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Fausta Vaincue

Titel: Fausta Vaincue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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semblable au grondement d’impatience des chiens à la minute de la curée. Et elle comprit Maurevert comme elle ne l’avait pas encore compris…
    – Pardonnez-moi, haleta l’homme, je ne puis m’empêcher de rire !… Je ris depuis cet après-midi… je ris comme jamais je n’ai pu rire depuis seize ans !… il me serait impossible de ne pas rire… Ah ! par l’enfer ! par la damnation de mon âme !… comme c’est bon de rire enfin de bon cœur ! Je dois vous paraître insensé !… Ecoutez-moi, madame, nous n’avons qu’à préparer l’embuscade : une centaine d’hommes solides et bien armés suffiront. Car le duc ne se doute de rien. Sa confiance, voyez vous, est prodigieuse ; au fond, c’est un imbécile… Il viendra, vous dis-je ! Il sera seul, avec son niais d’Angoulême dont je ne ferai qu’une bouchée… Madame, je viens de tuer un homme pour être libre demain, un de mes amis, quelqu’un que j’aimais bien ! Je tuerais dix, vingt de mes amis pour être libre demain !… C’est bien simple : il m’a donné rendez-vous, demain, à dix heures, à la Ville-l’Evêque ; le reste nous regarde !…
    Fausta, appuyée sur le bras de son fauteuil, passive, considérait cette manifestation de haine avec une curiosité effrayante. Maurevert souffla fortement et continua un peu plus calme :
    – Ils étaient tous deux sur les pentes de Montmartre… car ils n’osent rentrer dans Paris. Ils sont à la recherche de la petite bohémienne. Je marchais, je montais, j’allais à l’abbaye… et tout à coup, j’ai vu Pardaillan… Et j’ai vu que j’allais mourir, madame ! j’ai vu cela dans ses yeux… Alors, la peur, la hideuse peur qui me tient depuis tant d’années, m’a mordu au cœur, et je suis tombé à genoux… et j’ai demandé grâce !… Ah ! il ne manquait que cela à ma haine !… Cette chose plus affreuse que tout ce que j’avais pu supposer : il m’a fait grâce…
    Fausta eut un bref tressaillement.
    – Il m’a fait grâce de la vie ! continua Maurevert. Et je vous le dis, madame, cela manquait à ma haine !… Voici : il m’a fait grâce pour que je puisse lui dire demain où se trouve la petite bohémienne !… A dix heures, demain, je dois me trouver au rendez-vous, à la Ville-l’Evêque… J’y serai, madame !… Nous y serons !…
    Maurevert fut secoué de nouveau par son effroyable rire.
    – Demain ! murmura Fausta. Demain… à dix heures… à la Ville-l’Evêque…
    – Oui, dit Maurevert frémissant, demain… demain nous le tenons !… Nous n’avons donc qu’à prendre les dispositions nécessaires. Je connais parfaitement les plaines de la Ville-l’Evêque et je me charge de disposer l’embuscade…
    Un geste de Fausta lui imposa silence. Elle songeait… elle cherchait une solution… Comme pour indiquer à Maurevert qu’il eût à ne pas la déranger, elle lui fit signe de s’asseoir, car il était encore debout depuis l’entrée de Fausta… Maurevert obéit.
    « Il faudrait pourtant se hâter ! gronda-t-il en lui-même. Il faut qu’à l’aube tout soit prêt… le filet tendu… »
    Une solution !… Quelle solution cherchait Fausta ?… Ah ! certes, ce n’était pas la solution extérieure qui l’occupait !… Prendre Pardaillan ?… S’emparer de lui ? C’était facile en l’occurrence !… Comme l’avait indiqué Maurevert, il n’y avait qu’à préparer une embuscade avec une centaine d’hommes bien armés… Quels que fussent le courage, la force et la ruse de Pardaillan, il succomberait infailliblement…
    Non ! ce n’était pas là ce qui l’inquiétait ! La solution qu’elle cherchait était intérieure.
    Depuis la scène de la cathédrale de Chartres, un travail étrange se faisait dans le cœur de cette femme. Il y avait en elle de la haine et de l’amour à poids égaux… Qu’on excuse cette comparaison : l’âme de Fausta était une balance. Dans un des plateaux, il y avait de l’amour ; dans l’autre, de la haine…
    La haine, c’était l’orgueil.
    L’amour, c’était la vérité.
    Avant la scène de la cathédrale, ces plateaux étaient immobiles. L’amour et la haine étaient dans un état stagnant. Cette scène avait imprimé aux plateaux un violent mouvement de bascule : tantôt l’amour était en haut… Ainsi, dans la cathédrale même, cet amour avait triomphé jusqu’à arracher Fausta à son rêve d’orgueil : elle avait consenti à redevenir

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