Fleurs de Paris
pioncer chacune dans votre dodo. Moi, je veille.
Je dormirai le jour. Mais, la nuit, faut que je sois d’attaque.
C’est ainsi que Rose-de-Corail et Marie
Charmant se trouvèrent installées dans la villa, dont les étages
inférieurs étaient occupés par Lise et Magali.
*
* * * *
Quelques jours se passèrent. Marie Charmant et
Rose-de-Corail s’étaient accoutumées à ce nouveau genre
d’existence. Jean Nib se reposait quelques heures dans la journée
et, la nuit, montait une garde consciencieuse.
Un matin, une voiture s’arrêta devant la
grille. Ce matin-là, c’était celui qui suivait la nuit où Charlot
avait dévalisé le prince d’Olsteinburg.
De cette voiture descendirent deux hommes qui
étaient Max Pontaives et Gérard d’Anguerrand.
Gérard d’Anguerrand avait été trouver Max
Pontaives rue Roquépine, et lui avait dit :
– Cher ami, je viens vous remercier de
l’hospitalité que vous avez bien voulu donner à la comtesse de
Pierfort…
La comtesse de Pierfort ? fit Pontaives
stupéfait.
– Cette jeune fille que vous avez
accueillie dans votre villa de Neuilly avec une bonne grâce que je
n’oublierai jamais. C’est la comtesse de Pierfort… une parente à
moi…
Max de Pontaives eut un sourire.
– Vous pouvez me croire, reprit
Gérard ; il y a sous toutes ces apparences une histoire que je
vous raconterai quelque jour… quand je reviendrai à Paris,
ajouta-t-il avec un soupir.
– Vous nous quittez donc ?
– Je vais m’enterrer à Prospoder pour
quelque temps, et puis je voyagerai sans doute. L’essentiel est que
mon parent, le comte de Pierfort, est à Paris, et que me voilà
délivré, de la périlleuse tutelle que j’avais assumée, et que, du
même coup, vous voici délivré aussi. Vous verrez Pierfort. C’est un
garçon charmant… il me ressemble un peu… au physique, pas au
moral ! Je lui ai dit l’obligation qu’il a contractée
vis-à-vis de vous, et il viendra vous remercier.
– Mais, mon cher baron, je suis tout
remercié par le plaisir que j’ai eu à vous rendre ce léger service,
à vous et à la comtesse… Hum !… Ainsi, vous l’aviez en
garde ?…
– Le mari lui-même vous le dira et vous
racontera par suite de quelles circonstances, tandis qu’il était
retenu en Normandie, la comtesse a dû se cacher quelques jours à
Paris. Seulement, cher ami, je vous demanderai un dernier service.
Vous êtes relevé de votre serment de discrétion, puisque moi-même
je raconte le fond de l’affaire ; mais vous seriez vraiment
gentil d’ébruiter le moins possible cette histoire, où le bon renom
de la comtesse pourrait se trouver en jeu…
– Vous aviez déjà ma parole vous l’avez
plus que jamais.
– Vous êtes un vrai gentilhomme… À
propos, voici les cent louis que vous avez eu l’obligeance de me
prêter le jour où je me trouvai réduit par de ridicules
circonstances au rôle de mendiant… M’accompagnez-vous à votre
villa ?
– Comment donc ! avec le plus grand
plaisir !… Mais, dites-moi, est-ce que votre parent le comte
de Pierfort vient avec nous ?
– Non Il arrive tout à l’heure à midi, et
se rendra tout droit à son hôtel de l’avenue de Villiers. Je tiens
beaucoup à ce qu’en arrivant il trouve sa femme tout installée et
l’attendant…
– Je comprends…
– Non, vous ne comprenez pas, mon cher,
fit Gérard avec un étrange sourire. Il n’y a rien de tout ce que
vous pouvez supposer en ce moment… Plus tard, vous saurez…
Les deux hommes montèrent en voiture et, un
quart d’heure plus tard, arrivèrent à la villa.
Lorsque Gérard se retrouva en présence de
Lise, il éprouva un tremblement de joie profonde. Dans ces quelques
journées où, avec l’audace forcenée d’une sorte de désespoir, il
avait risqué tout pour se procurer de l’argent, il avait vécu dans
une morne terreur, avec cette intime conviction qu’il ne
retrouverait plus Lise…
Elle était là !…
– Lise, dit Gérard en tremblant,
êtes-vous prête à me suivre ? L’abri momentané que vous avez
trouvé ici ne peut plus vous convenir.
Où tu voudras que j’aille, j’irai. Où tu
croiras que je doive rester, je resterai.
– Venez donc… Mais, quoi que vous
puissiez voir ou entendre, promettez-moi de ne pas vous étonner, de
ne pas me mal juger… Lise, ô ma Lise adorée ! ajouta-t-il,
emporté par la passion, tu le sais, ou si tu ne le sais pas, ton
cœur te le dit : tout ce que je
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