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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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de piste fit bientôt son entrée, débita un boniment en anglais que la moitié de l'assistance ne comprit pas, dans lequel les qualificatifs ronflants se suivaient à un rythme exceptionnel, puis le spectacle commença. D'entrée de jeu, les acrobates japonais et les contorsionnistes chinois séduisirent totalement Marie. Les éléments les plus remarquables de la représentation se trouvaient entrecoupés des interventions d'une vingtaine de clowns bruyants. Cependant les chevaux, les plus beaux du monde évidemment, montés par des cavalières légèrement vêtues, représentaient le clou du spectacle. Après une heure et demie, l'assistance quitta les estrades, très satisfaite de la soirée.
    Une fois dehors, le quatuor formula son appréciation en termes sentis, puis Marcel proposa :
    —    Comme il fait encore clair, allons-nous voir de ce côté?
    —    Je dois arriver au travail assez tôt demain, précisa Marie.
    —    Moi aussi. Nous pouvons tout de même prendre une heure pour jeter un coup d'œil.
    Elle consentit finalement, s'attarda longuement devant les cages des fauves. La pénombre complice ajoutait un peu de majesté à des lions et des tigres à la mine plutôt basse et à un troupeau de chameaux qui se révélèrent être des dromadaires. A tout le moins, Marie choisit de faire semblant de croire l'opinion de son chevalier servant plutôt que de s'engager dans une discussion longue et vaine sur le nombre de bosses de ces animaux. Puis chacun savait que les beaux garçons nés près de la rivière Saint-Charles étaient des experts en ces questions...
    —    Comme ils sont mignons ! s'exclama Yvonne devant l'enclos d'une demi-douzaine de kangourous venus de l'Australie, l'autre joyau de l'Empire britannique, situé aux antipodes du Canada.
    Le charme de ces bêtes tenait largement au fait qu'elles s'approchaient suffisamment de la clôture pour qu'on puisse les toucher.
    —    Regarde, il y en a une qui porte un bébé dans cette curieuse poche, fit observer Georges à sa compagne.
    Pendant un moment, le couple demeura bouche bée face au joli spectacle, ce qui fit penser à Marie que sa compagne tenait peut-être enfin son prince charmant. Les émeus, qui venaient aussi de l'autre bout du monde, séduisirent beaucoup moins les visiteurs, même si Marcel émit l'opinion que cela ferait une bonne volaille pour le repas du prochain dimanche.
    —    Cela vous dit d'entrer là ? demanda encore le bellâtre en désignant une bicoque qui ne payait pas de mine.
    —    Pas question que j'aille voir la femme éléphant, l'homme en caoutchouc ou l'enfant à deux têtes, décréta sa compagne d'une voix qui ne tolérait pas la contradiction.
    Les cirques les mieux tenus tramaient avec eux un side show, un spectacle toujours vulgaire où les infirmités les plus grotesques voisinaient avec des trucages qu'un examen un peu attentif aurait dévoilés tout de suite.
    —    De toute façon, continua-t-elle, cette fois c'est vrai, je dois rentrer.
    —    Moi aussi, renchérit Yvonne un peu à contrecœur.
    —    Dans ce cas, nous allons vous reconduire.
    La conversation tenue exactement cinq semaines plus tôt se répéta, Marie insistant sur son désir de rentrer seule à la maison.
    —    Ne crains rien, rétorqua Marcel en riant. Maintenant que je sais que le sévère vicaire Buteau est ton frère, je serai prudent. Je crains trop qu'il me demande de me rendre à Sainte-Anne-de-Beaupré sur les genoux avant de me donner l'absolution, lors de ma prochaine confession.
    Le trajet se déroula sans problème et, un peu après onze heures, les deux jeunes femmes se préparèrent à se mettre au lit. Yvonne souffla la bougie afin de pouvoir se dévêtir dans l'obscurité.
    —    C'était un beau spectacle, confia-t-elle en se glissant sous sa couverture. Je n'ai jamais rien vu d'aussi bien.
    —    Moi non plus.
    —    Si tu voyais les cirques qui viennent en Beauce. Pour apprécier, faut vraiment n'avoir rien connu de mieux.
    Marie jugea inutile de préciser que la présence des meilleurs spectacles à la ville ne servait à rien, quand on 11e pouvait se payer le billet d'entrée. Un moment plus tard, après un long silence, sa compagne murmura encore :
    —J'ai une jeune sœur qui montera à Québec après les récoltes. J'espère la placer à la manufacture. Elle aimerait habiter avec moi.
    —    ... Après les récoltes, cela veut dire en septembre ?
    —

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