta l'homme. Vous... sentez quelque chose?
    —    Non, sauf au début des nausées le matin.
    Elle esquissa un sourire qui pouvait ressembler à de la fierté, pour la toute première fois.
    —    C'est bien trop tôt.
    Il retira sa main comme à regret, puis continua avec son ton ironique habituel :
    —    Le rôle d'un grand frère, c'est souvent d'empêcher un cadet de faire des bêtises. Bien sûr, pour la grosse bêtise, j'arrive un peu tard, mais j'ai une amie qui aurait dû se confier plus vite...
    Marie baissa les yeux en se mordant la lèvre inférieure, puis ajouta, rougissante :
    —    Si vous croyez que c'est facile, avec la honte...
    —    Cependant, je peux toujours l'empêcher de continuer de s'enfoncer dans cette merde. Je le verrai ce soir pour essayer de trouver la meilleure solution, dans les circonstances. Cela vous dirait de manger avec moi ce

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