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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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en 1970, trois milliards et demi de dollars dans les « bas de laine ». On les fait donc sortir. Le nouveau mot d’ordre est : dépensez. Ainsi l’argent retrouve-t-il sa raison d’être : non plus le « fétiche » dit par Guevara, cette chose sale et abominée, il redevient l’instrument d’un ajustement d’une offre à une demande.
    Et le « miracle cubain » se fait lisible. Il a consisté en une amélioration substantielle de la situation d’une minorité – l’essentiel des ruraux, disons 40 % de la population – au détriment d’une majorité, essentiellement urbaine, riche ou aisée, mais dans sa majorité modeste : les ouvriers, protégés, avant 1959, par un syndicalisme puissant. Ce n’est certes pasnégligeable. Mais une telle agitation vibrionnante était-elle nécessaire par surcroît, qui a appauvri le pays entier dans la décennie consécutive ?
    Après l’échec de la
zafra
de 1970, il fallait aussi ouvrir des soupapes politiques afin que le contrôle social ne repose pas uniquement sur la force. Castro s’est placé sous la vigilance des « organisations de masses ». Ce sera le temps de « l’institutionnalisation » du régime, qui culminera en 1975 avec le premier congrès du PCC et, en 1976, avec l’approbation de la Constitution. On verra même Fidel prononcer des discours… écrits.
    La méthode du
Lider
, durant la première moitié des années 1970, où son pouvoir est devenu moins assuré, est d’élargir, sous lui-même et Raúl, le cercle dirigeant, par délégation de pouvoir. Le
Lider
interviendra moins à tout propos. Et il rendra compte à des instances tel le Comité central. En novembre 1972, on assistera à la création d’un comité exécutif près le gouvernement. Des vice-Premiers ministres y superviseront des groupes de ministères. Fidel, Raúl, Dorticós et Rodríguez auront chacun la haute main sur des secteurs précis, et non plus le commandant sur tout. Ainsi, le « vieux communiste » patronnera-t-il les relations économiques avec l’Union soviétique.
    Sous ces quatre « grands », les principaux bénéficiaires de la nouvelle tranche de pouvoir laissée vacante par l’abandon de « l’exclusive Castro » sur le pouvoir seront des officiers. Dans la réorganisation de novembre 1972, cinq des sept membres du nouveau comité exécutif sont des
comandantes
, dont deux
raúlistas
. D’autres officiers, en 1973, renforceront le secrétariat du PC. L’armée elle-même sera réorganisée. On verra apparaître le titre de « général » – qui sera officialisé en 1976, après l’Angola : Raúl deviendra, alors, l’unique « général d’armée »,
El
general
.
    Bien certain que le front politique et économico-social est « chaud », Fidel veut couper court à l’un des premiers modes de contagion : la contestation intellectuelle. Tacticien chevronné, le
Lider
frappe avant qu’elle ne s’amplifie. Est ordonnée l’arrestation, le 20 mars 1971, de Padilla, dont les ennuis avec l’autorité militaire avaient défrayé la chronique en 1968. Il est précisé que les réactions internationales permettront à la Révolutionde distinguer ses « vrais amis » : ceux qui, pour être reconnus tels, ne posent pas de conditions ! Une lettre, respectueuse, est adressée à Fidel par cinquante écrivains, français, espagnols, italiens, latino-américains, parmi lesquels Sartre, Beauvoir, Calvino, Moravia, Cortázar, Fuentes, García Márquez, Vargas Llosa… Il est demandé à Castro « de bien vouloir examiner la situation créée par une telle détention » (celle de Padilla).
    Presque aussitôt, on apprend que le poète a fait son autocritique en prison. Celle-ci est diffusée aux rédactions par l’agence cubaine Prensa Latina.
    Padilla avait écrit dans
Poétique
:
Dis la vérité
    Dis au moins ta vérité
    Et puis laisse faire ce qui peut arriver.
    En prison, Padilla a écrit : « J’ai lutté longtemps avec moi-même avant de prendre la décision de dire toute la vérité. » Accusant sa vanité littéraire et sa fatuité politique, l’auteur de
Hors jeu
s’accuse d’avoir « diffamé chaque initiative de la Révolution ». Ses « fautes » principales sont d’avoir attaqué l’écrivain Lisandro Otero, importante personnalité de la culture officielle, et d’avoir eu des contacts déplorables avec « d’innombrables agents de la CIA » et autres « contre-révolutionnaires », tel l’écrivain exilé Guillermo Cabrera Infante, le «

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