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Fiora et le Pape

Fiora et le Pape

Titel: Fiora et le Pape Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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pouvait avoir treize
ou quatorze ans, derrière laquelle une grande femme vêtue comme une dame de la
cour se tenait debout, les mains sur son giron dans une attitude pleine de
dignité. Quant à la fillette, Fiora, apitoyée, pensa qu’elle n’avait jamais vu
adolescente plus disgraciée... ni plus imposante. Sous le velours bleu paon de
la robe brodée de menues fleurs de lys d’argent, les épaules paraissaient
inégales, le corps contrefait. Le visage, au nez trop grand, à la bouche triste
et aux yeux légèrement globuleux, semblait s’être trompé de corps et appartenir
à une femme beaucoup plus âgée. Mais que ce regard brun, presque douloureux,
avait donc de douceur et de lumière ! Ne sachant que dire tant cette
fillette l’impressionnait ; Fiora hésitait sur la conduite à tenir quand
la dame qui accompagnait la renseigna, non sans une certaine sévérité.
    – Inclinez-vous,
Madame ! C’est Madame Jeanne de France, duchesse d’Orléans, qui vous fait
l’honneur de vous adresser la parole !
    Fiora,
confuse, plongea aussitôt dans sa révérence. Ainsi cette enfant était la plus
jeune fille du roi, celle que, l’an passé, il avait obligé le jeune duc d’Orléans
son cousin à épouser en confiant cyniquement à l’un de ses proches qu’il tenait
à ce mariage parce que les enfants des jeunes époux « ne leur coûteraient
guère à nourrir ». Une façon comme une autre d’en finir avec la branche
rivale du vieux tronc capétien. Péronnelle avait, un soir d’hiver, raconté l’histoire
avec force détails et force soupirs, et ses auditrices n’avaient pu démêler qui
elle plaignait le plus, du jeune duc d’Orléans que l’on disait beau et bien
fait, contraint d’épouser un pareil laideron, ou bien de la pauvrette que son
sang royal ne sauvait pas de la pire des humiliations : celle d’être
imposée de force à un garçon dont on disait qu’elle l’aimait de tout son cœur.
Elle avait vécu son enfance au château de Linières, en Berry, où personne, pas
même sa mère, ne venait la voir et, depuis son mariage, elle y était retournée,
confiée à la garde des Linières qui l’avaient élevée [vii] . Il était bien
rare qu’on la vît dans les demeures royales qu’elle n’aimait pas, d’ailleurs,
car elle savait que sa présence n’y était pas désirée.
    – Madame,
murmura Fiora, je supplie Votre Altesse de me pardonner mon ignorance. Quant à
la colère du roi notre sire, croyez bien que je la redoute autant que
quiconque, mais je souhaite lui faire entendre des faits d’une si grande
urgence...
    – Que
vous êtes prête à braver tous les courroux du monde, même le sien ? Me
direz-vous qui vous êtes ? Si je vous avais déjà rencontrée, je m’en
souviendrais car vous êtes bien belle. Vous êtes étrangère, peut-être ?
    – De
Florence, Madame. Je m’appelais Fiora Beltrami et...
    – Ah !
Je sais qui vous êtes ! On m’a parlé de vous ! s’écria Jeanne avec un
sourire charmant qui lui rendit son âge et illumina son visage ingrat. Le roi
mon père vous tient en grande estime et amitié. Mais... êtes-vous en deuil ?
    – Oui.
De mon époux, le comte Philippe de Selongey, mis à mort il y a deux mois à
Dijon, pour rébellion. Il était... familier du défunt duc Charles.
    – Oh !
Pardonnez-moi si je vous ai blessée, vous devez être très malheureuse. C’est
vous qui habitez le manoir de La Rabaudière ?
    – Oui.
Et je souhaitais que notre sire me permette de le lui rendre. Je viens d’avoir
un fils et...
    – N’expliquez
rien. Je crois que j’ai compris. J’ai peu de crédit, hélas, et ne puis vous
être d’un grand secours. Tout ce que je peux vous offrir, c’est un conseil, si
vous voulez bien l’accepter.
    – Avec
reconnaissance, Madame.
    – N’affrontez
pas mon père en ce moment ! Il est revenu encore tout bouillant de cette
difficile reconquête des pays du Nord. Vous voyez, il n’a pu tenir en place
plus de quelques heures. Laissez-lui le temps de retrouver sa sérénité... et
surtout sa sagesse. Dans quelques jours tout ira mieux et vous pourrez parler
avec lui. Mais je vous en conjure, faites très attention.
    – Pourquoi ?
    – Parce
que vous allez sans doute l’offenser. Il lui est déjà arrivé de reprendre un
présent si celui qui en avait été l’objet l’avait déçu, mais je crois que,
jamais, quelqu’un ne lui en a rendu un spontanément. Il se peut qu’il

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