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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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dans ce champ visiblement laissé à l'abandon depuis quelques années, des sauterelles s'élançaient dans les grandes herbes pour parcourir une longue distance. D'autres bestioles, toutes petites, semblaient particulièrement attirées par les jambes des touristes.
    —    Alors allons-y, et laissons les explorateurs courir les bois sans nous.
    Un moment plus tard, l'homme trouvait un lit d'aiguilles sous le pin centenaire. Il enleva sa veste pour la poser par terre, s'assit sur elle, s'appuya le dos sur le tronc rugueux.
    —    Désolé, remarqua-t-il à l'intention de sa fille restée debout, mais je n'en ai pas une seconde. Installe-toi par terre. D'abord, ta robe est de couleur foncée, cela ne se verra pas trop si tu la taches un peu. Puis tu pourras la faire nettoyer à l'hôtel pour demain.
    —    Si nous revenons ici, nous apporterons une couverture, remarqua-t-elle dans un soupir, songeant que décidément, les hommes de sa famille se souciaient bien peu de la propreté
    de ses vêtements.
    Une heure plus tard, la préceptrice revenait avec son protégé tout souriant, mastiquant avec l'enthousiasme d'un bovin, les poches pleines de thé des bois.
    —    Nous avons vu un serpent, clama-t-il d'entrée du jeu.
    —    Une petite couleuvre verte, corrigea la jeune femme pour les deux autres, en indiquant une longueur d'environ dix-huit pouces avec ses deux index.
    —    Elisabeth l'a prise dans ses mains pour me la montrer de près.
    Quelque chose comme de l'admiration illuminait les yeux du garçon. Même Thomas ne put s'empêcher de sourire en songeant que toutes les autres femmes qu'il connaissait auraient plutôt lancé des cris stridents à la vue de ce reptile.
    —    Mademoiselle Trudel, si ma mère aborde de nouveau la question de vos origines, je pourrai témoigner: vous êtes une véritable fille de la campagne. Vous vous joignez à nous, en attendant le départ ?
    Au moins, l'homme ne fit pas à Eugénie l'affront d'offrir à la jeune femme de s'asseoir sur sa veste. Celle-ci se retrouva les fesses dans les aiguilles de pin, appuyée elle aussi sur le tronc d'arbre, occupée à répondre à l'incessant babillage d'Edouard.
    Un peu plus tard, ils revinrent s'asseoir dans la charrette du cultivateur. La plupart des touristes présentaient une mine déçue. Thomas exprima le sentiment général en disant au vieil homme :
    —    Vous devriez prendre quelques jours de congé et reprendre du service quand il y aura des framboises ou des bleuets dans ces buissons. Vous avez de la chance, dans votre ligne de commerce, de ne rencontrer vos clients qu'à une seule reprise. Dans la mienne, vous déposeriez votre bilan
    avant trois mois.
    Le paysan haussa les épaules, indifférent à ces reproches : si les citadins ne savaient pas quand était la saison des fraises, ce n'était pas son problème.
    Le temps se maintenait au beau, aussi les vacanciers se retrouvaient sur l'étroite bande de sable qui s'allongeait entre la voie ferrée et le fleuve. Cela faisait une plage très médiocre, dont il fallait se contenter. Eugénie et Edouard purent revêtir le maillot de bain que leur père avait «emprunté» au rayon «villégiature» improvisé au rez-de-chaussée de son commerce. Après un nettoyage, il pourrait les mettre en solde à la fin de la saison, avec les autres invendus.
    Eugénie sortit de la bicoque qui servait à se changer avec toute la timidité d'une grande fille allant sur ses huit ans, soucieuse de ne pas trop révéler ses charmes. Le sixième commandement de Dieu s'imposait à son esprit: «Impudique point ne seras, De corps ni de consentement. » Pourtant, le vêtement, un tricot de coton serré au cou, lui allait jusqu'aux mollets. Sa robe, qu'à son âge elle portait encore aux genoux, en révélait un peu plus. Quant à Edouard, vêtu d'un costume à peu près identique, il s'offrait aux regards avec enthousiasme.
    De l'eau à mi-jambe, le garçon cria à l'intention de sa préceptrice :
    —    Viens nous rejoindre, c'est amusant.
    —Je ne veux pas ruiner mes souliers, répondit la jeune femme debout sur le sable.
    —    Alors enlève-les.
    Comment résister à pareille logique ? Elisabeth regarda à droite, puis à gauche. Des gens pouvaient la voir, mais elle n'osait laisser les enfants sans surveillance le temps d'un aller-retour vers les cabines. Aussi, elle s'accroupit pour détacher ses chaussures, glissa la main sous sa jupe le temps de

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