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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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1980, les voyageurs avaient noté le retour de la prostitution auprès des touristes – dont l’éradication, dès 1959, avait été la grande justification morale de la Révolution. Deux différences, cependant, avec cette époque : les clients ne sont plus américains, mais européens ou canadiens ; mais, surtout, les filles (rebaptisées
jineteras
, ou « écuyères »), et aussi parfois les garçons, sont désormais de toutes origines sociales, puisqu’il ne s’agit pas de vice mais du besoin impérieux d’assurer le pain quotidien. La pratique est bel et bien entrée dans les mœurs, après une valse-hésitation de Fidel sur le sujet. La honte ressentie de cet état de choses par les familles n’en reste pas moins terriblement forte.
    Cependant, d’autres formes de néopaupérisation sont depuis peu apparues à La Havane : celle des mendiants (dits
andrajosos
, ou « guenilleux », que l’on voit aux portes des magasins et aux arrêts de bus), ainsi que celle des
buzos
(« scaphandriers, plongeurs »), nouveau métier (car il y faut payer patente) consistant à fouiller les poubelles des quartiers les plus riches de l’ouest de la capitale…
    Sur ce fond sombre, la NEP (nouvelle économie) raúliste a commencé, en 2008, par une annonce sensationnelle, au moins dans le contexte : les téléphones portables et les ordinateurs seront autorisés à la vente ! C’était là, au demeurant, un signal en partie à usage externe : investisseurs de tous les pays, les choses changent à Cuba ! Bien plus important, et conforme à une ancienne priorité de bon sens du cadet des Castro : on allait mettre de nouvelles terres (et, pour une fois, des crédits) à la disposition des paysans encore en activité (100 000 hectares ont été livrés). Et, très vite, ceux-ci seront admis à vendre leurs produits aux hôtels.
    Mais c’est en 2009 qu’ont été annoncées les premières mesures socio-économiques conformes à la nouvelle nécessitéselon Raúl. Elles attentent de plein fouet au dogme de la construction révolutionnaire selon Fidel : la gratuité d’un maximum de services comme base de l’égalité des Cubains. Le gouvernement a ainsi fait connaître que vingt-cinq mille « cantines ouvrières » seraient fermées. Par ailleurs, la
libreta
, le « carnet de rationnement » créé en 1962 et devenu étique depuis 1990, allait être délestée de plusieurs produits (dentifrice, savon, détergent…), tandis que les autres subiraient une augmentation de leurs prix – en attendant leur disparition envisagée. L’objectif visé par ces mesures est, bien sûr, de « réduire les énormes dépenses sociales », en partie représentées par l’importation de ces produits alimentaires quasiment donnés à tous. Des décisions ultérieures ont visé à éliminer des « gratuités indues » (dans les transports…). On a aussi annoncé une réduction de l’accès aux études supérieures – qui ont produit « trop de diplômés » (d’où l’exportation de médecins…). Et l’âge de la retraite a été élevé de cinq ans : soixante-cinq pour les hommes, soixante pour les femmes.
    Cependant, la consécration de Raúl Castro, au début de 2008, a produit de premiers bons effets sur le plan international. Le Venezuela, qui a été gratifié du premier déplacement du nouveau chef d’État cubain, a renouvelé pour dix ans l’accord pétrole contre médecins, vital pour la survie de l’île. De ce point de vue, la victoire électorale d’Hugo Chávez, le 7 octobre 2012, est la plus heureuse nouvelle, politique et surtout économique, que Cuba ait reçue depuis l’intronisation du général. Elle garantit en effet, au moins pour le temps que Dieu prêtera vie au président vénézuelien (il se rend régulièrement à La Havane pour y faire soigner son cancer), le maintien de l’accord de troc économique pétrole contre médecins et autres personnels (environ quarante mille Cubains sont engagés dans les « missions » sociales du gouvernement de Caracas), qui met à la disposition de l’île, à des conditions vraiment très favorables, les deux tiers de ses besoins énergétiques (115 000 barils par jour) et représente environ 40 % du total de ses échanges, soit 6,2 milliards de dollars. L’adversaire de Chávez, le 7 octobre, le conversateur Enrique Capriles, avait assuré que la révision de ce traité serait une de ses priorités s’il était élu…
    L’autre grand partenaire de Cuba, la

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