Fleurs de Paris
possible que je sois
obligé de reculer de quelques jours la visite où j’aurai l’honneur
de vous apporter mes remerciements.
« En attendant que j’aie ce grand plaisir
de vous connaître et de vous remercier, veuillez donc me tenir dès
cet instant pour
« Votre très reconnaissant et très
obligé.
« Comte de PIERFORT. »
Sur l’enveloppe, Gérard écrivit :
À
monsieur Max Pontaives, en sa villa de Neuilly
.
Puis il se tourna vers Pierre Gildas et lui
tendit la lettre en lui disant :
– Voilà. Vous porterez ça demain, et vous
remettrez vous-même en mains propres… Au fait, quelle heure
est-il ? Dix heures et demie à peine… Avec un taxi, vous
arriveriez pour onze heures… Je suis sûr qu’il serait temps encore,
et je tiens à ce que ce mot parvienne au plus tôt.
– J’y vais, monsieur le comte, dit Pierre
Gildas.
– Oui, au fait… Neuilly n’est pas
loin…
– Neuilly ? fit Pierre Gildas d’une
voix étranglée, sans songer à regarder l’enveloppe.
– C’est l’une des dernières maisons de la
rue de Seine, un endroit désert qui touche au fleuve… une très
belle villa…
L’assassin tremblait. Son visage décomposé
s’inondait de sueur.
Il fit un effort terrible et parvint à
bégayer :
– Il n’y a personne dans cette
maison…
– Vous confondez avec la villa où le
marquis de Perles a été assassiné ces jours-ci, dit Gérard d’une
voix très calme et très naturelle.
L’assassin chancela sur ses jambes. Il jeta un
regard flamboyant sur Gérard et, la voix rauque, la gorge en feu,
oubliant toute marque de respect, il gronda :
– Comment savez-vous, vous ! que
c’est de cette maison-là que je parle !
– Dame ! fit Gérard sans paraître
remarquer l’attitude de son intendant, il n’y a que deux villas à
cet endroit. Celle où je vous envoie est parfaitement habitée.
Celle dont vous me parlez est déserte, en effet. Il n’y a pas
d’erreur possible : c’est bien la villa où s’est commis un
crime dont vous me parlez. Ah ça ! dites donc, est-ce que le
crime que vous avez commis, vous, aurait quelque rapport avec celui
de Neuilly ?…
– Non, non, bégaya Pierre Gildas
hagard.
– Écoutez, votre ancien maître, dans la
lettre où il vous présente à moi, parle d’un assassinat. Au
surplus, il répond de vous. Ce que vous avez fait ne me regarde pas
si vous êtes fidèle et discret…
– Je le serai… oh ! je vous le
jure !…
– Je vous crois. Eh bien ! pour
commencer portez donc cette lettre, qui sera la bienvenue malgré
l’heure tardive. Quant à l’assassinat du marquis de Perles, je suis
bien loin de vous soupçonner, puisque l’assassin est connu…
– Connu ? râla Pierre Gildas, qui
sentait son cerveau éclater.
– Oui. C’est un certain Jean Nib, un
scélérat sur lequel la police ne tardera pas à mettre la main.
– Non ! c’est moi, Pierre Gildas,
qui ai tué le marquis. Je sens bien que je suis condamné, et qu’il
faudra que j’y passe. Aujourd’hui ou demain… peu importe. Donc,
monsieur, si vous voulez, allons ensemble au premier poste, et vous
n’aurez qu’à leur dire : « Voilà l’assassin du marquis de
Perles que je vous amène… Cet homme s’appelle Pierre Gildas. C’est
lui qui a tué le marquis de Perles. Le marquis lui avait tendu un
piège et l’avait envoyé en centrale, mais ça ne fait rien. Le
marquis a fait de sa fille une catin et de son fils un voleur, mais
ça ne fait rien. Il faut avoir tué pour savoir ce qu’il y a
d’atroce à tuer… Tuer, ce n’est rien. Mais c’est après !
Alors, il en a assez. Arrêtez-le ça lui rendra
service !… »
Gérard sombre et fatal, écoutait l’aveu qui
s’échappait des lèvres de l’assassin.
– Ainsi, dit-il, vous vous appelez Pierre
Gildas, et c’est vous qui avez tué de Perles ?
– Je vous l’ai dit !…
– Vous avez une fille ?… Une fille
que de Perles a séduite ?… Est-ce que cette fille ne
s’appellerait pas Magali ?…
Gildas fit oui de la tête. Un livide sourire
passa sur les lèvres de Gérard qui reprit :
– Écoutez-moi sans m’interrompre. Vous
êtes Pierre Gildas, l’assassin du marquis de Perles. Dans huit
jours, dans un mois, si vous n’êtes pas en sûreté quelque part, la
police mettra la main sur vous. Alors c’est la cour d’assises et
l’échafaud. Si on vous fait grâce de la vie, c’est le bagne. Au
contraire, si vous acceptez la
Weitere Kostenlose Bücher