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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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une calèche, décréta-t-il, le quai se trouve un peu loin pour le plus jeune d'entre nous.
    Des voitures se tenaient toute la journée devant le grand hôtel. En réalité, compte tenu des terres médiocres des environs, la venue de touristes permettait aux habitants de
    Charlevoix de trouver une source de revenu précieuse, parfois inespérée. Cela allait des conducteurs de fiacres et de calèches aux femmes qui faisaient les chambres dans les hôtels, aux domestiques embauchées par les estivants pour la saison, aux paysans qui amenaient les touristes aux fraises ou aux pêcheurs qui radoubaient de vieilles barques afin de promener des citadins sur le fleuve.
    Edouard sauta de l'échelle accrochée au quai au fond de l'embarcation, se retrouva sur le cul en grimaçant de douleur alors que le vieux marinier commentait, sans la moindre compassion :
    —    Garçon, si tu tiens à nous envoyer par le fond, continue comme cela.
    Elisabeth vint ensuite, prenant place avec souplesse sur le banc placé devant le mât de la grande barque. De la main, elle fit signe au gamin de la rejoindre en disant:
    —    Ne craignez rien, je vais l'avoir à l'œil. Aucun d'entre nous ne sait nager.
    —    Moi non plus. C'est bien pour cela que j'ai un bateau.
    Thomas s'assit sur le banc à l'arrière de l'embarcation, alors
    que le vieil homme, avec une grande rame, poussait sur le quai. Ensuite, il hissa la voile unique, triangulaire, une grande pièce de toile rouge à la couleur un peu délavée, rapiécée en plusieurs endroits. Avec habileté, il arriva à emprisonner un peu de vent, assez pour faire glisser son esquif vers le large. Après quelques minutes, installé à la poupe, le flanc appuyé contre la barre, le marin annonça le programme de la petite expédition :
    —    Le mieux est de remonter un peu le fleuve par vent arrière. Il faudra louvoyer pour revenir, mais avec le courant, ce sera facile.
    Thomas donna son assentiment, heureux à l'idée de demeurer près du rivage. Ses yeux allaient du mât, taillé grossièrement dans un petit sapin, au bordage qui avait subi quelques réparations déjà. Un peu d'eau croupissait au fond de l'embarcation, au point qu'Elisabeth s'était assise en travers de son banc, les jambes allongées devant elle, un bras passé sur le plat-bord, l'autre autour de son protégé pour prévenir tout mouvement intempestif.
    Peu à peu, l'homme se sentit rassuré. Le vent les poussait vers le sud-ouest en douceur, l'embarcation traversait les rouleaux de vagues venus du large avec aisance en soulevant des éclaboussures qui faisaient rire Edouard aux éclats. Celui-ci et la préceptrice regardaient vers le large, tournant résolument le dos à la côte.
    Le garçon s'imaginait certainement lancé dans un grand voyage d'exploration. Quant à la jeune femme, Thomas se demandait bien où ses pensées la conduisaient. La lumière blanche lui faisait plisser les yeux. Certaine que ce genre d'expédition ne faisait pas bon ménage avec son ombrelle, l'accessoire était resté dans la chambre. Tans pis si le lendemain elle présentait des joues, un nez et un front brûlés par le soleil.
    Sur une embarcation sans cesse en mouvement, impossible d'afficher la même pudeur que sur la terre ferme. La jeune femme chercha d'abord à coincer le bas de sa jupe entre ses chevilles croisées par la garder bien en place. Mais le maintien de son équilibre rendait nécessaire des mouvements fréquents. À la fin, elle choisit d'ignorer que le vêtement de serge bleue remontait jusqu'à la moitié des jambes, révélant un jupon blanc tout simple, terriblement excitant, des pieds enfermés dans des bottines brunes lacées haut sur la cheville.
    Une nouvelle fois, Thomas se surprit à bander devant ce spectacle somme toute innocent, songeant au plaisir qu'il aurait à promener sa main sur ces jambes gainées de bas bleus en coton, privés de la moindre broderie. Puis il remarqua que le vieux pêcheur posait aussi un regard amusé sur le joli spectacle. Honteux, il fit semblant de se passionner pour le sillage d'écume blanche à la poupe.
    —    Est-ce que tu les vois ?
    La question venait de la porte permettant de passer directement de la chambre à la véranda. Sans se retourner, Eugénie, appuyée sur l'un des poteaux qui soutenaient la grande galerie du premier étage, répondit:
    —    Non, je ne les vois pas.
    Sous ses yeux, une embarcation à la voile d'un rouge délavé se

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