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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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de 1967, Fidel enfoncera donc ce clou, à l’irritation croissante de l’allié soviétique. Le
Lider
conclut son discours du 13 mars par un cri qui sera répercuté avec espoir par maint gauchiste : « Notre révolution suit sa ligne propre. Elle ne sera jamais le satellite de personne. » Ce n’est certes pas la première fois que Fidel affirme son indépendance. Mais, dans le contexte d’un contentieux avec Moscou, le propos est pris au sérieux.
    « Nous refusons le rôle de pape dont prétend s’affubler Castro. Nous refusons sa prétention d’être le seul à décider qui est révolutionnaire et qui ne l’est pas en Amérique latine », réplique la direction vénézuélienne.
L’Humanité
, jusque-là inconditionnelle de Castro, ouvre ses colonnes à Jesús Faría, secrétaire duPCV. C’est une alerte. Castro concède : « Copier une révolution, c’est comme copier à un examen. » Mais il ne cède rien.
    À compliquer la situation, il y a l’intervention de Pékin dans le débat. La Mecque des communistes en Asie a vivement répliqué aux attaques de Castro depuis le début de 1966. En 1967, elle se déchaîne. Pékin attaque surtout le Che. Son fameux appel, diffusé le 16 avril par l’OSPAAAL, à créer « deux, trois, plusieurs Viêtnam » est catalogué « blanquiste » : il privilégie la « conspiration », négligeant la nécessaire agitation politique. Plus tard, la Chine, pourtant en pleine révolution culturelle, attaquera les «
bravados
qui dirigent Cuba, du type mousquetaires ferrailleurs ». Elle niera toute vertu à la « pensée Fidel », estimant que « l’excellente situation révolutionnaire » d’Amérique latine est due à la « pensée Mao ».
    Une autre cible de Pékin est la thèse de Régis Debray selon laquelle « c’est le fusil qui commande au parti ». De « l’aventurisme », jugent les Chinois. La théorie popularisée par
Révolution dans la révolution ?
, qui sera tiré à trois cent mille exemplaires à travers l’Amérique latine (« Créer une force stratégique mobile, la guérilla, politiquement et militairement autonome, qui n’attendra pas ses ordres des villes où sont installés les états-majors révolutionnaires timorés, mais qui agira en fonction des circonstances changeantes de la lutte en montagne »), eh bien ! pour Pékin, c’est absurde. Ce que Régis Debray reconnaîtra, plus tard, dans sa
Critique des armes
.
    Or, le 20 avril 1967, une rumeur provenant de La Paz se répand : Debray, précisément, a « été tué lors d’une opération antiguérilla en Bolivie ». Le 23 mars, confirmation avait été donnée de l’existence d’un nouveau foyer de guérilla dans ce pays, après un accrochage avec les troupes du général Barrientos. Guevara semble à sa tête. Six jours plus tard, l’ambassadeur de France, Dominique Ponchardier, annonce que le jeune Français est, en fait, détenu à Camiri, dans le sud-est de la Bolivie. Il a été arrêté en compagnie de Ciro Bustos, révolutionnaire argentin, et d’un journaliste britannique.
    L’Hexagone apprend soudain mille détails sur l’universitaire. Debray est né en 1941, il est agrégé de philosophie, disciple d’Althusser. Sa mère est une femme politique, conseillerde Paris dans les rangs conservateurs, et son père un médecin à succès. Il a fait plusieurs voyages en Amérique latine : en 1961 à Cuba, en 1963 au Venezuela. La même année 1963, il a écrit, dans
Les Temps modernes
, « Le castrisme, longue marche de l’Amérique latine ». Puis il s’est installé à Cuba fin 1965, officiellement comme enseignant, au titre de la coopération, en fait invité par Castro, qui lui témoigne de l’amitié, comme le notent les délégués à la « Tricontinentale ». Le mois suivant est publié à La Havane
Revolución en la revolución ?
qui, en 1967, sortira chez Maspero à Paris. Puis Debray disparaît de Cuba.
    Et le voici qui réapparaît en Bolivie. Il devient vite clair que, sans avoir combattu aux côtés du Che, il est plus qu’un reporter venu interviewer l’Argentin, comme le soutient sa famille. Lui-même assume crânement sa « situation historique et non personnelle » ; il s’indigne du « pathétique pour concierges » autour de sa personne. Plus tard, il apparaîtra, à la lecture du journal de campagne de Guevara en Bolivie, assez critique envers Debray, que « Danton » (nom de guerre qu’il lui donne) avait été hébergé un mois à sa base de

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