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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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   F... Fernande, bégaya-t-elle.
    Même s'il aurait aimé retenir tous les noms de ses employés, Thomas n'y arrivait pas. Cette jeune personne paraissait tellement impressionnée de s'adresser à celui qui, d'un caprice, pouvait la jeter à la rue, qu'elle en perdait tous ses moyens. Un moment, l'homme se demanda comment ce respect craintif pouvait se transformer en complicité amoureuse. En réalité, sa toute-puissance lointaine ne l'aidait en rien. La moindre initiative risquait plutôt de provoquer une syncope chez l'objet de son désir. Seuls les chefs de rayons, dans leurs rapports quotidiens avec les vendeuses, pouvaient créer des occasions d'aller un peu plus loin.
    —    Bonne journée, Fernande, conclut-il avant de se diriger vers le grand escalier.
    Thomas n'aurait certainement pas l'occasion d'expliquer au docteur Couture que le fait d'avoir plusieurs dizaines de femmes à son emploi ne lui permettait pas vraiment de trouver une solution à ses difficultés conjugales. Sa suggestion esquissée lors d'une conversation nocturne ne se concrétiserait pas si facilement.
    De retour au troisième étage, dans les locaux de l'administration, il s'arrêta un moment afin de regarder Marie Buteau penchée sur le tiroir ouvert d'un classeur. A cause de la chaleur, elle avait accroché sa veste au mur. Son chemisier blanc soulignait des formes graciles. Ses cheveux, relevés sur sa tête grâce à des épingles, dégageaient une nuque fine, des oreilles délicatement dessinées.
    —    Oh ! fit-elle en l'apercevant, vous m'avez surprise.
    Son visage offrait des traits réguliers, harmonieux. La
    chaleur couvrait sa lèvre supérieure d'une petite pellicule de sueur.
    —    Je suis désolé, murmura-t-il. Je ramassais mon courage avant de retourner m'enfermer dans mon bureau.
    —    Ce temps radieux ne nous facilite pas les choses.
    Son sourire montrait de petites dents très blanches.
    L'homme se résolut à retourner derrière son bureau en songeant qu'il ne servait à rien de chercher dans les autres étages.
    Comme il le faisait toutes les deux semaines, selon une routine vieille maintenant de deux mois, l'abbé Buteau frappa à la porte de la grande maison de la rue Saint-François en matinée. Joséphine se précipita pour aller répondre en essuyant ses mains poisseuses sur son grand tablier.
    —    Entrez, Monsieur le Curé, dit-elle de sa voix la plus onctueuse.
    —    Je vous répète que je suis seulement vicaire, déclara avec un sourire le nouveau venu en enlevant son chapeau. Vous me donnez une promotion beaucoup plus rapidement que mon évêque. Comment allez-vous, madame Tardif?
    —    Très bien, très bien. Mais entrez, ne restez pas dehors.
    La grosse femme s'écarta pour le laisser passer, prit son chapeau pour l'accrocher au mur.
    —    Et comment se porte madame Picard ?
    —    Lentement, elle prend un peu de mieux... Enfin, je veux dire qu'elle récupère de la fatigue de cet été. La traîner ainsi à la campagne, c'était criminel...
    Le prêtre fit un geste de la main pour apaiser la cuisinière, tout en disant à voix basse :
    —    Voyons, ne dites pas des choses semblables. Tout a été fait pour le mieux. Elle est prête à me recevoir?
    —    Oui, elle vous attend. Je vous conduis.
    Joséphine monta l'escalier de son pas lourd, pour se retrouver face à Elisabeth au moment d'arriver à l'étage.
    D'une voix peu amène, elle interrogea :
    —    Que voulez-vous ?
    —    Dire un mot au vicaire, répondit-elle, puis elle continua en s'adressant à ce dernier : Pourrai-je vous parler tout à l'heure, avec les enfants ?
    —    Certainement.
    —Je vous attendrai donc au rez-de-chaussée, dans le salon. Merci.
    La préceptrice tourna les talons pour regagner le grenier, où attendaient ses élèves. Le vicaire s'arrêta devant la porte de la malade, la cuisinière frappa deux petits coups, puis ouvrit tout de suite sans attendre la réponse.
    Alice Picard se tenait bien droite dans son fauteuil habituel. Pour la visite de son pasteur, elle faisait toujours l'effort de revêtir un corsage boutonné jusqu'au cou par-dessus sa chemise de nuit. Quelle que soit la température ambiante, elle entourait une couverture autour de son corps, qui la couvrait de la taille aux pieds.
    —    Madame, vous paraissez rayonnante...
    —    C'est la joie de recevoir la sainte communion !
    D'un coup d'œil, elle signifia à Joséphine de se

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