FBI
1990 ; elle sonne le glas des relations entre le président Clinton et Louis Freeh.
James Smith est le seul responsable du FBI à connaître à fond le dossier Katrina Leung. Au moins cinq superviseurs différents ont suivi ce dossier. Promu à son tour superviseur en 1996, Smith continue à gérer son amie chinoise. Ce n’est pas son supérieur, l’« Assistant Special Agent in Charge » (ASAC) du LAFO, qui pourrait s’opposer à lui : il n’a aucune expérience en matière de contre-espionnage. Smith rédige lui-même les rapports que l’ASAC envoie à Washington. De leur côté, les autres Agents spéciaux de la section « Chine » sont tous mobilisés dans le cadre d’une véritable chasse à l’espion chinois sur tout le territoire américain. Les résultats de l’opération ne sont guère brillants : la traque débouche sur une seule arrestation, celle de Weng Ho Lee, un ingénieur du laboratoire de Los Alamos qui travaille à la fabrication de bombes nucléaires miniaturisées. Une affaire de plus qui « embarrassera » le Bureau, quand la justice ordonnera la libération de Weng Ho Lee après lui avoir présenté ses excuses2.
Avec le départ à la retraite de James Smith, fin 2000, les protections dont bénéficiait Katrina Leung tombent. Les responsables de la section « Chine » du Bureau exhument le rapport de 1990 l’accusant d’avoir communiqué aux Chinois des informations confidentielles sur une opération en cours et sur le programme de contre-espionnage du FBI. Le bureau de Los Angeles rassemble une équipe d’enquêteurs dans le plus grand secret. Au sein du LAFO, la méfiance est telle que toutes les personnes travaillant sur le dossier sont régulièrement soumises au détecteur de mensonges. L’enquête commence en mai 2001. Elle marque un temps d’arrêt après les attentats terroristes du 11 septembre. En décembre, après avoir reçu l’autorisation d’user de « moyens spéciaux » – écoutes téléphoniques, pose de micros, interception du courrier –, les enquêteurs en arrivent à la conclusion que les rapports entre l’Agent spécial et son informateur sont sortis, et de beaucoup, du cadre imposé par le Bureau. James Smith et Katrina Leung sont arrêtés près de deux ans plus tard. « Bons baisers de Pékin », ironise la presse avant de se désintéresser de l’affaire. À l’heure du terrorisme islamique, les taupes ne font plus recette…
Presque tout le monde semble avoir oublié les dizaines et les dizaines d’agents doubles et de traîtres incarcérés dans l’isolement le plus complet dans les prisons américaines de très haute sécurité. Tous les condamnés pour espionnage et intelligence avec l’ennemi sont systématiquement interrogés par l’Agent spécial Richard Ault. Mais, contrairement aux autres officiers en charge d’interrogatoires, Ault s’intéresse plus aux motifs de la trahison qu’à ses conséquences. Il étudie les comportements. Il s’aventure dans un monde où les choses ne sont jamais ce à quoi elles ressemblent. Le monde de la « sauvagerie des miroirs » n’est pas pour lui faire peur. Il appartient à la seule unité du Bureau capable de sonder les âmes les plus ténébreuses : la Behavioral Science Unit, ou BSU.
1- L’auteur de l’ouvrage, John Barron, ancien rédacteur en chef du Reader’s Digest , ignorait encore tout de « Solo ». Il n’apprendra l’existence de l’opération qu’au début des années 1990 et lui consacrera un remarquable ouvrage.
2- Né à Taïwan, en Chine nationaliste, Weng Ho Lee affiche des idées fortement anticommunistes et ne cache pas son hostilité à la République populaire de Chine. Une enquête de routine du FBI révèle qu’il a téléchargé sur son ordinateur 430 000 pages de la banque de données de Los Alamos. Les agents du FBI chargés de surveiller le laboratoire estiment que Weng Ho Lee est un naïf et recommandent les plus grandes précautions. À la suite d’une indiscrétion, l’affaire finit dans le New York Times et Weng Ho Lee est placé en détention. Il fera 278 jours de détention dans l’isolement le plus complet, avant d’être relâché. Contrairement à l’avis du directeur du FBI, Louis Freeh, Weng Ho Lee sera poursuivi pour un délit mineur. Lors du procès, le FBI n’ayant pu fournir de preuve, le juge relaxera le savant en lui présentant ses excuses. Un an plus tard, un tribunal lui octroiera 1,6 million de dollars
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