FBI
autorise. Frank Wilson est néanmoins prêt à s’occuper de l’affaire avec bienveillance, à ondition que le dossier revienne devant sa cour, ce qui lui semble difficile, voire impossible. Wilson est le type même de juge dont rêve Pat Marcy : il a la réputation d’être un des juges les plus sévères du Palais. Lui faire réattribuer le dossier est pour Marcy le moindre des problèmes.
Quelques jours plus tard, Robert Cooley retrouve le juge dans les toilettes pour hommes de son restaurant et lui propose 10 000 dollars pour s’occuper du dossier. Il lui précise que, une fois qu’il aura accepté, il ne pourra plus faire marche arrière, en raison des enjeux. Le juge en est conscient et prend le dossier. Cooley lui remet une avance de 2 500 dollars.
Prudent, Robert Cooley se tient le plus éloigné possible du dossier ; il fait nommer un avocat en qui il a toute confiance, prend un luxe de précautions pour rencontrer Harry Aleman (le moins souvent possible) et pour communiquer avec le juge (à l’occasion de rendez-vous fixés par des appels passés depuis des cabines publiques).
Robert Cooley avait assuré au juge Wilson qu’il n’aurait aucun mal à acquitter Harry Aleman, tant le dossier lui semblait faible. Mais, dès l’ouverture des débats, rien ne se passe comme prévu. Le juge rencontre Cooley pour se plaindre :
« Tu m’as dit qu’il n’y avait rien dans le dossier. Ce n’est pas vrai, il est en béton ! L’avocat d’Aleman ne fait pas son boulot. Il est catastrophique lors des contre-interrogatoires. Que se passe-t-il ? Il est malade ou quoi ? Je risque ma carrière… »
Au cours de son interrogatoire, le témoin principal a fait forte impression sur le jury quand il a affirmé avoir vu Harry Aleman assassiner William Logan. Au deuxième jour du procès, le procureur parle de subornation et explique qu’un témoignage a été acheté 10 000 dollars. Le juge Wilson devient blême. Une femme qui avait assisté au meurtre a été approchée par le frère de Harry Aleman et a accepté de revenir sur ses déclarations en échange de cette somme de 10 000 dollars. Prise de remords, elle est allée tout raconter à la police, qui a essayé de piéger Aleman ou son frère – sans succès. Rendue publique, l’affaire fait mauvais effet.
Paniqué, le juge Wilson retrouve Cooley dans les toilettes de son restaurant :
« Je suis un juge respectable, dit-il. Je risque ma carrière, je risque de ne pas être réélu, et tout ça pour 10 000 dollars ! »
Cooley calme Wilson et lui promet de demander une rallonge à Pat Marcy. Mais le responsable de la première circonscription de Chicago ne l’entend pas de cette oreille :
« Le juge a dit qu’il ferait ça pour 10 000 dollars. Il n’aura pas un sou de plus. Il ferait mieux de faire ce qu’il a dit, sinon il y aura des conséquences… »
Les auditions tournent à la catastrophe. Le juge récuse les principaux témoins, dont le mafieux qui tenait lieu de chauffeur à Harry Aleman, qui collabore maintenant avec la police et se dit prêt à témoigner contre la « Machine à tuer ». Wilson conteste son témoignage sous prétexte qu’il émane d’un complice.
Le jour du verdict, le 24 mai 1977, Robert Cooley fait sa valise et saute dans sa Lincoln, bien décidé à se tenir le plus loin possible de Chicago. Au bout d’une cinquantaine de kilomètres, il entend à la radio l’annonce du verdict : à la stupeur générale, Aleman est acquitté.
Robert Cooley retrouve Pat Marcy au Councellor Row. Le patron de la première circonscription lui remet deux enveloppes. La plus mince est pour lui : elle contient 3 000 dollars, soit le tiers des frais qu’il a engagés. Dans la seconde, il y a le reliquat de la somme due au juge Wilson.
« Il n’aura pas un sou de plus », répond Pat Marcy après que Robert Cooley lui a fait remarquer que Frank Wilson vient de jeter sa carrière aux orties et n’a pratiquement aucune chance d’être réélu par des électeurs furieux de ce que tout le monde qualifie de déni de justice.
Après avoir prononcé le verdict d’acquittement du tueur de l’« Entreprise », le juge Wilson a quitté le tribunal avec une telle célérité que l’on peut parler de fuite. Le soir même, il dîne avec Cooley dans un grand restaurant de Chicago. À l'issue du repas, les deux hommes s’isolent aux toilettes. Après avoir vérifié que l’endroit est désert, Cooley remet
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