FBI
fréquenter les bookmakers, à commencer par John « Pas de Nez » DiFonzo.
Quand Cooley lance le nom de DiFonzo, les agents du FBI font un bond. John DiFonzo est un des parrains les plus en vue de la ville, on le donne même comme futur dirigeant de l’« Entreprise ». Les agents du FBI ont l’air de ne pas y croire. Cooley leur propose alors d’enregistrer une de ses conversations avec DiFonzo.
Robert Cooley n’est pas très rassuré quand il pénètre dans le bureau de John DiFonzo, un magnétophone Nagra plaqué contre sa hanche par une bande adhésive. À l’insu des agents du FBI, il a emporté son Smith&Wesson. Il sait que, s’il est démasqué, il aura besoin d’autre chose qu’un Nagra pour se défendre. Un de ses clients, parrain de l’« Entreprise », lui avait dit : « Personne ne vient nous voir avec un magnétophone ni ne vit assez longtemps pour raconter son histoire. »
C’est pourtant ce qu’a fait Robert Cooley. En entendant la voix de DiFonzo sortir du Nagra, les agents du FBI ne cachent pas leur joie : en quelques jours, l’avocat a réussi ce qu’aucun de leurs informateurs n’avait osé tenter.
« Petit à petit, se souvient Robert Cooley dans ses mémoires, je m’enfonce dans une double vie, mes habitudes et mon entourage doivent changer. Je vivais dans un appartement aux larges baies, situé au rez-de-chaussée ; j’ai emménagé dans un appartement situé dans les étages, sans vue. J’avais une secrétaire qui travaillait pour moi depuis longtemps, elle était très intelligente et aurait fini par comprendre ce qui se passait ; j’ai dû m’en séparer. Mon associé, un sénateur d’État, n’était pas aussi intelligent, mais je ne voulais pas qu’il soit victime de dégâts collatéraux, alors j’ai dû le contraindre à partir… »
Pourtant, Robert Cooley déchante. Le FBI semble n’avoir nulle intention de le voir s’attaquer aux hommes politiques et aux mafieux qui contrôlent la Première Circonscription. Ses agents traitants le lancent aux trousses de petits bookmakers, de trafiquants à la petite semaine. Il prend alors le taureau par les cornes. Sans prévenir le Bureau, il va trouver Pat Marcy, au Councellor Row, et lui propose d’avoir accès à l’un des dossiers du FBI le concernant. Puis il va voir le FBI et, cette fois, les Agents spéciaux l’autorisent à partir à l’assaut de Pat Marcy et à enregistrer leurs conversations. Commence alors une longue valse-hésitation : pendant près de deux ans, Robert Cooley va tenter, parfois avec succès, de forcer la main à un FBI qui ne semble point trop pressé d’arrêter les hommes qui ont fait main basse sur la première circonscription de Chicago.
Malgré les mises en garde de Robert Cooley, le Bureau se contenterait bien de poursuivre l’opération « Greylord », qui n’a rien changé au système judiciaire du comté de Cook. Cooley s’en était aperçu le jour où le FBI a arrêté des dizaines d’avocats, de juges et d’employés du Palais de Justice après avoir mis fin à l’opération d’infiltration de Terry Hake. Quand il s’assoit à la « table de la Première Circonscription », au Councellor Row, il réalise que, pour Pat Marcy, le jeu est resté le même. « L’opération ne l’a pas effrayé, explique l’avocat. Même après avoir été condamnés, aucun des avocats ou des juges piégés par le FBI n’a osé dénoncer des membres de la Première Circonscription. Les juges qui siégeaient toujours se montraient plus prudents, et Marcy continuait ses affaires comme si de rien n’était. » Comme pour mieux le prouver, peu après l’arrestation des juges visés par « Greylord », Marcy « arrange » le procès d’un assassin présumé.
Robert Cooley est conscient des risques qu’il court. Il sait qu’il sera tué s’il est pris en train d’enregistrer ses conversations avec les responsables de la Première Circonscription. Il y a déjà eu des alertes, comme la fois où son Nagra est tombé de sa botte, alors qu’il s’apprêtait à quitter sa voiture pour rejoindre un mafieux. Il est resté dans son véhicule et a démarré en trombe, à la stupeur de son vis-à-vis. Il s’en est sorti en prétendant qu’il avait vu des policiers. Un mois plus tard, il a rendez-vous avec un des hommes les plus puissants de la Première Circonscription, le conseiller communal Fred Roti. Mais, ce jour-là, en raison d’une alerte, il lui est
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