FBI

Oswald à Mexico.
    Hosty se précipite chez le SAC (« Special Agent in Charge ») de Dallas, Gordon Shanklin. Il l’aime bien, avec son air de professeur d’université, mais il ne l’envie pas. Gordon Shanklin a toujours peur de son ombre. Normal : « C’est pas facile de survivre avec un patron comme J. Edgar Hoover. Il faut tout le temps regarder par-dessus son épaule et être prêt à s’adapter aux changements d’humeur du patron », explique Hosty. Gros fumeur, Shanklin est, comme à son habitude, couvert de cendres de cigarette. Il est pendu au téléphone avec Al Belmont, l’assistant du Directeur en charge des Enquêtes, le numéro trois du Bureau. Hosty tend le dossier de Lee Harvey Oswald à son SAC, qui le lit tout en parlant avec Belmont.
    « Al, dit Shanklin, James Hosty vient d’arriver. C’est l’agent qui travaille sur Lee Harvey Oswald. Il a le dossier avec lui. »
    Shanklin reste silencieux pendant plus d’une minute, écoutant attentivement les instructions de Belmont. Puis il repose l’appareil et ordonne à Hosty de se rendre au quartier général de la police de Dallas afin de prendre part à l’interrogatoire de Lee Harvey Oswald.
    « Belmont veut que tu coopères avec la police : tu leur donnes tout ce que tu as. »
     
    James Hosty sort de sa Plymouth qu’il a garée dans le garage de la police, quand surgit le lieutenant Jack Revill, de la police de Dallas. Les deux hommes ont l’habitude de travailler ensemble sur les affaires d’espionnage, mais ils ne s’aiment pas. Revill a les dents trop longues pour Hosty. Il est proche du groupe d’extrême droite John Birch Society, alors que Hosty vote démocrate. Ils se disputent régulièrement à propos de John Kennedy. Pour Revill, le Président n’est ni plus ni moins qu’un sale communiste.
    Les deux hommes se dirigent vers l’ascenseur, mais renoncent en voyant une équipe de la chaîne ABC essayer d’y faire entrer tout un studio télé ! Ils s’engouffrent dans une cage d’escalier et se retrouvent au milieu de flots montants et descendants de policiers en uniforme et de journalistes en costume. Revill prend Hosty à part :
    « On est sur une piste ; on a interrogé tous les employés du dépôt de livres, sauf un. Un certain Lee. On le cherche.
    – Mon Dieu, Jack, c’est Lee Harvey Oswald. Il a tué Tippit. Il a sans doute aussi tué le Président. Il est là-haut, prêt à être interrogé. C’est un communiste… »
    Perturbé, Revill lance :
    « Si tu savais qu’Oswald a tué Kennedy, pourquoi ne nous l’as-tu pas dit ? Si tu savais qu’il était en ville et que c’était un communiste notoire, pourquoi ne pas nous en avoir avertis ?
    – Jack, je ne pouvais rien te dire. Tu connais la règle du Bureau : tu n’avais pas à le savoir. »
    Le Bureau considérait en effet qu’il n’avait pas à informer les polices locales ou celles des États de ses dossiers de contre-espionnage.
    Revill est fou de rage. Une fois à son bureau, il s’assoit et commence à taper un rapport qui sera lourd de conséquences.
     
    Au troisième étage du quartier général de la police, ça s’agite en tous sens. Les policiers vont et viennent au milieu des équipes de télévision, des photographes, des journalistes qui ont envahi les lieux. Il faut crier pour être entendu. James Hosty se fraie un chemin parmi la foule pour arriver jusqu’à l’agent de liaison du FBI avec la police de Dallas. Le temps de contourner une cohorte de photographes, et les deux agents du FBI retrouvent le capitaine Will Fritz, chef de la brigade criminelle, devant une salle d’interrogatoire.
    «  Allons-y, dit le capitaine en ouvrant la porte, le temps presse… »
    Un homme vêtu d’un jean et d’un tee-shirt blanc, assis, les mains menottées dans le dos, les toise d’un air narquois. C’est Lee Harvey Oswald. On dirait un jeune voyou, songe l’agent du FBI, pris d’une furieuse envie de lui rabattre son caquet d’une paire de claques retentissantes. James Hosty s’installe, sort un carnet, un crayon, et note l’heure. Il est 15 h 30. Il est le seul à prendre des notes.
    « Je suis l’Agent spécial Hosty, déclare-t-il à Oswald. J’appartiens au FBI. Je suis ici pour participer à l’interrogatoire avec la police. Je dois vous dire certaines choses. Vous avez le droit de rester silencieux. Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous par une cour de justice… »
    Oswald