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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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y as si bien dit que j’t’ai vu à genoux devant
Jean Nib, et que je l’ai vu, lui, sauter par-dessus la palissade
comme s’il avait eu trente-six mouches derrière lui : il
filait à la Pointe-aux-Lilas, tiens !
    Zidore poussa un faible gémissement. Il se
sentait perdu : tous les
témoins
étaient à
charge.
    – À toi, le Rouquin ! reprit
Biribi.
    – Dame ! fit le Rouquin, quéqu’tu
veux, mon pauv’ Zidore ! On peut pas dire que tu y as rien dit
puisque tu y as dit ! À preuve que la Tête-de-Veau et moi,
nous avons pris un mêlé-cass et que j’ai dit à la
Tête-de-Veau : « Va y avoir du pet à la Pointe-aux-Lilas,
mais si jamais Biribi sait que Zidore a mangé le morceau, ah !
malheur !… »
    – C’est bon ! fit Biribi. Y a pas
d’erreur.
    Et Biribi, les lèvres troussées par son
ricanement, les yeux sanglants, abattit sa poigne énorme sur le cou
du pauvre diable.
    – Marche ! gronda-t-il.
    Et, dans cette seconde, rien n’eût pu
l’empêcher de tuer. Il eût tué pour le plaisir de tuer. Il devenait
la personnification de la hideur excessive ; les rares et
amorphes sentiments humains qui pouvaient ramper à l’état de larves
dans ce cerveau s’évanouissaient :
    il n’était plus que la brute, l’anthropoïde
rué sur une proie, le gorille énorme éprouvant la joie ténébreuse
de la destruction…
    Il poussait Zidore devant lui, vers la porte
du fond, et les escarpes trépignaient, leurs femelles se penchaient
pour mieux voir la tête livide et déjà cadavérique de l’infortuné
qui, dans l’effondrement de toutes ses forces, n’avait plus qu’une
plainte ininterrompue :
    – Miséricorde !… mes amis… non…
c’est pas possible… miséricorde…
    Il disparut dans le terrain vague, Biribi
derrière lui. Une seconde encore, on entendit ses grognements
plaintifs, puis un grand cri, puis quelques râles brefs puis plus
rien…
    Biribi reparut…
    Son mufle se tendait comme s’il eût cherché
une nouvelle victime, ses narines reniflaient ; il était
épouvantable, ramassé, grondant quelque chose qui devait être un
rire de satisfaction, le couteau rouge au poing, Si épouvantable
qu’un silence tragique s’abattit soudain sur la bande.
    À ce moment, le sifflet de la sentinelle
déchira la nuit.
    – La rousse !… La rousse !…
    Il y eut une rapide dislocation de cette
troupe fantastique, des jurons, une ruée d’ombres aux apparences
chimériques, un grand souffle de terreur qui balayait la salle, et
puis, au dehors, dans la nuit, sous la pluie battante, des
glissements confus de choses fuyantes…
    Biribi était demeuré à la même place, son
couteau au poing. Il ricana :
    – Ce n’est pas la rousse. C’est un pante.
Tas de lâches ! Ils n’ont même pas reconnu le sifflet…
    Il essuya tranquillement son couteau, le
ferma, le mit dans sa poche, et alors, il s’aperçut que trois ou
quatre des escarpes étaient restés dans la salle, le Rouquin,
Tête-de-Veau… sans compter le garçon, Coco, à demi-mort de terreur.
Biribi le secoua :
    – Un litre de raide, gronda-t-il. Et plus
vite que ça !…
    Le garçon fit un effort, parvint à se mettre
debout, et. flageolant sur ses jambes, alla chercher un litre
d’eau-de-vie qu’il plaça devant Biribi et ses compagnons réunis à
la même table.
    À ce moment, la porte qui donnait sur la route
s’ouvrit, et un homme entra en disant :
    – Bonsoir, la compagnie. Garçon,
ajouta-t-il, en frappant sur la table à laquelle il s’assit, une
tasse de café, si vous en avez…
    Biribi considéra un moment le nouveau venu
avec une sorte de stupeur ; puis, brusquement, il éclata de
rire.
    – Ça, dit-il, c’est farce. Ohé ! les
aminches, vous allez voir du nouveau !… (Il s’approcha du
client qui, de son côté, le voyait venir en souriant.) Est-ce que
mossieu me reconnaît comme je le reconnais ? ricana-t-il.
    – Parfaitement, mon brave. Vous êtes le
cocher à qui j’ai eu l’honneur de donner une leçon de politesse au
fond de la rue Letort… Enchanté de vous revoir en bonne santé.
    L’homme qui parlait ainsi releva vers la
colossale brute une tête fine, narquoise et paisible. Il était vêtu
simplement et même pauvrement ; mais, à ce costume d’emprunt,
qui pouvait être celui d’un employé dans la misère, ses attitudes
donnaient une sorte de grâce et d’élégance.
    Cet homme, c’était Ségalens, Anatole Ségalens
qui, tantôt accompagné de Max

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