FBI
alors que l’audience n’a pas encore commencé, il engage la conversation avec un homme qui lui semble familier. Il l’a déjà vu quelque part, mais où ? Il se demande s’il ne s’agit pas d’un agent quand, soudain, il réalise qu’il a bien en face de lui l’un des espions présumés : c’est William Walter Remington, le haut fonctionnaire au Bureau des productions de guerre. Jack Danahy coupe alors court à la conversation.
Les auditions commencent et Danahy se demande toujours où il a déjà vu cet homme. Brusquement, il se souvient : il l’a croisé alors qu’il se baignait à Jones Beach. Sans savoir qui il était, l’homme l’a salué. Poli, l’agent du FBI a répondu.
À la sortie de l’audience, Jack Danahy accoste de nouveau William Walter Remington :
« Vous vous souvenez de moi ? On s’est déjà vu, à Jones Beach… »
« Le monde est petit, conclut Jack Danahy. Un jour, vous rencontrez un type sur une plage, et plus tard vous essayez de le foutre en prison… »
Le 27 novembre 1945, J. Edgar Hoover avait envoyé au président Truman un rapport de 71 pages intitulé « L’espionnage soviétique aux États-Unis », résumant les accusations d’Elizabeth Bentley, de Whittaker Chambers et du transfuge Igor Gouzenko. Hoover savait que le Président refusait de lire sa prose ; il envoya donc copie de son rapport au Procureur général, au secrétaire d’État et à divers responsables d’agences fédérales. Parmi tous les hauts fonctionnaires qualifiés d’espions soviétiques, le plus important était Alger Hiss, numéro deux du Département d’État ; on le donnait même comme possible futur secrétaire d’État. Il était aux côtés de Roosevelt à Yalta. C’est lui qui avait organisé la conférence de Durbanton Oaks qui donna naissance à l’Organisation des Nations Unies, entre le 21 août et le 7 octobre 1944. Comme les autres espions dénoncés par Elizabeth Bentley, Alger Hiss fut placé sous étroite surveillance pendant près de trois ans, sans résultat.
Le 17 août 1948, à New York, la Commission des activités antiaméricaines du Congrès (HUAC) organise une confrontation entre Whittaker Chambers et Alger Hiss. Jusqu’à présent, Hiss niait avoir rencontré Chambers, mais, confronté à lui, il le reconnaît. Il l’a connu dans les années 1930, sous une autre identité. Hiss nie avec force avoir été membre du Parti communiste et met au défi Chambers de répéter ses accusations hors de l’enceinte « privilégiée » de la salle des audits de la HUAC. Une semaine plus tard, Chambers répète ses accusations au cours d’une émission de radio, et Hiss le poursuit en diffamation.
Le 17 novembre, Whittaker Chambers produit 69 documents qu’il présente comme étant des résumés ou des retranscriptions de rapports classifiés du Département d’État que lui aurait remis Alger Hiss en 1938. Il y a là notamment trois manuscrits rédigés par Hiss. Chambers déclare qu’il aurait dû remettre ces documents à un colonel soviétique, Boris Bykov, mais que, étant sur le point de quitter l’organisation, il les a confiés à un avocat new-yorkais. Selon Chambers, les documents manuscrits sont de la main de Hiss ; les autres ont été tapés sur une machine à écrire de marque Woodstock appartenant à Hiss.
J. Edgar Hoover mobilise le Bureau afin de vérifier les accusations de Whittaker Chambers. L’opération « Jaham » commence : tous les bureaux du pays vont y concourir, des milliers d’agents vont passer le plus clair de leur temps à mener cette épuisante enquête. Pendant deux ans, le FBI surveille étroitement Alger Hiss, sa famille, ses proches, ses amis, ses employés de maison, ses baby-sitters, ainsi que toute personne ayant affaire à eux. Les communications téléphoniques sont écoutées, des micros installés chez Hiss et en tout autre endroit où il est susceptible d’avoir des conversations. Une des femmes de ménage de la famille Hiss est recrutée comme informatrice par le bureau de Baltimore. Le Bureau écoute naturellement les conversations entre Hiss et ses avocats, et s’arrange pour faire embaucher l’un de ses informateurs parmi les détectives recrutés par la défense.
Le 4 décembre 1948, les agents du FBI de Baltimore interrogent Alger Hiss. Ils lui montrent les 69 documents invoqués par Whittaker Chambers. Le diplomate donne partiellement raison à Chambers en reconnaissant
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