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Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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 – on pouvait entendre les craquements et les sifflements des
bûches qui s’y consumaient.
    L’escalier
à vis était fermé, au deuxième étage, d’une solide porte de chêne pourvue de
deux verrous, l’un à l’intérieur de la chambre, l’autre de ce côté-ci, mais à
notre étage, il n’était pas clos, et on pouvait voir les premières marches
tourner autour du pilier de pierre central, bien éclairées par un fort joli
fenestrou taillé dans la courbe du mur, et que la courbe, justement, nous
dérobait, si bien qu’on ne voyait que la lumière dorée qu’il baillait, en cette
radieuse après-midi, aux belles marches ocre que Jonas avait taillées. Je me
souviens qu’assis comme j’étais sur un escabeau, le dos contre les pierres du
mur et écoutant Escorgol, mon œil, errant dans la pièce, s’attardait souvent
sur la cavité brillante, douce et mystérieuse que faisait cette courbe de
marches tournant autour du pilier, jusqu’à la porte de chêne verrouillée
derrière laquelle la captive vivait, que nous n’avions jamais vue, sinon de
loin, à sa fenêtre. Pour moi, je me donnais là, en passant, un plaisir de
l’imagination, mais pour le pauvre François qui, comme disait la petite Hélix,
était déjà bien pris et englué, il en allait autrement, je le voyais bien. Les
yeux figés et mélancoliques, les lèvres un peu tremblantes, il regardait la
lumineuse montée des marches dans le mur, comme l’entrée défendue du jardin
d’Eden.
    Escorgol
s’interrompit soudain et, fermant les deux yeux, il dit :
    — Tiens
donc ! J’entends quelqu’un !
    Je
me levai et, me dirigeant vers l’étroite fenêtre au-dessus des mâchicoulis, je
regardai le chemin de terre qui, du bas de la courbe des Beunes, montait vers
le châtelet d’entrée. Je ne vis rien, et à part quelques cris d’oiseau,
n’entendis rien. Samson vint me rejoindre et, comme moi, tendit l’oreille.
    Cependant
Escorgol, qui avait saisi à côté de son lit une arquebuse, ferma les yeux,
écouta derechef et, reposant à terre son arme, dit :
    — C’est
quelqu’un qui vient seul, et pieds nus.
    Après
quoi, il s’approcha de nous et regarda à son tour, au-dessus de nos têtes, le
chemin vide encore. François, ne branlant pas d’un pouce, demeura sur son
siège, perdu non pas dans ses pensées, mais dans une seule.
    Tout
au bout du chemin montant vers nous des Beunes, une tête apparut, puis un
buste, puis le corps tout entier. À sa démarche, à n’en pas douter, une garce.
Quand elle approcha, je remarquai qu’elle avait tant de cheveux noirs que c’est
à peine si se voyaient ses yeux, et très peu de vêtements sur elle, les jambes et
la moitié des tétons apparaissant  – d’ailleurs robuste et l’air fier
malgré ses loques.
    — Que
veux-tu, drolesse ? dit Escorgol du haut de la fenêtre, la considérant,
mi-allumé, mi-méfiant. Si c’est pour mendier, passe. Ce jour-ci, nous ne
donnons point.
    — Je
ne mendie point, dit la fille avec assurance. Je viens parler de Jonas le
carrier avec les messieurs de Mespech.
    — Mais
je te reconnais, toi ! m’écriai-je en me penchant sur le rebord de pierre
de la fenêtre. Tu es la Sarrazine que le capitaine des Roumes nous a laissée en
otage il y a quatre ans, et que l’oncle Sauveterre a placée à la Volperie à
Montignac.
    — C’est
bien moi, Sarrazine, dit-elle en redressant la tête, comme si son nom était un
titre.
    — Si
vous la connaissez, dit Escorgol, en nous tendant une dague à chacun, descendez
lui ouvrir la porte piétonne, mais refermez bien après elle les trois verrous.
Je reste à guetter ici.
    Je
descendis en courant le petit escalier à vis qui, de l’autre côté de la
cheminée, prenait la suite de celui que j’ai décrit s’en allant vers le haut,
et qui avait mêmes dimensions, sauf qu’il était moins gai, ne prenant le jour
au rez-de-chaussée que par des meurtrières coudées par lesquelles, sans être
atteint, on pouvait navrer les assaillants qui auraient enfoncé la porte.
Samson courait sur mes talons et, au moment de tirer les trois verrous de la
porte piétonne, lui à droite et moi à gauche, nous mîmes la dague derrière le
dos, comme nous avait appris mon père. Je fixai la chaîne qui entrebâillait la
porte et par cette étroite ouverture, se baissant beaucoup et de biais, se
glissa Sarrazine, qu’une fois dedans j’appréhendai vivement par le bras, lui
mettant la pointe de ma dague sur la

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