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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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pour monter à bord et retrouva son banc et ses deux rames. Marie saisit cet instant pour faire les présentations. Un moment plus tard, ses efforts les amenèrent au milieu de la rivière.
    —    Cela ne sent pas très bon, remarqua la jeune fille en plaçant l'un de ses doigts sous ses narines, comme pour bloquer les effluves nauséabonds.
    —    Ce .l'est rien. A marée basse, cela devient épouvantable. Pas moins de huit tuyaux d'égout se déversent dans la Saint-Charles. Je peux vous les montrer.
    —    Ce ne sera pas vraiment nécessaire, rétorqua la jeune fille en riant. Je vous crois sur parole.
    —    Dire que tous les jours, des dizaines de personnes pèchent l'éperlan ici. Je ne voudrais pas être invité à souper chez elles.
    Marie grimaça, mais s'esclaffa encore à l'humour du rameur. Sans doute parce que deux jeunes personnes de sexe différent prenant plaisir à une conversation lui paraissaient conduire tout droit vers le péché de la luxure, Emile remarqua, impatient:
    —    Ils pèchent plus près de l'embouchure, dans l'eau vive.
    Le jeune homme aurait pu répondre que la merde de la ville passait par là aussi, lors de son trajet vers le fleuve. A la place, il préféra regarder la jeune fille dans les yeux avant d'ajouter:
    —    C'est aussi ici que les gens de Saint-Roch et de Saint-Sauveur puisent leur eau pour boire. Bien sûr, personne de la Haute-Ville ne s'abreuve à cette source-là.
    Malgré ce fait, tout simple, certains feignaient la surprise devant les statistiques de la mortalité infantile, deux fois plus élevée au bas de la falaise qu'elle ne l'était en haut. La critique implicite des personnes au pouvoir agaça l'abbé Buteau. La soumission devant ceux que Dieu plaçait au sommet de la pyramide s'érodait dangereusement dans la province. Heureusement, l'embarcation piquait son étrave sur la rive, il n'aurait bientôt plus à entendre ce genre de discours. Le scénario de l'embarquement se répéta pour le débarquement.
    —    Je continue ma promenade, précisa le jeune homme à l'attention de Marie au moment de remonter dans son esquif. Nous nous reverrons à l'endroit habituel.
    Prestement, il poussa la chaloupe, retrouva ses rames et s'éloigna vite.
    —    Cet endroit habituel, je suppose que c'est au magasin. S'agit-il d'un employé de la livraison ? questionna Emile du ton qu'il cultivait depuis quelques semaines au confessionnal.
    —    Même pas. C'est l'un de tes paroissiens. Nous échangeons quelques mots à la sortie de la messe, le dimanche.
    Impuissant à critiquer un lieu de rencontre si respectable, son frère se tint coi. Il s'inquiéta plutôt de la difficulté, apparemment insurmontable, que posait l'absence de leurs parents pour la préservation de la vertu de sa cadette. Un jeune homme comme celui-là, c'était dans le salon familial, sous les yeux attentifs d'une mère, que Marie devrait le rencontrer, pas dans une barque flottant sur une rivière malodorante.
    Quand l'ecclésiastique lui fit part de ses réflexions, un certain agacement se peignit sur le visage de Marie. A la fin, le jeune abbé abdiqua :
    —    Je dois aller me préparer. Assisteras-tu aux vêpres?
    —    Peut-être. Mais toutes mes collègues sont ici, je dois leur parler un peu. Tu sais, je n'ai pas trop d'amis dans ce monde.
    —    Oui, tu as raison. Nous reverrons-nous dimanche prochain ?
    —    Sans faute. C'est facile, du chœur, regarde vers le jubé. Je suis la petite brune au premier rang.
    Sur ces mots, elle tourna les talons pour s'éloigner, lui adressant un petit salut de la main, sans toutefois se retourner. Sans le réaliser, elle calquait là les manières d'Alfred.
    Thomas Picard s'était donné comme objectif de dire un bon mot à chacune et chacun de ses employés présents au pique-nique. De son côté, Elisabeth dirigeait une petite représentation dont les enfants jouaient le premier rôle. Ils incarnaient évidemment la princesse et le prince du faubourg Saint-Roch. Eugénie, dans sa robe blanche, gardait un air emprunté et répondait timidement aux questions, toujours les mêmes, qu'on lui posait après un compliment sur la magnificence de sa tenue : quel était son prénom, quel était son âge. Edouard, dans son costume de marin, posait plutôt les questions et assurait aux hommes qu'il saurait leur en montrer si on l'autorisait à jouer aux fers.
    Marie rompit la routine en s'adressant à la préceptrice

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