Favorites et dames de coeur
se cassa une jambe au retour d’un voyage en Dauphiné (1565), se rétablit, mais mourut soudain à Anet le 26 avril 1566 des suites d’un refroidissement.
D’abord inhumé dans l’église paroissiale, son corps reposa dans la chapelle funéraire du château d’Anet après 1577. La tombe fut profanée en 1795 et la dépouille de la duchesse de Valentinois jetée à la fosse commune.
Diane de Poitiers fut une favorite coûteuse dont l’influence ne doit rien au sens de l’État, mais tout à son propre intérêt. Au moins laissa-t-elle le souvenir d’un grand mécène, qui sut promouvoir un art de vivre, une civilisation raffinée, juste avant la tourmente des guerres de religion.
ANNEXE
Fut-elle aussi belle qu’on le prétend ?
Grande, plus charpentée que fine, distinguée plutôt que belle, élégante qui refusait les outrages des ans, Diane avait incontestablement de la classe et du maintien. Telle la virent ses contemporains à la cour. Peu avant qu’elle ne disparût en 1566, Brantôme ne craignit pas d’affirmer : « J’ai vu Madame la duchesse de Valentinois en l’âge de soixante-six ans, aussi fraîche et aimable comme en l’âge de trente ans 43 . » Il était sans doute un peu myope, car les crayons de Clouet et de l’école française du XVI e siècle montrent l’irrémédiable déclin de la beauté de Diane au fil du temps. Conservé à la bibliothèque Méjanes d’Aix-en-Provence, un dessin de 1520 la représente : une belle fille saine avec des joues rondes et un menton plein, des lèvres presque charnues ; dans la marge, François I er écrivit la fameuse devise : « Belle à la voir, honnête à la hanter ». Puis les dessins se succèdent de dix en dix ans ; en 1550, la fraîche adolescente est devenue une femme au visage sec, la bouche et les lèvres pincées, le menton pointu. « Figure fâcheuse et presque ridicule […] un printemps depuis longtemps passé […]. Telle fut cette favorite dans son plus grand crédit », concluait le grand historien d’art Louis Dimier 44 devant le dernier crayon de la favorite, conservé au château de Chantilly.
Sa robuste santé due à la vie au grand air, la pratique de l’équitation – elle était capable de chevaucher douze heures d’affilée à soixante ans –, une alimentation saine et d’attentifs soins corporels sont probablement les critères retenus par la postérité pour apprécier sa « beauté ». En 1552, l’impartial ambassadeur Contarini écrivait : « Peut-être en vertu des soins minutieux qu’elle prend, elle est bien loin de paraître aussi âgée qu’elle l’est. »
Une femme d’affaires au siècle de Ronsard
L’inventaire des biens de la duchesse de Valentinois mérite un livre à lui seul. L’amas patient et tenace d’une si vaste fortune fut peut-être sa plus grande œuvre. Mais son rang à la cour l’obligeait à des frais considérables.
Riche d’innombrables domaines, de péages fluviaux ou routiers, de fermages, de greniers à sel, de moulins et fours seigneuriaux, elle géra intelligemment ces revenus, accrus par les dons du roi, pour son dévouement envers sa famille. Les scrupules n’étouffaient pas cette bonne catholique : elle toucha une commission sur la vente de rameurs espagnols, prisonniers de guerre chrétiens , à des Turcs musulmans… Propriétaire terrienne avisée, Diane arrondit ses biens fonciers, les mit en valeur, équilibrant les comptes d’exploitation. Cette excellente gestionnaire préférait ces recettes sûres aux emprunts publics et aux placements bancaires aventureux.
Diane tenait conseil quotidien avec son trésorier, son receveur général et ses secrétaires, qui l’informaient des affaires en cours. Âpre au gain, chicanière, tatillonne, la grande sénéchale ne craignait pas les procès de voisinage.
Un tour de passe-passe juridique : Chenonceaux
En 1535, un sieur Antoine Bohier céda son domaine de Chenonceaux au roi pour régler une dette au Trésor. Estimé 90 000 livres tournois, le bien appartint désormais à la Couronne et devint donc inaliénable.
Diane de Poitiers y séjourna, s’y plut et en devint illégalement propriétaire : par lettres patentes de juin 1547, Henri II déclara que l’attribution de Chenonceaux à Diane récompensait les services de Louis de Brézé à titre posthume (!), et qu’il n’avait jamais été inclus dans le domaine royal, ce que contredisait la cession de 1535.
Pour justifier ce
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