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Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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soit ! Il va à la
messe, il se confesse, il communie, il fait des retraites dans un couvent...
    — C’est
grande pitié, alors, que les œuvres ne suivent pas les paroles...
    — Je
suis content, dit le Conseiller, de vous entendre parler des œuvres. À votre
sens, n’est-ce pas grâce aux œuvres qu’un chrétien peut espérer faire son
salut ?
    Sauveterre
se rembrunit, mais Siorac dit sans hésitation :
    — Certes,
je ne l’entends pas autrement.
    — Vous
me rassurez, monsieur le Chevalier, dit le Conseiller avec un sourire. Mais au
demeurant, je ne suis pas grand clerc et ne vous poserai que questions simples
et populaires, auxquelles il vous sera facile de répondre. Vous-même, oyez-vous
régulièrement la sainte messe ?
    — Oui,
monsieur le Conseiller.
    — Quittons
la cérémonie, je vous prie. Vous plairait-il de répondre seulement oui ou
non ?
    — À
votre guise.
    — Je
poursuis donc : honorez-vous la Sainte Vierge et les saints ?
    — Oui.
    — Usez-vous
en vos prières de l’intercession de la Vierge et des saints ?
    — Oui.
    — Respectez-vous
les médailles, peintures, vitraux et statues qu’on fait d’eux ?
    — Oui.
    — Admettez-vous
la confession auriculaire ?
    — Oui.
    — Croyez-vous
à la présence réelle de Dieu dans l’eucharistie ?
    — Oui.
    — Croyez-vous
au purgatoire ?
    — Oui.
    — Croyez-vous
que le pape soit le saint pontife de l’Église catholique, apostolique et
romaine, et que tout chrétien lui doive obéissance ?
    — Oui.
    — Croyez-vous
que le pape puisse dispenser des indulgences ?
    — Oui.
    — Adorez-vous
les reliques des saints et martyrs ?
    — Oui.
    — Suivrez-vous
à Sarlat la procession d’août en l’honneur de la Vierge, dévotement, nu-tête,
et le cierge à la main ?
    — Oui.
    Le
Conseiller voulut alors se tourner vers Sauveterre pour poursuivre son
inquisition, mais celui-ci se leva et s’avançant vers lui en claudiquant, il
lui dit d’une voix forte en le fixant de ses yeux noirs :
    — Monsieur
le Conseiller, mon frère a excellemment répondu à toutes vos questions. Prenez
ses réponses comme étant aussi les miennes. Et concluez, je vous prie, que
notre religion est la même en tout point que celle du Roi de France, que nous
avons l’un et l’autre si fidèlement servi dans la légion de Normandie.
    Cette
rude réponse était habile et le Conseiller du Parlement sentit qu’il ne pouvait
pas aller plus avant. Mais il n’était point satisfait. Car il avait l’habitude
du genre d’hommes qui était attiré par la religion réformée comme la limaille
par l’aimant et, de ce point de vue, les vertus mêmes des Capitaines, leur
sérieux, leur savoir, leur tranquille courage ne parlaient pas en leur faveur.
    — Ce
sont très honnêtes gens, dit le Conseiller au président du Parlement à l’issue
de l’interrogatoire. Ils sont sans légèreté, sans faiblesse ni faille d’aucune
sorte. Mais ils professent du bout des lèvres la religion du Roi. Et je flaire
en eux l’odeur du huguenot.
    — Bien
que vous ayez l’odorat fin, dit le président, une odeur ne suffit pas. Tant
qu’ils ne professent pas la réforme pestiférée, ils ne sont pas rebelles au
Roi. Laissons donc le zèle aux gens d’Église.
    Quelle
odeur le Parlement trouva-t-il, en revanche, au Baron de Fontenac, et de quels
appuis le bandit disposait-il, c’est ce que le bon peuple ne sut pas. Mais
l’arrêt qui le condamna, « faute de preuves matérielles et de témoignages
irréfutables », à vingt ans de bannissement hors de la Sénéchaussée de Sarlat
et du bailliage de Domme fut jugé clément à l’excès dans toute la Guyenne.
    Sur
le chemin du retour, afin de préparer le gîte pour la petite troupe à Libourne,
La Boétie, laissant là les Consuls de Sarlat et Caumont, prit quelque peu les
devants, suivi de la « frérèche ». C’est sous ce nom, maintenant,
que, selon la coutume, on connaissait les Capitaines : appellation des
plus émouvantes, puisqu’elle réunissait les deux frères sous un même vocable,
comme si désormais ils n’avaient fait qu’un.
    — Il
est dommage que nous soyons en grande hâte, dit La Boétie. Nous serions passés
par Montaigne, et je vous y aurais montré un petit drole de douze ans qui a été
élevé par son père en latin et qui fait l’admiration de tous en lisant dans le
texte les Métamorphoses d’Ovide.
    — Ce
seigneur, dit Siorac, a mille fois

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