Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
de la confession, non seulement le pénitent devait admettre ses fautes et les regretter, mais aussi désirer sincèrement se racheter. Cela signifiait bien sûr se retirer des endroits propices à la récidive.
    —Je risque de me faire refuser l'absolution, et même la communion, si le curé suspecte que je suis en état de péché mortel.
    Pareille éventualité ferait mourir cette jeune femme de honte. Thomas ne trouva rien de bien réconfortant à dire :
    —    C'est pour cela que mieux vaut concocter une confession sur mesure.
    Au moins, il sut ouvrir les bras afin d'y accueillir sa compagne désespérée.
    —    Si tu m'abandonnes maintenant, je suis perdue.
    Elle n'exagérait pas. Les commissions scolaires exigeaient aussi un certificat de moralité à l'embauche. Bien plus, si Thomas décidait de lui offrir une place dans son magasin, le curé de la paroisse pourrait lui faire un tort considérable au nom de la défense des bonnes mœurs, juste en multipliant de petites remarques assassines, ou alors franchement en le condamnant du haut de la chaire. Tous ceux qui côtoyaient une femme impure s'exposaient à des représailles.
    —    Ne t'inquiète pas. Eugénie ne quittera pas la maison avant la fin du mois d'août. Tout peut survenir, d'ici là.
    Involontairement, les yeux de Thomas se portèrent vers le plafond. Depuis près de deux mois maintenant, l'état d'Alice demeurait préoccupant, au point que le maître de maison ajournait d'une semaine à l'autre la décision de faire venir un aliéniste. Le docteur Couture évoquait maintenant spontanément son hospitalisation.
    Un bruit venu de la rue l'incita à fermer la lampe. Un moment plus tard, Elisabeth laissait échapper une plainte sous ses baisers.
    De l'autre côté de la porte, Eugénie tendait l'oreille. Pour la dixième fois peut-être, le petit craquement d'une marche dans l'escalier lui avait signalé que la préceptrice descendait. Pieds nus, elle l'avait suivie pour s'asseoir sur la dernière marche, et attendre. Deux ou trois fois, elle avait bien failli se faire surprendre, au moment où les amants mettaient fin à leur petit aparté.
    Encore cette fois, Eugénie regagna son lit à temps pour éviter d'être découverte. Longtemps, elle demeura immobile, étendue sur le dos, ses yeux grands ouverts fixant l'obscurité. Le craquement de l'une des marches se produisit de nouveau. Sans bruit, la fillette se glissa jusqu'à la porte, posa son œil sur le trou de la serrure.
    La clarté blafarde de la lune permettait de voir des ombres se déplacer. Elisabeth regagna sa chambre, repassa bientôt devant son œil grand ouvert, une ombre évanescente dans sa grande chemise de nuit qui balayait le sol, glissant sans bruit sur ses pieds nus. Elle pénétra dans la salle de bain. Après quelques minutes, le bruit étouffé de la chasse d'eau parvint à la fillette. Au moment de sortir, après une brève attente, immobile, plutôt que de tourner à droite pour regagner sa chambre, elle alla à gauche pour pénétrer dans celle d'Alice.
    La petite fille posa la main sur la poignée de la porte, comme pour sortir afin de confondre l'intruse, mais ne bougea pas. Ce ne fut que quelques instants plus tard, lorsque la préceptrice regagna enfin sa chambre, qu'Eugénie revint dans son lit, remonta la couverture jusque par-dessus sa tête.
    Puis, le visage à quelques pouces du mur, elle chercha le sommeil.
    Le lendemain matin, comme les deux enfants tenaient à communier, ils ne descendirent pas au déjeuner. Les adultes mangèrent en tête-à-tête, échangeant seulement quelques mots. Un peu après huit heures, comme à son habitude, Joséphine plaça une théière, une tasse, deux tranches de pain grillé et de la confiture sur un plateau. Pestant car elle aurait à redescendre tous ces aliments intacts, elle se dirigea à l'étage.
    Un moment plus tard, dans la salle à manger, ils entendirent «mon Dieu, mon Dieu!» étouffés d'abord, puis plus forts, car la cuisinière criait maintenant depuis la dernière marche de l'escalier:
    —    Monsieur, montez vite. Un grand malheur !
    Thomas se leva d'un coup, renversant sa chaise, puis se
    précipita à l'étage, Elisabeth sur les talons. Dans la chambre trop chauffée, il aperçut Alice un peu en travers de son lit, sur le dos, les yeux vides. Une mousse rosâtre marquait la commissure de ses lèvres. Une faible odeur d'excréments flottait dans la pièce.
    —    Monsieur, oh Monsieur,

Weitere Kostenlose Bücher