Fourier
exercés
et développés de la même manière 11 .
Lorsqu’ils sont capables de se déplacer seuls, les enfants
passent du groupe des nourrissons à celui des poupons. Puis, à trois ans, ce
sont les bambins qui les accueillent jusqu’à l’âge de quatre ans et demi.
Durant ces phases initiales, aucune distinction n’est faite entre les garçons
et les filles : « l’éclosion des vocations », phase primordiale de l’éducation
harmonienne, se joue pendant ces années-là et il est essentiel que les choix
des enfants ne soient pas limités par de quelconques préjugés sur la
répartition des rôles entre les sexes.
Jusqu’à quatre ans et demi, les enfants sont confiés à des
adultes : il appartient aux bonnes de leur présenter certains aspects du
Phalanstère et notamment les séristères, lieux de travail. Elles leur font
également visiter les ateliers miniatures où des enfants un peu plus âgés
s’amusent avec de petits outils. Ces petits ateliers sont pour Fourier des
lieux privilégiés où les enfants apprennent peu à peu à se découvrir. Ils
peuvent y donner libre cours à ce que Fourier appelle leurs cinq goûts
dominants :
- le FURETAGE ou penchant à tout manier,
tout visiter, tout parcourir, varier sans cesse de fonction ;
- le fracas industriel, goût pour les
travaux bruyants ;
- la singerie ou la manie imitative ;
- la miniature industrielle, goût des
petits ateliers ;
- l’ENTRAINEMENT PROGRESSIF du faible au
fort 12 .
La libre et complète expression de tous ces penchants dans les
petits ateliers devrait, selon Fourier, permettre aux enfants de découvrir
rapidement leurs vocations propres : au nombre de vingt-cinq ou trente, elles
ne changent guère au cours d’une vie.
A quatre ans et demi, l’enfant est prêt à quitter le chœur des
bambins pour celui des chérubins. Il laisse aussi derrière lui les bonnes; ce
sont ses pairs ou des enfants légèrement plus âgés qui désormais vont se
charger de sa conduite et de son éducation. Il n’existe pas, selon Fourier, de
forme d’éducation plus naturelle puisque « le véritable instituteur de
l’enfant, le ressort qui peut seul faire naître chez lui le feu sacré,
l’émulation industrielle, c’est une compagnie d’autres enfants plus âgés de six
mois ou d’un an 13 ». L’enfant
devra cependant mériter son entrée chez les chérubins en se soumettant à une
sorte d’examen (opération qui sera répétée pour chaque passage dans un chœur
supérieur). Voilà ce que l’on sera en droit d’attendre d’un enfant de quatre
ans et demi :
... une bambine de quatre ans et demi, postulant
l’admission au chœur des chérubines [...] subira à peu près les épreuves
suivantes :
1. Intervention musicale et
chorégraphique à l’Opéra.
2. Lavage de 120 assiettes en une
demi-heure, sans en fêler aucune.
3. Pelage d’un demi-quintal de pommes
en temps donné, sans en retrancher au-delà de tel poids indiqué.
4. Triage parfait de telle quantité de
riz ou autre grain en temps fixé.
5. Art d’allumer et couvrir le feu
avec intelligence et célérité 14 *.
* Notons que cet examen est destiné à une bambine. Après
les deux premiers chœurs, Fourier prévoit des chœurs masculins et féminins :
les séraphins et les séraphines, les jouvenceaux et les jouvencelles par
exemple. Les garçons comme les filles restent cependant libres de se joindre à
un chœur du sexe opposé. Dans la Phalange, les rôles sont donc choisis plutôt
que prescrits.
La plupart des épreuves auxquelles doit se soumettre un futur
chérubin sont d’ordre manuel ou physique. Cela est encore vrai des tests
permettant d’être reçu chez les séraphins, chœur des enfants de six à neuf ans
et demi. Dans la Phalange, « on ne cherchera point, comme dans l’éducation
actuelle, à [...] faire des savantins précoces », précise Fourier. Il suffit
d’observer les penchants des enfants de moins de neuf ans pour s’apercevoir
qu’ils sont « très-portés à tous les exercices matériels, et fort peu aux
études ». Il est donc nécessaire de suivre « le vœu de la nature ou Attraction
» en mettant dès le début l’accent sur le développement physique 15 . Fourier n’oublie toutefois pas de
préciser que le développement physique n’est pas un but en soi mais plutôt un
prélude au développement ultérieur des émotions et de l’intelligence :
Pour acheminer à l’éducation de l’âme ou portion
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