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Fiora et le Magnifique

Fiora et le Magnifique

Titel: Fiora et le Magnifique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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satisfaisait pas, prétendait, à mots couverts
bien sûr, que les restes de Luca Pitti, assassiné par les gens des Médicis,
étaient enfouis sous son palais inachevé et, comme les légendes ont la vie
dure, les femmes se signaient en passant devant les murs énormes et les grandes
arches vides qui ouvraient les yeux aveugles de leurs fenêtres rectangulaires
sur des profondeurs obscures. Personne ne se fût avisé de venir chercher l’une
de ces pierres abandonnées que l’on disait maudites. Cela durait depuis
trente-cinq ans...
    Pourtant
Démétrios entraîna sa compagne droit vers le chantier délaissé sans se laisser
impressionner par la crainte qu’elle manifestait.
    – Une
fille dont l’esprit a été éclairé par la lumière grecque ne se laisse pas
troubler par une sotte légende ! lui dit-il en manière de réconfort...
    L’un
tirant l’autre, ils contournèrent le palais, trouvèrent l’ébauche d’un jardin
qui aurait dû s’étendre sur une colline puis s’engouffrèrent dans l’une des
portes qui n’avaient jamais reçu de vantaux. Tâtonnant dans l’obscurité,
Démétrios repéra un mince rai de lumière filtrant sous un assemblage de
planches et alla y frapper selon un code particulier. A l’intérieur, une voix
rocailleuse demanda :
    – Qui
est là ?
    – Mendici ! [xiv]
    Ce qui
tenait lieu de porte s’ouvrit, découvrant ce qui aurait dû être une pièce de
service. La lumière provenait d’un petit feu allumé au milieu, à même le sol de
terre battue. Quant à celui qui accueillait les arrivants, c’était un petit
homme squelettique dont le visage parcheminé s’ornait d’une barbe maigre et s’encadrait
de longs cheveux gris. Il jeta un rapide coup d’œil à ses visiteurs puis
retourna s’accroupir auprès de son feu pour remuer quelque chose dans un pot d’argile :
    – Tu
as réussi, à ce que l’on dirait ?
    – Oui.
Grâce à toi, Bernardino. Mais il était temps. J’ai dû tuer Pietro Pazzi. C’est
lui qui avait fait enlever Fiora et il allait l’étrangler quand je suis arrivé.
A l’heure qu’il est la Pippa et son frère doivent être en train de le jeter
dans l’Arno avec quelques pierres pour l’empêcher de remonter.
    – Une
mauvaise graine de moins ! approuva le vieillard. Quant à toi, jeune
fille, sois la bienvenue ! Tu es chez un ami... et d’ailleurs tu me
connais car tu m’as souvent fait la charité.
    Elle
se souvenait, en effet, de ce vieil homme qui mendiait toujours près des portes
du Duomo en chantonnant une vieille complainte...
    – Je
te remercie, dit-elle, mais... je te croyais aveugle et sourd ?
    Il rit
doucement puis expliqua avec fierté qu’il fallait une grande expérience pour
apprendre à ne montrer que le blanc des yeux mais qu’il n’était pas difficile d’être
sourd.
    – A
présent, tu peux dormir un moment car tu dois en avoir besoin. Voici mon lit,
ajouta-t-il en désignant l’un des tas de chiffons qui servaient de meubles à sa
demeure. Quand le coq chantera, je t’éveillerai...
    – Tu
m’accueilles chez toi et, de ce fait, tu risques ta vie. Je suppose que tu le
sais ?
    – Je
risque moins que tu ne l’imagines, fillette. Ne t’arrête pas au misérable décor
où je vis car je dispose d’une puissance qui ferait envie à bien des princes.
La confrérie des mendiants, la plus nombreuse qui soit, se reconnaît, tout
autour de la Méditerranée et au-delà par ce seul mot Mendici ! et
moi je règne sur ceux de Florence : les estropiés vrais ou faux, les
coupeurs de bourse, les mendiants de tout poil. Cela fait une armée dont les
coups, pour être portés souvent dans les ténèbres, n’en sont pas moins
redoutables. Quand une émeute gronde, nous sommes toujours au cœur de l’agitation.
    Mais,
vois-tu, cette vie qui m’est chère, je la dois à l’homme qui t’accompagne car
son savoir m’a sauvé. Et Bernardino paie toujours ses dettes ! ... Dors à
présent et ferme tes oreilles car nous avons à causer, le Grec et moi-Étendue
sur le tas de chiffons malodorants comme sur les coussins les plus doux, Fiora,
oubliant son corps égratigné et sa gorge douloureuse sombra presque aussitôt
dans un profond sommeil. A quelques pas d’elle, accroupis l’un en face de l’autre
de chaque côté du feu comme d’étranges oiseaux nocturnes, le médecin grec et le
roi des mendiants s’entretinrent à voix basse de leurs souterraines affaires
jusqu’aux abords de

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