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Fausta Vaincue

Titel: Fausta Vaincue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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douceur. Prenez garde à ceux qui font des serments ! A moi aussi, jadis, quelqu’un me faisait des serments… Qu’en est-il resté ?… Du malheur !
    Charles considérait avec une poignante émotion celle qui s’était appelée Léonore de Montaigues.
    – Madame, dit Pardaillan, venez avec nous. Il n’est pas séant qu’une Montaigues soit ainsi errante par les chemins…
    – Montaigues ! fit-elle frémissant. Quel est ce nom ?…
    – Léonore, baronne de Montaigues, c’est le vôtre !
    – Léonore ? Qui vous dit que je m’appelle Léonore ?… Léonore !… Quelle joie !… J’ai connu une pauvre fille qui s’appelait ainsi… Elle est morte !…
    La bohémienne était devenue toute blanche. Malgré le chaud soleil qui versait sa lumière sur les flancs de la Butte, ses mains tremblaient.
    Charles saisit une de ces mains et la pressa dans les siennes.
    – Vous êtes Léonore, répéta-t-il, vous êtes la mère de celle que j’aime !… Ah ! madame, écoutez-nous… rappelez-vous !… Souvenez-vous du pavillon de l’abbaye où nous vous avons trouvée… Vous étiez avec celui qui vous a aimé… avec celui qui nous a dit votre nom et le sien… le prince Farnèse… l’évêque !…
    Elle eut un grondement, quelque chose comme un sanglot… un instant la lueur de raison éclaira ses yeux splendides… car dans ces yeux, il y avait de la haine !… Charles la fixait avec une angoisse de douleur, d’amour et de pitié…
    Reconquérir la raison de cette infortunée ! Retrouver Léonore de Montaigues dans la bohémienne Saïzuma ! Et rendre sa mère à Violetta, retrouvée elle-même… A cet instant il put faire ce rêve, tandis que palpitant, il fouillait le regard de Saïzuma… Mais ce regard s’éteignit soudain…
    – L’évêque est mort ! dit-elle en secouant la tête.
    – Votre fille, madame ! cria le jeune duc. Votre fille !… Votre Violetta !…
    – Je n’ai pas de fille… dit-elle d’une voix morne.
    Charles laissa retomber sa main et détourna son regard vers Pardaillan comme pour lui dire :
    – Qui donc au monde pourrait lui rendre la raison, puisque le nom de sa fille la laisse indifférente ?…
    En effet, si Charles et Pardaillan avaient su, dans le pavillon de l’abbaye, le vrai nom de la bohémienne et qu’elle était la mère de Violetta, ils ignoraient encore en quelles terribles circonstances l’enfant était née… et que cette enfant… la mère ne l’avait jamais vue ! Folle avant d’être mère, Léonore s’était réveillée en prison sans savoir qu’elle était mère !…
    – Madame, reprit alors Pardaillan, ne parlons donc pas de votre nom, puisque cela semble provoquer en vous une douleur que nous sommes bien loin de vouloir vous causer…
    – Je suis Saïzuma… la bohémienne Saïzuma, et je dis la bonne aventure, ne le savez-vous pas ?
    – Soit. Mais venez avec nous… N’êtes-vous pas lasse de vivre ainsi, à l’abandon, toujours seule avec vos tristes pensées ?
    – Oui, fit-elle en hochant la tête, mes pensées sont bien tristes… Si je vous disais… si je vous racontais l’histoire de cette pauvre Léonore dont vous me parliez !… Vous comprendriez pourquoi mes yeux n’ont plus de larmes à force d’avoir pleuré !
    Elle s’était appuyée à la croix et, d’un geste lent, s’était drapée dans les plis de son manteau bariolé, parsemé de médailles. Sous le grand soleil, ses cheveux dénoués rutilaient. Ses yeux se perdaient au loin sur la campagne solitaire, et elle était ainsi, toute raide, adossée à cette croix, dans l’éclatante et chaude lumière, d’une beauté tragique, émouvante, qui faisait frissonner les deux hommes immobiles…
    – Affreuse histoire, reprit-elle de sa voix monotone aux inflexions d’une étrange douceur, histoire d’un cœur brisé, que Saïzuma est seule à connaître. Ecoutez donc la bohémienne, et vous saurez pourquoi elle a tant pleuré sur la pauvre Léonore, pleuré jusqu’au jour où ses yeux n’ont plus eu de larmes. Connaissez-vous la cathédrale, la sombre et vaste église qui se dresse en face de l’antique hôtel ? C’est là !… c’est là que le Malheur accourant des horizons inconnus avec la force de l’ouragan s’abattit sur la fille maudite… c’est là qu’elle vit celui qu’elle appelait son Dieu… c’est là qu’elle reconnut en lui l’imposture, la trahison et l’infamie… et puis…

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