Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
mais en chevaux, alors que seuls les deux fils de Raymond Siorac avaient
participé à leur capture.
    À
l’un et l’autre, les Capitaines donnèrent un cheval avec sa selle, et deux
encore au village, pour servir à tour de rôle aux labours. Mais les villageois,
ayant l’habitude des bœufs, préférèrent les vendre et se partager l’argent. La
frérèche garda le reste, soit six beaux et forts chevaux, aptes aux travaux des
champs comme à la selle et qui seraient bien utiles quand le temps viendrait de
rompre les friches de Mespech.
    Sans
avoir un seul blessé, on tua cette nuit-là six hommes au Baron-brigand. Et on
fit un prisonnier : le gardien des chevaux, que Cabusse avait assommé dans
les Beunes. Ramené au village, on eut toutes les peines du monde à empêcher les
paysans de le massacrer. Mais il fallait garder en vie au moins un de ces
marauds pour témoigner contre Fontenac. À en juger par le nombre des montures,
deux des assaillants réussirent à s’enfuir à pied à la faveur de la nuit, bien
que celle-ci fût assez claire. Mais il est vrai que, passé les Beunes, la forêt
de châtaigniers commence, feuillue et profonde, sans un seul espace découvert à
traverser sur les cinq bonnes lieues qui séparent Taniès de Fontenac.
    Le
lendemain lundi, jour de la vente de Mespech, les Capitaines firent entasser
les corps sanglants dans une charrette et les livrèrent à La Boétie en même
temps que le prisonnier. Celui-ci fut retiré en la geôle de la ville, mais La
Boétie exposa les morts au gibet de Sarlat, qui se dressait en ces temps en
face de la porte de la Rigaudie. Le peuple s’y pressa aussitôt. Parmi les
badauds, on notait nombre de demoiselles, bien que les six scélérats fussent
aussi nus que des vers.
    La
Boétie resta là un bon moment avec les Capitaines, non point tant pour jouir du
spectacle que pour ouïr le populaire, et noter ceux qui reconnaîtraient dans
les pendus des hommes de Fontenac avec lesquels ils avaient ribaudé peut-être
dans les tavernes. Et en effet, le vent tournant quelque peu contre le Baron-brigand,
les langues se déliaient déjà.
    Quant
au prisonnier, le bourreau lui appliqua la question une heure après son arrivée
à Sarlat, et il dit tout et bien au-delà. Car il révéla des vilenies à peine
croyables commises par Fontenac deux ans plus tôt et qui, semble-t-il, pesaient
fort sur la conscience de ce rustre, plus tendre que celle de son maître.
    En
1543, un bourgeois étoffé de Montignac, du nom de Lagarrigue, disparut. Et un
mois plus tard, sa femme quitta le bourg seule, à cheval, pour ne jamais plus
reparaître. La confession du prisonnier éclaira sinistrement ces disparitions.
Fontenac avait enlevé Lagarrigue sur la route de Montignac à Sarlat, à la
tombée de la nuit, tuant les deux serviteurs qui l’accompagnaient et retirant
l’otage en son château. Puis, dans le plus grand secret, il prévint la femme de
Lagarrigue que son mari était dans ses mains. Et à condition qu’elle ne
soufflât mot à âme qui vive, pas même à son confesseur, du lieu où il se
trouvait, il le lui remettrait sain et sauf contre une rançon de huit mille
livres. Encore devait-elle amener elle-même, et seule, la rançon en grand
secret, et sans être vue de quiconque.
    La
malheureuse, qui nourrissait pour son mari une amour extraordinaire et
tremblait de le perdre, eut la folie de croire que le Baron-brigand était homme
à foi garder. Elle lui obéit en tout point. Les portes du château refermées sur
elle, et la rançon comptée et enfermée dans ses coffres, Fontenac, qui était un
très beau gentilhomme, très instruit et très courtois, dit à la demoiselle, de
sa voix la plus douce, d’avoir un peu de patience, qu’elle n’allait pas tarder
à être réunie à son mari. Mais pas plus tôt Lagarrigue fut-il traîné en sa
présence, sanglant et enchaîné, que Fontenac, changeant de visage et de
langage, jeta la demoiselle à ses soldats, leur disant de s’en repaître s’ils
avaient cet appétit. Ainsi fut fait  – sous les regards de Lagarrigue qui
se débattait dans ses liens comme un dément. Pour que rien ne manquât à la
torture de la pauvre fille, Fontenac commanda ensuite d’étrangler son mari sous
ses yeux et la menaça d’un sort semblable. Cependant, il la garda encore deux
ou trois jours pour l’amusement de ses soldats. Mais quelques-uns parmi ceux-ci
commençant à la plaindre, car elle gardait douceur et dignité

Weitere Kostenlose Bücher