Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
Vom Netzwerk:
départ vers les États-Unis, à partir d’avril 1980, de cent vingt-cinq mille de ses nationaux. L’affaire montre l’ampleur du malaise d’une partie non négligeable de la population et ternit l’image du pays. Le régime a paru surpris de cette crise. Les signes avant-coureurs en étaient pourtant perceptibles. Tout d’abord, après les bonnes années du milieu de la décennie 1970, l’économie est entrée dans une phase de
stop and go
. En 1979, la situation est devenue sévère. Le premier Plan quinquennal a, en fait, été révisé à la baisse dès1976, année de sa mise en œuvre. Il ne sera rempli qu’aux deux tiers. Malgré d’excellentes
zafras
en 1977, 1978 et 1979, l’économie va stagner. Sans doute la population, à qui les réformes du début des années 1970 avaient redonné du tonus, recommence-t-elle à souffler. Fidel dénonce ce relâchement dans un discours devant le Comité central, le 27 décembre 1979 : « Indiscipline, irresponsabilité, absentéisme, négligence, copinage », mais aussi « médiocrité des administrateurs, corruption des cadres ». Un discours vieux comme la révolution !
    La comparaison du niveau de vie insulaire avec celui des États-Unis, rendue possible par l’afflux, en 1979, de plus de cent mille exilés venus revoir leurs parents, a eu un effet dévastateur. Et ce n’est pas la proposition, alors formulée par Castro, d’envoyer dix mille compatriotes abattre du bois en Sibérie pour accélérer la construction de logements qui va dynamiser les masses. L’existence de trois milliers de prisonniers libérés en 1979 et se retrouvant sans travail ni visa de sortie crée aussi un sérieux malaise.
    Fin 1979, on voit à nouveau apparaître des tracts, des affiches, des inscriptions hostiles au régime. Des incendies criminels éclatent dans la ville. Fidel limoge, le 15 décembre, le ministre de l’Intérieur, Sergio del Valle, en poste depuis 1968. Il le remplace par le dur des durs Ramiro Valdés. Multiplication des contrôles, relance du zèle des CDR, rafles de présumés « délinquants » : les choses reviennent dans l’ordre. Mais, dans certaines usines, des amorces de syndicats libres ont fleuri. Le régime n’hésitera pas à faire fusiller au moins cinq personnes qui avaient partie liée avec cette revendication inouïe.
    Le 11 janvier 1980, raz-de-marée politique sans précédent depuis 1959 : Fidel change neuf de ses ministres, plus du tiers. Nombre des exclus le sont pour incompétence, tel le responsable des Transports, Antonio Lussón, à qui le
Lider
impute l’état lamentable de la flottille des
guaguas
(autobus) de la capitale. Les secteurs économiques essentiels reçoivent de nouveaux responsables : l’agriculture, le sucre, la santé, l’industrie, la pêche, les mines, le commerce extérieur, le travail, la construction. On voit réapparaître, outre Ramiro Valdés, des « politiques » tels le combattant paysan Guillermo García et « le vieux communiste » Arnaldo Millán, en lieu et place detechnocrates surgis dans les années 1970. Certains sont d’ailleurs placés à des postes où leur compétence est en principe avérée, tels Sergio del Valle, qui est médecin, recasé à la Santé, et l’ex-président Dorticós, qui est avocat, à la Justice.
    Fidel en profite, début 1980, pour renforcer ses pouvoirs au sein du gouvernement : il attache directement à lui désormais les Forces armées, l’Intérieur, la Santé et la Culture. Mais, le jour du grand chambardement ministériel, meurt, d’un cancer, Celia Sánchez, la compagne de la Sierra, l’admiratrice fervente, mais non béate, la maîtresse, la mère de substitution et la secrétaire générale – la seule qui avait réussi à introduire un peu de discipline dans la vie de Fidel. Le
Lider
, rapporte-t-on, en est « dévasté ».
    À la crise économique Fidel ne réagit pas comme son tempérament le lui suggérerait : par un renforcement de la centralisation, de la planification, des contrôles et de l’étatisation. Au contraire, on accentue la formule du début des années 1970 : injection d’un peu de « privé », tels les « marchés paysans », découverts par Cuba vingt ans après l’Europe communiste ; relance des possibilités de consommation par le renforcement du secteur « libre », cher mais approvisionné ; ouverture de l’espace accordé à un petit artisanat ; élargissement de l’éventail des salaires ; confirmation de

Weitere Kostenlose Bücher