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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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ses fusées. Le candidat républicain, le vice-président Nixon, ne peut demeurer en reste : le 18 octobre 1960, à Miami, il proclame la nécessité d’extirper le castrisme, ce « cancer intolérable ». L’état-major de Kennedy diffuse, en réponse, une note évoquant l’urgence de soutenir « les combattants de la liberté » – une appellation désignant les opposants à Fidel, et qui resservira. Kennedy a été « briefé » par Allen Dulles, le patron de la CIA, sur la préparation d’une « force de guérilla » au Guatemala. Nixon, qui en sait pourtant bien davantage, trouve « irresponsable » la proposition de son adversaire lors de la dernière de leurs célèbres confrontations télévisées, le 21 octobre. Le démocrate, lui, déclare à propos de l’embargo décrété trois jours plus tôt par le gouvernement républicain : « Trop peu et trop tard. »
    Castro feint de se réjouir de la victoire de Kennedy, le 4 novembre. Le
Lider
avait craint que, pour aider « son » candidat, Eisenhower ne lançât une invasion avant l’élection. « Cuba doit d’abord compter sur ses propres forces » devient, à cette époque, un slogan du régime. Fidel a bien perçu que l’Union soviétique l’aidera d’autant plus qu’il se montrera lui-même déterminé. La mobilisation générale devient, dès lors, périodique. Elle est parfois justifiée par une vraie tension ; souvent aussi, c’est une occasion de galvaniser les énergies tout en attirant la sympathie internationale sur le « David cubain menacé par le Goliath américain ». L’ordre est de « défendre chaque maison » ; au cas où La Havane serait prise, la stratégie est de constituer « un réduit oriental ». Fidel dit : « Nous ne voulons pas rompre avec les États-Unis, mais s’ils veulent partir, qu’ils partent. » C’est Eisenhower, de fait, qui décide de couper tous les liens diplomatiques, le 3 janvier 1961.
    Cuba n’est pas encore alliée à l’Union soviétique, mais il y a eu réorganisation de l’économie autour du bloc socialiste. En décembre 1960, on a appris que Moscou offrait d’acheter, l’année suivante, deux millions sept cent mille tonnes de sucre, et que les États-Unis renonçaient à leur quota pour 1961. Les ventes de cette denrée « stratégique » restaient « équilibrés » : 40 % avec les États-Unis, 60 % avec l’Est. Mais la noria des pétroliers et cargos entre Baltique et mer Noire d’une part et l’île caraïbede l’autre va s’accélérant. Le basculement sur le bloc socialiste sera complet l’année suivante, et ce d’autant que la Chine achète un million de tonnes pour 1961.
    Idéologiquement, la proximité est déjà grande. Guevara s’est exprimé à plusieurs reprises sur le sujet. En décembre 1960 s’ouvre la première des douze « écoles d’instruction révolutionnaire », centres de formation de cadres. Le directeur en est Jesus Soto, communiste de toujours, compagnon d’université de Fidel. Le professeur le plus prestigieux en est Carlos Rafael Rodríguez, directeur de
Hoy
, quotidien du PSP. La « bible » sur laquelle on planche est
Fondements du socialisme à Cuba
, de Blas Roca, secrétaire du parti. En un an, vingt mille élèves seront recyclés au marxisme-léninisme. Une ENA mâtinée de Saint-Cyr s’ouvre dans l’ancien collège Belén.
    Tout ceci retient peu l’attention du monde car le
Lider
n’a pas encore émis de doctrine sur le sujet. Pour le bloc socialiste, Cuba est un phénomène étrange mais tout de même sympathique. Khrouchtchev ne semble pas loin d’y voir une source de cette eau de jouvence dont il souhaiterait abreuver son pays. Et, bien entendu, on songe au relais que l’île pourrait fournir vers une Amérique latine jusque-là inaccessible et cependant tentante – à la veille, croit-on, de sa Révolution générale. La fameuse réunion mondiale des PC, à l’automne 1960, à Moscou, roule, pour partie, sur ce thème.
    Diplomatiquement, l’île est à la croisée. Début 1961, sept pays américains ont rompu avec elle : outre les États-Unis, cinq dictatures (République dominicaine, Guatemala, Nicaragua, Haïti, Paraguay), mais aussi le Pérou. Des exilés anticastristes ont, lors d’un raid dans les locaux de la légation de La Havane à Lima, découvert la preuve que l’ambassadeur cubain a alloué trente mille dollars aux communistes péruviens : Ricardo Alonso le reconnaîtra en 1965, après sa défection. Peut-être

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