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Fiora et le Téméraire

Fiora et le Téméraire

Titel: Fiora et le Téméraire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Suisses
tiennent leur parole et égorgent tout ce qui leur tombe sous la main. Il en
aurait fait autant s’il avait vaincu. C’est un monstre assoiffé de sang...
    Il
aurait pu parler longtemps ainsi mais Fiora ne l’écoutait pas. Elle regardait
avec dégoût briller la petite fiole au bout des doigts du Grec.
    – Non.
Jamais tu ne feras de moi une empoisonneuse ! Je te l’ai déclaré à
Florence, le poison est une arme ignoble.
    – Soit !
soupira Démétrios en posant le minuscule flacon sur une table. Tu peux employer
tel moyen qui te plaira mais sache ceci : c’est seulement quand le
Téméraire aura cessé de vivre que je te rendrai ton mari.
    – Mon
mari ? ... Philippe ? Philippe serait encore vivant ?
    – Oui.
J’étais à Grandson moi aussi – sans le duc René pour une fois. J’ai trouvé
Selongey sur le champ de bataille. Je l’ai relevé, soigné... et caché en un
lieu où tu ne saurais le retrouver sans mon aide.
    – Philippe
vivant ! ... Mon Dieu ! Il vous arrive donc parfois d’entendre une
prière et de l’exaucer ? ...
    – Laisse
donc Dieu où il est ! Le temps presse. Il faut que le Téméraire
disparaisse, tu entends ? ... Tu peux penser de moi ce que tu veux, mais
tu es la seule qui puisse l’approcher. Alors agis ! Il faut qu’il meure...
    Brusquement,
Fiora recouvra tout son sang-froid. Fièrement redressée, elle toisa celui qu’elle
avait cru si longtemps son ami :
    – Quel
homme es-tu donc, Démétrios Lascaris, pour oser employer pareil moyen ? Ta
haine aveugle ne te permet plus de juger sainement et j’ai l’horreur à présent
de ce sang que tu as mêlé au mien...
    – T’est-il
donc si cher, ce Selongey dont tu sais pourtant bien qu’il t’a oubliée.
Souviens-toi de la jeune femme...
    – La
veuve de son frère aîné mort voici des années. Encore que je ne discerne pas en
quoi cela te regarde. Va ton chemin et laisse-moi suivre le mien.
    A cet
instant, deux hommes pénétrèrent ensemble dans la tente. L’un était Panigarola,
couvert de boue et de sang, l’autre un jeune homme blond et mince, aux yeux
bleus, portant sur son armure une tunique de drap d’or marquée d’une double
croix blanche dont les manches étaient à ses couleurs, blanc et rouge. Voyant
Démétrios mettre genou en terre devant lui, Fiora comprit que c’était le duc
René...
    – Elle
est ici ! s’écria le Milanais en courant prendre Fiora par la main.
Monseigneur, voici la jeune femme dont je vous ai parlé et, grâce à Dieu, elle
est toujours vivante !
    – Vous
m’en voyez ravi, messire Panigarola. En vérité il eût été dommage qu’il arrivât
malheur à une aussi jolie dame... et je comprends que vous ayez pris tant de
risques pour la retrouver...
    – Le
risque n’était pas si grand, monseigneur, dès l’instant où j’ai reconnu votre
bannière. Je savais que vous feriez respecter la mienne.
    – Où
irions-nous si nous nous mettions à présent à exterminer les diplomates ? Allez
en sûreté maintenant. Mon banneret et quatre cavaliers vont vous reconduire
hors d’ici... Je vous salue, madame, et j’espère sincèrement qu’il me sera donné
de vous revoir... dans des circonstances moins tragiques...
    Sans
répondre, Fiora plia le genou devant René et sortit sans un regard pour
Démétrios...
    Mais
ce qu’il lui fallut traverser ensuite lui mit le cœur au bord des lèvres.
Partout on égorgeait, on assommait, on tirait des flèches sur les malheureux
qui essayaient de fuir par le lac. C’était une effroyable vision, un enfer
abominable et elle finit par fermer les yeux très fort en appuyant ses deux
mains sur ses oreilles pour ne plus entendre les cris et les râles d’agonie,
laissant Panigarola qui avait saisi la bride de son cheval le conduire en même
temps que le sien. C’est seulement quand elle entendit faiblir ces affreuses
plaintes qu’elle comprit que l’on s’éloignait du champ de mort.
    – Vous
pouvez ouvrir les yeux, dit calmement le Milanais, nous sommes seuls...
    Elle
obéit et s’efforça de lui sourire mais cet effort méritoire ne donna pas grand
résultat.
    – Comment
vous remercier ? Vous êtes revenu pour moi dans cet enfer ?
    – J’étais
le seul à pouvoir le faire. Le duc a pu fuir entouré de quelques lances. Jamais
je ne l’ai vu aussi éperdu, presque hagard... Je crois qu’il se serait laissé
tuer sur place si plusieurs chevaliers ne l’avaient entraîné... Mais pensons

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